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 De Noir et de Rouge

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Jarlaxle
Bregan d'Aerthe.
Jarlaxle


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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 16 Mar 2013 - 12:27

Citation :
(je crois que si elle prennait forme dans notre réalité, elle en profiterait pour buter son auteur :-p )

Je n'ai même pas réussit à rendre ça certain ?

En tout cas merci de la comparaison, même si je ne la tiens évidemment pas :noel:
Je dois avouer que la scène de l'hôpital était sans doute l'une de celles qui m'a inspiré cet extrait. J'ai d'ailleurs hésiter à lui faire fracasser le crâne avec la porte, tout se rejoint :doute:
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Arax, Inquisiteur
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeDim 17 Mar 2013 - 19:24

L'aventure n'avance pas trop sur ce post, néanmoins on sent un léger relâchement sur l'écriture avec notamment quelques fautes que l'on ne retrouvait plus chez toi depuis un moment (par exemple une phrase au présent au milieu d'un plein paragraphe de passé en début de texte et qui, à mon sens, ne se justifie pas).
Sans quoi... on ne va pas dire que c'est agréable à lire, je suis slaaneshi mais quand même :p
Dans une telle scène j'aurais peut être aimé un peu plus d'insistance sur le ressenti psychique du personnage plus que sur les détails physiques, cela aurait d'une part beaucoup apprit sur la façon d'appréhender les difficultés de Viconia et d'autre part aurait ajouté de l'intérêt.

Sans quoi, on reste toujours dans un monde sombre comme je les aime et ça c'est du tout bon, sweet!
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Jarlaxle
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeLun 9 Sep 2013 - 10:11

Je m'y suis enfin remis.


Chapitre VIII :

Viconia inspira lentement à plusieurs reprises. Elle essayait de se concentrer sur la mission, d'effacer de sa mémoire les dernières minutes. Ce n'était pas le moment de flancher, elle devait découvrir qui était derrière tout ça et sortir d'ici. Et si au passage elle pouvait lui faire savoir ce qu'elle pensait de son accueil ça n'en serait que mieux. Elle quitta la salle dans laquelle elle avait été retenue pour se retrouver dans un couloir. D'autres portes l'occupaient mais les pièces sur lesquelles elles donnaient étaient pour la plupart effondrées ou envahis de déchets divers. Elle avança prudemment, faisant attention aux planches de bois pourris qui menaçaient de rompre sous ses pieds et aux pas qui trahiraient la venue d'un autre ouvrier. Elle arriva finalement au bas d'un escalier. Espérant repasser à l'air libre, elle l'emprunta. A son sommet elle se glissa dans l'ombre du seuil et jeta un coup d’œil discret au-delà. L'escalier donnait sur le rez-de-chaussée, elle pouvait voir les fenêtres condamnées et les raies de lumière lunaire qui passait à travers. C'était une grande salle, dont le seul ameublement consistait en un nombre élevé de chaises, quelques tables et une estrade improvisé au centre. Visiblement le lieu de réunion du fameux cratère. Au moins elle était au bon endroit.
A l'autre bout de la pièce, un deuxième escalier permettait d'accéder aux étages supérieurs. Celui qu'elle cherchait y était probablement, le siffleur avait mentionné d'informer un certain ''guide'' de son réveil. Elle chassa les pensées qui revinrent l'assaillir à ce détail et se mordit la langue pour que la douleur la ramène au monde réel. Sans un bruit, elle traversa la salle de réunion et s'engagea dans l'escalier, tendant l'oreille au moindre bruit suspect. Elle arriva finalement dans un autre couloir, semblable à celui du sous-sol, flanqué de pièces latérales. Elle s'avança doucement, la plupart des portes n'existaient plus et elle jetait de bref coups d’œil à l'intérieur des pièces. Elles étaient vides, mais dans certaines on avait commencé à monter des lits ou d'autres meubles. Cet endroit était-il destiné à accueillir des gens ? Et le cas échéant, combien ?

La réponse lui apparut au fil de son ascension dans la bâtisse. Elle passa deux étages semblables et chaque fois il comptait un peu plus de portes fermées. Et derrière celle-ci, la respiration apaisée des dormeurs. Il pouvait y avoir déjà quelques dizaines d'esclaves. Mais elle n'en comprenait pas l'intérêt, l'endroit n'avait rien de plus salubre que le reste des Taudis. Et les contremaîtres les y trouveraient comme n'importe où ailleurs si les occupants ne se présentaient pas à l'usine. Finalement, Viconia parvint au dernier étage. Celui-ci ne comportait qu'un petit couloir, deux pièces latérales dont l'une était ouverte et qu'elle identifia comme une chambre et une porte face à elle qui devait donner sur une pièce plus vaste. Lui parvinrent quelques voix étouffées depuis celle-ci et elle se colla au bois décrépis.

« … de temps attendrons-nous encore ?
-Patience, nous devons pousser Hock à bout. Tout ne sera qu'une formalité après. »

Viconia tiqua en entendant le nom de son maître et perdit de vue la suite de la conversation. Ils connaissaient Hock et voulaient visiblement lui nuire personnellement. Pourquoi, cela restait à élucider. Mais elle comprenait désormais pourquoi c'est elle qu'on avait envoyé, aucun des gros bras habituels n'auraient pus découvrir ça. Elle allait de nouveau écouter ce qui se disait lorsqu'une porte s'ouvrit derrière elle. Elle fit volte-face rapidement pour se trouver en face du pote au siffleur, lequel eut un instant d'étonnement à la voir ici. Elle lui décocha un coup de pied au visage qui l'envoya s'écraser au sol avec le nez en sang. Le bruit alerta les occupants de la pièce voisine et elle décida de forcer la porte d'un coup d'épaule.
Ils étaient deux, Konrad qu'elle reconnut aussitôt et un autre habillé d'une espèce de longue tunique informe. Mais elle remarqua aussitôt que ses yeux étaient de la même couleur. Le fameux guide à n'en pas douter. Elle saisit sa dague et la lança en direction de sa cible lorsqu'un violent mal de crâne lui fit perdre l'équilibre et se saisir la tête à une main. La dague fila maladroitement et se planta en vibrant dans une poutre à une dizaine de centimètres du guide. Konrad lui avait déjà empoigné un pistolet automatique et mettait Viconia en joue mais n'avait de toute évidence jamais tiré avant ça. Sa première balle traversa le plancher à ses pieds, et l'assassine n'attendit pas de deuxième coup. Vu le brouhaha qui s'élevait des étages inférieurs, elle jugea préférable de faire retraite et courut en direction d'une des fenêtres. L'absence de carreau avait un côté pratique et elle bondit à travers l'ouverture tandis que deux autres balles la manquaient, de beaucoup moins loin cette fois-ci. Elle tendit son corps et plongea dans le canal qu'elle vit en contrebas. Elle s'enfonça dans l'eau opaque et chercha à gagner l'abri des pontons. Elle sentit plusieurs balles traverser l'eau autour d'elle mais pas une ne l'atteignit. Elle remonta à la surface, les poumons brûlants et elle inspira autant d'air que possible. Les tirs avaient cessé mais elle ne doutait pas qu'on allait la poursuivre. Elle se hissa rapidement sur le bord et courut au hasard des ruelles. Elle attira le regard des quelques passants encore debout, le passage forcée dans l'eau n'ayant pas vraiment amélioré la décence de sa tenue. Au bout d'un moment de fuite éperdue, et pensant avoir mis assez de distance entre elle et ses poursuivants, elle escalada l'un des bâtiments autour d'elle pour gagner les toits et essayer de se repérer. Elle devait savoir où se trouvait ce fameux cratère.

Elle revint donc sur ses pas, se servant des ombres des toits pour se cacher. Elle aperçut rapidement l'immeuble, qui n'avait rien de particulier en extérieur, et récupéra ce qui tenait lieu d'adresse dans les Taudis. Ils ne capturerait pas les meneurs, ceux-ci seraient sans doute déjà partis lorsque les hommes de main de Hock investiraient la place, mais peut-être pourraient-ils récupérer des indices intéressants. Bondissant de toit en toit, elle s'éloigna du bâtiment pour regagner le port.

Elle se glissa dans sa chambre du Lotus. Les effluves des clients précédents pénétrèrent son nez mais cette fois elles firent revenir en elle les images d'une cave et la douleur de son bas-ventre. Elle n'eut que le temps de se précipiter dans la pièce appropriée pour rendre le contenu de son estomac. Elle ne sentit qu'à peine le goût acide dans sa bouche, tant les sensations qui l'agressaient de nouveau étaient violentes. Elle pleurait, autant de rage et de colère que de honte. Elle s'était fait avoir comme une bleue, comme une gamine insouciante. Elle frappa le mur à s'en faire saigner les phalanges, la douleur soulageant un peu sa peine. Ce n'était pas sa faute, lui répétait une petite voix insistante. Non, ce n'était pas sa faute. Rien n'était sa faute, elle avait depuis longtemps cessé d'être maître de son destin. Elle ne l'avait jamais été. Rien n'était donc de sa faute : son viol, le meurtre de la fillette... Elle se traîna jusqu'au lit et se coucha en position fœtale, repliée sur elle-même. Elle n'osa pas se couvrir des draps puants et s'endormit en continuant de pleurer, se berçant dans cette conviction nouvelle.

Au lendemain elle ouvrit des yeux rougis et s'étira douloureusement. Elle était ankylosé de sa position et s'assit sur le bord du lit pour récupérer. Elle ne comprenait plus vraiment son apitoiement de la veille, mais elle se sentait indéniablement mieux. Une de ses rares bonnes nuits. Elle se leva finalement et se débarrassa de ses vêtements avec un moue de dégoût en sentant les tissus souillés frotter contre sa peau. Elle se passa sous le jet d'eau froide de la douche puis s'habilla avec ce qu'elle trouva dans les affaires qu'elle s'était amené. Ce qui signifiait son body en tissu et un pantalon de toile usé. Elle quitta la chambre en récupérant le tas d'affaires jeté au sol et descendit aux cuisines de l'établissement, le seul endroit où l'on trouvait une cheminée. Elle jeta ses affaires dans le feu et allait quitter la pièce quand l'esclave qui avait gagné sa nuit s'approcha d'elle.

« Dis-moi, quand est-ce que je récupère mon prix ? »

Il avait un petit sourire pervers. Le pauvre ne s'attendait certainement pas à ce qui suivit. Viconia lui saisit le bras sans prévenir et lui faucha une jambe. Elle passa dans son dos et tordit le bras dans un angle douloureux, qui bloquait toute action de la part de son porteur.

« Je te conseille sincèrement d'oublier ça, d'accord ? »

Il hocha rapidement la tête dans un couinement de douleur et elle le relâcha, avant de quitter les cuisines sous les regards craintifs des spectateurs. Elle monta rapidement les étages pour aller toquer au bureau de Dan. Sans réponse, elle ouvrit la porte et ne l'y trouva pas. Pas franchement décidé à attendre, elle grimpa encore un étage et entra sans s'annoncer dans sa chambre. L'afflux soudain de lumière tira de leur sommeil les deux hommes dans le lit. Le plus musclé des deux plissa les yeux avant de râler.

« Putain Vic', t'es obligé d'être aussi chiante ?
-J'ai besoin de voir Hock. Tout de suite. Il me faut l'argent. »

Dan râla encore un peu pour la forme, écarta le bras de son amant qui avait replongé dans les vapes et sortit de son lit avant de se couvrir d'un peignoir. Il accompagna Viconia au bureau où il récupéra l'outil et l'anneau d'argent, puis invita la rousse à venir s'asseoir sur l'un des fauteuils.

« T'as trouvé ce que tu cherchais ?
-Oui. Et j'ai des informations pour Hock.
-J'espère qu'elles sont bonnes, il est à cran en ce moment. Avec toutes ces grèves.
-Justement, ça les concerne.
-Bah, qu'est-ce qui ne les concerne pas maintenant ? A croire que tout tourne autour de ses usines dans cette ville. Et voilà c'est bon. »

Viconia se releva et porta sa main à son oreille. Elle passa les doigts sur les fines gravures qui lui étaient propre. Pas question que son anneau trahisse son employeur, seuls certains hommes de Hock connaissaient celles-là. Et à part Dan, elle n'avait rencontré aucun de ces hommes.

« Je suis pressée. Tu pourras faire ramener mes affaires ? » Demanda Viconia.
« Adresse habituelle ? » Elle opina du chef. « Pas de problèmes. Tu y vas comme ça ?
-A moins que tu n'ai une tenue à me prêter ? »

Lorsqu'elle quitta le Lotus, elle avait emprunté la tenue d'une des esclaves de Dan. Un peu trop excitant à son goût, mais elle n'avait pas vraiment eu meilleur choix. Et elle avait réussit à camoufler dedans une dague et un stylet. Elle remonta les rues vers les quartiers bourgeois et le manoir de Hock, où elle n'avait pas du mettre plus de cinq fois les pieds.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeLun 9 Sep 2013 - 14:03

Chapitre IX :

Viconia arriva à proximité du manoir alors que le soleil avait un peu dépassé son zénith. Malgré l'air encore assez frais, elle était en sueur. Rien à voir avec la montée, non, elle était simplement en manque. C'était pour l'instant léger, elle arrivait encore à entendre ce qu'il se disait autour d'elle. Elle avait oublié de prendre des graines à Dan. Elle serait quitte pour aller en chercher de nouvelles juste après son entretien avec Hock. Dans l'instant, elle s'approchait d'une des portes de service et entra un code sur le petit boîtier. La porte face à elle, bien que d'apparence tout à fait ordinaire, coulissa dans un chuintement et laissa le passage à l'esclave. Il n'y avait que chez Hock que l'on trouvait ainsi la technologie employée si futilement. N'importe quel autre noble se serait contenté d'une serrure classique. Ce n'était même pas pour la sécurité, le code était simple et la porte fragile. La sécurité était plutôt assurée par les gardes de la maison en faction derrière. Ils regardèrent Viconia et l'un d'eux s'approcha.

« C'est bon messieurs, elle peut passer. »

C'était un vieil esclave qui venait de parler, le majordome du manoir. L'un des rares à connaître Viconia pour ce qu'elle était réellement. Et il devait veiller à ce qu'aucun autre ne le découvre. Le garde haussa les épaules et retourna s'asseoir tandis que Viconia suivit le majordome qui l'entraîna dans une pièce de service déserté. Il se tourna vers elle et la fixa d'un regard dur qu'elle lui rendit. Contrairement à Dan, ils ne se montraient aucun respect l'un l'autre. Peut-être parce qu'ils étaient tous les deux Natifs et que le majordome voyait d'un mauvais œil cette jeune parvenu qui semblait disposer de traitements de faveur. « S'il avait sus. » songea Viconia, il en aurait probablement souris jusqu'au oreille.

« Vous n'avez pas été convoquée. » lui dit-il sur le ton de la colère contenue.
« Je dois lui parler.
-Impossible. Comment est votre cible ?
-Vivante. Mais j'ai des informations sur ce qu'il y a derrière. »

Le majordome haussa un sourcil à ces derniers mots. Il sembla hésiter un moment et elle soutint son regard inquisiteur par un air déterminé. Il était particulièrement déroutant, surtout avec son œil d'or un peu voilé, comme éteint. Finalement il lui dit d'attendre et quitta la pièce. Il revint quelques minutes plus tard et lui fit signe de le suivre. Il la mena à l'étage puis lui demanda d'attendre quelques minutes, tout en lui tendant un plateau encombré d'une théière et d'un plateau de douceurs. Elle ne patienta pas longtemps et finalement le majordome la poussa à moitié le long du couloir qui menait, elle le savait, au bureau de Hock. Alors qu'elle venait de s'engager, la porte du bureau s'ouvrit et laissa échapper un homme athlétique aux épaules carrés. Elle le détailla un instant, mais détourna un regard voulus humble lorsqu'elle sentit ses deux yeux marrons le fixer. Il ne fit pas plus attention et la croisa sans s'en soucier. Arrivée à la porte, elle se tourna pour l'observer un peu plus puis entra dans le bureau de Hock.

La pièce n'avait pas vraiment changée depuis sa dernière visite. Toujours aussi rigoureuse dans son ornement. Hock était assis à son bureau, lui non plus n'avait pas changé. Il avait l'air visiblement contrarié si bien qu'il ne remarqua qu'à peine son entrée et encore moins qui elle était. Elle s'approcha doucement et déposa le plateau sur le bureau, sans vraiment savoir s'il était important ou non. Visiblement apprécié en tout cas puisque Hock pris un biscuit et lui fit signe de servir une tasse. Comme à chaque fois qu'elle se retrouvait face à lui, elle perdait la plupart de son orgueil et elle s'exécuta donc. Elle lui tendit une tasse qu'il attrapa sans la remarquer, plongé qu'il était dans quelque réflexion. Elle toussota pour attirer son attention. Il releva soudainement la tête et lâcha, exaspéré :

« Qu'est-ce que vous attendez pour... » Il s'arrêta au milieu de sa phrase et continua sur un air étonné : « Mais qui t'as permis d'entrer ?
-J'ai des informations monsieur, je pense qu'elles vont vous intéresser. »

Il lui fit signe de se taire, puis pressa un bouton sur son bureau. Elle n'en connaissait pas l'utilité, ça c'était nouveau. Puis il reprit la parole :

« Tu as tué Konrad ?
-Non monsieur, mais j'ai rencontré celui qui se cache derrière.
-Vraiment ? » Elle perçut l'intérêt dans le ton de sa question : « Qui est-ce ?
-Je ne le connais pas monsieur, mais ce n'est pas un Natif. Et il connaît votre nom. » Elle ajouta cette dernière phrase persuadé d'avoir un indice capital.
« La moitié des habitants non-Natifs de cette ville connaissent mon nom.
-Il parlais de vous pousser à bout. » Ajouta-t-elle après un silence gêné.
« C'est donc bien un complot... »

Il s'enfonça dans le silence à nouveau. Viconia n'osa pas le déranger ni même se retirer. Elle avait comme l'impression de s'être emportée sur ces fameuses révélations. D'un côté Hock ne s'était pas encore énervé, c'était donc qu'il y accordait une réelle importance. Il se leva finalement de son fauteuil et se mit à faire les cent pas dans son bureau. C'était signe qu'elle allait de nouveau avoir du travail. Finalement il s'arrêta près d'elle et son regard calculateur la parcourut de bas en haut, comme s'il jugeait ses chances. Ce qui ne manqua pas de l'intriguer, il était rare qu'elle affronte des hommes susceptible de se défendre.

« Intéressant. Peux-tu me dire où ce cache cet intriguant ? »

Elle sortit un bout de papier où elle avait griffonné l'adresse du fameux guide et le lui tendit. Il y jeta un œil avant de le poser sur le bureau. Elle s'interrogea :

« Vous ne vous en occupez pas monsieur ?
-Pas tout de suite, mais certains de mes gens ne manqueront pas de s'en occuper dans les prochains jours, ce n'est plus ton affaire.
-C'est mon affaire ! » Elle avait parlé sans réfléchir, mus par un besoin aussi mystérieux qu'impérieux d'exprimer la rancune qu'elle avait ravalé jusque là : « J'ai tué une gamine, je me suis faite violé pour vous obtenir ça, vous ne pouvez pas m'empêcher... »

Le coup fut sec. Hock n'était pas particulièrement musclé mais il avait bénéficié de quelques augmentiques de bonne facture, et Viconia ne s'y était absolument pas attendu. Il avait frappé du revers de la main, et elle s'était effondrée contre le bureau, plus sous le coup de la surprise et de la disparition de sa hargne que d'une réelle douleur. Elle se releva doucement et essuya un filet de sang qui coulait de sa lèvre. Elle se remit face à Hock, son arrogance disparus et les yeux légèrement humide. L'homme relâcha son air si sévère et alla de nouveau s'asseoir à son bureau. Il ferma un instant les yeux, comme pour mesurer tout le poids de ce qu'il allait dire, puis fixa sur elle un regard froid.

« Tu vas assassiner le commissaire Ferginson. »

Viconia fut surprise, un commissaire ce n'était pas rien. Il s'agissait des plus haut représentants de l'ordre en ville après le préfet, rien de moins. S'il voulait qu'elle en assassine un, elle devinait que Hock n'y avait pas recours de gaieté de cœur. La situation était-elle encore plus critique qu'elle ne le pensait ? Peut-être. Elle s'inclina légèrement et fit demi-tour. Lorsqu'elle eut atteint la porte, il lui adressa quelques mots.

« La plus grande prudence est de mise, ne te fais pas repérer et ne laisse aucun indice. Si ce n'est pas possible, abandonne la mission. On ne doit en aucun cas pouvoir me menacer après cette opération. »

Viconia acquiesça, mais elle ne pouvait empêcher une pensée de se mettre au premier plan dans son esprit : « Il se fiche pas mal de toi. ». Elle était dérangeante. Non pas qu'elle eut jamais pensé que Hock tenait à elle -il l'avait recueilli et fait élever comme une arme- mais y penser de manière si sèche avait quelque chose de gênant. Elle quitta le bureau et bientôt le manoir pour regagner sa planque. Elle attendit quelques heures, qu'un coursier de Hock arrive avec une lettre cachetée. A l'intérieur, une adresse, quelques informations utiles sur la garde ou la compagnie de Ferginson et un rappel à la prudence la plus extrême. Elle fut travaillée par ses pensées pendant longtemps, jusqu'à ce qu'elle s'aperçoive que Dan avait joint son propre colis lorsqu'il avait fait remonter ses affaires. Elle décida de s'offrir une détente avant la nuit et croqua une graine avec délectation.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 21 Sep 2013 - 10:01

Chapitre X :

Viconia émergea de sa transe alors que le soleil passait derrière les toits des bâtiments de l'administration impériale. La lumière orange et les ombres gigantesques lui donnèrent l'impression d'être encore dans un de ses délires drogués et elle se massa les tempes pour reprendre pleinement conscience du monde environnant. Elle se débarrassa ensuite de ses vêtements dans lesquels elle avait sué abondamment et enfila une tenue de domestique 'empruntée' chez Hock, un pantalon noir et un tailleur de la même couleur, elle allait faire un peu de reconnaissance avant de passer à l'action et c'était pratique et discret. Si tout se passait bien, elle pourrait agir dans la nuit du lendemain. Elle attrapa une de ses dagues, un sac qui traînait à côté, ouvrit sa fenêtre et grimpa sur le toit. Elle était encore un peu trop visible à son goût, se découpant distinctement dans les derniers rayons solaires, mais à cette heure les rues étaient embouteillés de petites gens qui allaient passer la fin de journée avec leurs amis. C'était un véritable calvaire de s'y déplacer, plus encore pour un Natif.
Elle prit alors la direction d'une des collines de la ville, où était supposé se trouver la demeure du commissaire. Elle espérait ne pas l'y trouver, sans doute était-il encore en train de travailler ou de rencontrer quelque gros pontes. Lorsque ceux qu'ils devaient protéger étaient absent, les gardes étaient toujours plus relâchés, avec un peu de chance elle pourrait effectuer une petite reconnaissance directement sur le terrain et ne pas se contenter d'observations extérieures. Pour le fils Skarn elle avait pus avoir ce luxe et avait trouvé l'endroit parfait où l'attendre. Ceci dit c'était un imbécile orgueilleux qui compliquait beaucoup la tâche de ses gardes du corps avec ses exigences à ne pas les voir s'approcher trop près de lui. Ferginson, pour ce qu'elle en savait, était un militaire de carrière, elle s'attendait à une sécurité renforcée.

Après un trajet rallongé par les précautions qu'elle avait du prendre pour éviter de se faire surprendre elle arriva finalement non loin de ce qu'elle cherchait. C'était un quartier de haute-bourgeoisie, dans une périphérie récente de la ville. Elle fut obligée de redescendre au sol, les demeures devenaient trop espacées pour sauter d'un toit à l'autre, entourée de jardins en marche soigneusement entretenus par des jardiniers. Tout cela rivalisait de mauvais goût et de course à la dorure dans une imitation grotesque de la noblesse. La plupart de ceux qui habitaient ici étaient de nouveaux riches, pour la plupart grâce à l'ouverture renforcée de la planète sur le reste de l'Imperium, et étaient bouffis de suffisance. Le problème dans ce genre d'environnement était de trouvé un bon point d'observation. Pour l'instant elle se contentait de remonter entre les bâtisses, par les allées qui permettaient la circulation des domestiques sans risque d'importuner leurs maîtres. Ce genre d'aménagements, qui n'existait pas dans la vieille ville aristocratique, faisait ressentir pleinement toute l'organisation de l'endroit, qui ne s'était certainement pas bâtis au hasard et dans l'anarchie. La demeure de Ferginson était surveillée, elle passa devant un agent équipé d'une armure de combat et d'un fusil à pompe qui gardait l'entrée de service. Il faut dire que le commissaire avait pas mal tendance à débaucher les hommes sous ses ordres pour son propre profit. De toute façon, la section anti-terroriste n'avait qu'une utilité toute symbolique, censé contenir les mouvements éventuels des Natifs mais cela faisait longtemps qu'il n'en existait plus. Enfin, du moins tout le monde en semblait convaincus, Ferginson le premier. Même s'il se servait de n'importe quelle excuse pour intervenir là où l'on ne voulait pas de lui.
Viconia dépassa largement sa cible, tout en cherchant aux alentours un endroit qui pourrait lui servir de point d'observation. Elle repéra un arbre, dans un jardin un peu plus loin le long de la ruelle, qui pourrait très bien faire l'affaire. Elle s'en approcha et observa discrètement l'intérieur. A cette heure, les jardiniers avaient depuis longtemps finis leurs heures et visiblement le propriétaire n'était pas du genre à payer des gens à ne rien faire, l'endroit était donc désert. Un coup d'oeil rapide aux alentours lui apprit que personne n'était susceptible de la repérer et elle disparut dans l'ombre du mur. Un instant plus tard elle passait son sommet et se réceptionnai souplement entre deux buissons de l'autre côté. Elle tendit l'oreille, à l'affût, puis se glissa hors de sa protection végétale. Elle couvrit la courte distance qui la séparait de l'arbre et l'escalada aussitôt. Elle prit bien garde à rester aussi discrète que possible et veillait à ne pas effleurer les plus fines branches qui auraient aussitôt trahis sa présence par leur mouvement, alors que l'air était lourd et dépourvus de brise. Finalement parvenus à une hauteur satisfaisante, elle choisit une branche assez solide comme point d'observation et se défit de ses vêtements de domestique pour ne plus rester qu'en body noir. Elle rangea les vêtements dans son sac, ils pouvaient servir et elle ne voulait pas les abîmer. Puis elle s'allongea sur la branche, se mit dans la meilleure posture possible et observa ce qui se passait dans la demeure de Ferginson. Elle n'avait pas remarqué la lunette de fusil braquée sur elle depuis le toit de sa cible, pas plus que l'homme derrière, tapis dans l'ombre et aussi immobile qu'une statue.

Viconia pesta. Elle avait vus d'un œil inquiet de nombreuses livraisons acheminées chez Ferginson, et il lui avait bien semblé que les domestiques étaient anormalement actifs, du genre à préparer quelque chose. C'était désormais évident avec le ballet de calèches antigrav richement décorées qu’elle pouvait apercevoir dans l'avenue principale, le commissaire avait organisé une réception ce soir là. Pourquoi et avec qui, elle n'en avait aucune idée. Mais cela ruinait toute tentative de reconnaissance plus avant. Elle décida donc, ne voulant pas risquer d'être découverte ou de se bloquer une évacuation discrète lorsque la réception battra son plein, de se retirer et qu'elle ne reviendrait que le lendemain. Elle se laissa glisser de son perchoir, toujours autant su ses gardes, puis, plutôt que de repartir par là où elle était venus, traversa l'ensemble du jardin et escalada le mur pour se retrouver dans une autre allée de domestiques, déserte celle-ci. Le couvre-feu était tombé depuis longtemps et elle allait devoir rester discrète. Elle fit donc un large détour pour éviter autant les invités que les employés de Ferginson, puis rejoignit les quartiers populaires en prenant garde à éviter les patrouilles de sécurité.


La demeure du commissaire Ferginson bruissait d'une activité rare. Son salon principal, une vaste pièce tout en longueur dont l'un des côtés était constitué d'une longue galerie donnant sur l'extérieur et l'autre tapissé de miroirs pour renforcer de manière totalement artificielle l'impression de grandeur, bruissait des murmures de quelques dizaines d'invités. L'essentiel de la haute noblesse était en ces murs et discutait entre elle, rassemblée par petits groupes entre lequel allait et venait des domestiques chargé de plateaux sur lesquels s'alignaient boissons et amuse-gueules gastronomiques. Et à l'entrée, Ferginson se chargeait d’accueillir chacun de ses invités. A ses côté se tenait une jeune femme brune, qui semblait bien frêle comparé à la carrure de militaire du maître de maison, mais qui n'en demeurait pas moins très désirable, ses courbes voluptueuses mises en valeur par la robe rouge qu'elle portait, laquelle faisait un délicieux contraste avec sa peau très claire.

« Tu vois, ils sont tous venus. » Dit-elle au commissaire en glissant sa main dans la sienne.
« Il manque encore le baron Cairn. S'il ne vient pas, je perds mon temps.
-Je crois que c'est justement lui qui arrive. »

En effet, un vieil homme voûté sur sa canne et au faciès recouvert de rides venait d'entrer dans la pièce, suivit par divers proches à qui l'on accordait pas vraiment d'importance. Aussitôt, le héraut annonça le nouveau venus et ses multiples titres et possessions. Un silence respectueux salua le prestigieux arrivant, puis les conversations mondaines reprirent possession de l'atmosphère. Le baron Cairn se dirigea de sa démarche claudicante vers le commissaire, qui lui évita trop d'efforts en s'avançant à sa rencontre. Ce fut aussi lui qui s'exprima le premier.

« Ah, baron, c'est un honneur pour moi de vous rencontrer en personne et de vous accueillir en ma demeure. J'espère que vous trouverez la soirée à votre goût.
-Allons, allons, vous en faites trop. » Répondit le vieillard sur le ton de la fausse modestie. « Je n'allais pas refuser une invitation d'une personne aussi sympathique, c'est tout à fait ce que j'ai dis quand je l'ai reçus, vous êtes très sympathique. N'est-ce pas Anthony ? » Il s'adressa à un jeune home qui l'accompagnait, lequel hocha la tête.
« Tout à fait grand-père, ce sont vos mots près.
-Mais je ne crois pas t'avoir présenté. Commissaire, voici Anthony, mon petit-fils et mon plus fidèle conseiller. » Ferginson hocha respectueusement la tête et serra la main d'Anthony, il connaissait évidemment le petit-fils du baron Cairn.
« Et qui est cette ravissante jeune femme ? » Demanda soudain Cairn en semblant apercevoir la jeune brune pour la première fois. Celle-ci lui sourit et exécuta une révérence parfaite en se présentant.
« Alesa du clan Kambuu, pour vous servir monseigneur.
-Du clan Kambuu ? Vous venez de l'Archipel ?
-Déduction tout à fait juste baron.
-Enchanté de vous rencontrer en ce cas. Ferginson, vous vous êtes trouvés une compagne d'une beauté rare.
-A vrai dire nos relations ne sont pas de cet ordre.
-Baste, laissez faire le temps. »

Alesa abandonna le baron à ses discussions en remarquant, à l'entrée d'un des salons secondaires, un homme entre deux âges. Il avait des cheveux châtains, que retenait en arrière un bandeau, et un regard bleu acier dur. Plutôt musclé, il portait sans difficulté apparente une armure de combat noire semblable à celle de ce monde bien que semblant plus évolué. Alesa s'excusa alors auprès du commissaire et de ses invités et s'éloigna de leur petit groupe. Il lui sembla capter une plaisanterie tandis qu'elle s'éloignait mais elle n'y prêta pas attention. L'homme à la porte du salon avait disparus mais cela ne l'inquiéta pas le moins du monde. Elle s'approcha de la porte et se glissa dans la pièce. Il l'y attendait, observant une peinture, selon elle, d'assez mauvais goût.

« Qu'est-ce qui ne va pas Kylar ? » Elle avait un ton plus autoritaire et semblait contrariée de son intervention.
« On a eu de la visite.
-Comment ça ?
-Une espionne, elle est arrivé déguisée comme une domestique et est restée planquée dans un arbre toute l'après-midi à observer la demeure. Elle est repartis il y a pas cinq minutes.
-Et tu ne l'a pas suivis pour savoir où elle allait ? » On ressentait un peu d'exaspération dans sa voix.
« Tu m'a demandé -ou plutôt ordonné- de surveiller depuis le toit ; je ne peux pas faire les deux.
-Bon, tant pis. » Elle se massa les tempes. « Quelqu'un l'a vus ?
-Je suis à peu près sûr que non, moi-même j'avais du mal depuis le toit, depuis la rue se devait être impossible.
-Bien. Pas un mot sur ça à quiconque. Si jamais tu la vois revenir, tu la suis et tu essayes de découvrir qui elle est et pour qui elle travaille.
-Et si elle devient une menace ?
-Tu l'abats, évidemment. C'était une impériale ?
-Non. Une native. Ça change quelque chose ?
-Cela pourrait. Tu sais ce que tu dois faire, rien d'autre à signaler ? »

Kylar secoua distraitement la tête et Alesa quitta la pièce pour rejoindre la réception. Elle s'excusa avec un sourire poli d'avoir été un peu longue et fut rapidement entraîné dans des discussions mondaines, pour la plupart futiles ou exaspérantes.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 2 Nov 2013 - 18:04

Je suis en train de relire la fic depuis le début et je me rend compte d'une chose: c'est bien plus facile à suivre lorsqu'il n'y a pas plusieurs mois entre chaque chapitre lu!

Quoi qu'il en soit, à nouveau je dois dire que j'aime beaucoup l'ambiance qui est retranscrite, Viconia est un personnage attachant, très éloignée, par ses faiblesses, des espèces de demi dieux que l'on voit dans certains récits 40kiens et ça fait du bien une fois de temps en temps.
De même je trouve que tu as développé un monde intéressant, qui va bien dans le côté dark du 41eme tout en sortant des chantiers battus, chose que j'apprécie fortement comme certains pourraient s'en douter ^^

Petit détail: je me suis rendu compte en relisant que... et bien les premiers chapitres auraient profité d'une bonne relecture à tête reposée, il y a pas mal de petites coquilles pas bien graves mais tout de même présentes.

Quoi qu'il en soit, j'attend avec impatience de voir ce que tout ce toutim va provoquer :)
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 9 Nov 2013 - 17:27

Chapitre XI :

Viconia arpentait les ruelles en pente douce qui menait vers le cœur de la cité. Elle avait pus repéré les lieux, mais pas les patrouilles de garde ou les autres informations qui auraient pus l'intéresser. Elle allait devoir y revenir, mais avait eu la désagréable impression de se faire observer. Pourtant elle était certaine que personne ne pouvait la voir où elle s'était cachée. Elle s'arrêta en plein milieu d'une rue, tendue. Elle glissa sa main vers une de ses dagues, puis se retourna vivement en pointant l'arme vers un agresseur invisible. Elle fut surprise de ne trouver personne. Elle avait réellement l'impression d'être observé, suivis même depuis un moment. Sans guère se détendre, elle inspecta minutieusement les alentours du regard, cherchant le moindre indice qui trahirait un éventuel espion. Mais il n'y avait personne, pas même un chat errant. Au fur à mesure qu'elle observait la ruelle, l'impression d'être suivie se dissipa. Elle haussa finalement les épaules, elle ne pouvait pas rester ici éternellement et reprit donc sa route, plus attentive qu'auparavant au moindre bruit suspect. Mais rien en se produisit et elle regagna sa planque aux premières lueurs du jour, sans incident notable.

Viconia se réveilla avec un atroce mal de tête et prise de suée alors que l'après-midi se finissait. Elle se tira hors de la paillasse et tâtonna dans la pénombre à la recherche de ses graines. Lorsqu'elle les trouva, elle en croqua une et se laissa retomber en somnolence le temps qu'elle fasse effet. C'était comme plonger dans un bain d'eau fraîche. Elle eut l'impression que l'air ambiant se rafraîchit soudain, ses doigts en devenaient un peu gourds. Elle était chargée celle-là. Elle se sentait déjà mieux et se redressa, pleinement réveillée. Le mal de tête la saisit de nouveau. Bien décidé à en venir à bout, elle avala une deuxième graine, et eut bientôt la satisfaction de sentir l'étau se desserrer. Par contre elle avait l'impression que le monde bougeait plus vite, elle entendait tous les sons plus distinctement, jusqu'à ses propres battements de cœur, les odeurs étaient plus fortes et les couleurs lui semblaient plus vives. Gênant au début, mais elle s'y habituait par la suite. Elle s'habilla à moitié titubante puis quitta sa piaule, décidant de ne pas se risquer tout de suite sur les toits.
L'air de la soirée lui parut étonnamment frais et elle referma sa veste sous le regard étonné d'un natif occupé à transporter quelques marchandises, lequel suait à grosses gouttes. Ne désirant pas attirer plus encore l'attention, elle se mit rapidement en route vers la demeure de Ferginson. Elle espérait bien l'y trouver et mener à bien sa mission. Elle avait encore largement le temps, mais elle n'aimait pas faire traîner les choses. Elle se contentait le plus souvent d'une reconnaissance avant d'intervenir. Seul les cas de forces majeurs lui faisaient retarder l'opération, ou lorsqu'une occasion particulièrement intéressante se présentait dans peu de temps -ç'avait par exemple été le cas pour l'héritier Skarn, la fête donnée pour son investiture était le moment rêvé et elle avait patienté un mois durant. Mais pour Ferginson elle n'avait connaissance d'aucune occasion particulière -dont on n'aurait pas manqué de l'avertir si Hock l'avait sut, et Hock savait tout- et n'avait donc aucune raison de retarder l'exécution.

Lorsqu'elle parvint au nouveau quartier bourgeois, alors que la nuit était déjà tombée, elle redoubla de prudence pour ne pas se faire repérer. Longeant les murs, elle se jetait dans l'ombre au premier signe d'un témoin gênant. Si la veille elle avait pus passer inaperçue, ce n'était plus le cas dans sa combinaison synthétique. Elle était parfaite pour se glisser dans l'ombre, mais difficile de ne pas identifier l'assassin en maraude si l'on venait à la surprendre. Mais tout se passa bien et elle parvint au pied du mur d'enceinte du manoir de Ferginson. Il était lisse, haut, et le rebord était probablement recouvert de tessons, de barbelés ou d'elle ne savait quel autre piège. Fort heureusement, il n'y avait aucun garde extérieur cette fois. Il lui fallait néanmoins attendre de récupérer ses pleins moyens, elle sentait encore ses membres ankylosés, et les sons et les couleurs agressaient encore ses sens. Elle se cacha donc de son mieux dans un local à déchets non loin et attendit, s'efforçant d'ignorer l'odeur qui lui agressait les narines.
Lorsqu'elle s'en sentit capable, elle quitta prudemment sa planque et s'approcha du mur. Elle se mit à tâtonner la paroi, aussi parfaits semblait la construction il y avait toujours des endroits où l'on pouvait prendre appui, un petit renfoncement entre deux briques, un vieil impact mal refermé... Elle en trouva finalement deux assez proches pour lui permettre l'escalade. Elle sauta pour atteindre le plus haut et s'y agripper d'une main. Avec expertise, elle glissa le pied opposé dans l'autre prise, se projeta de nouveau et glissa son deuxième pied dans la première prise et d'un dernier mouvement parvint à atteindre le rebord du mur du bout des doigts. Suspendue, elle se balança deux fois avant de réussir à glisser une jambe juste par-dessus le rebord du mur, sans risquer de toucher l'éventuel système de défense. Ainsi allongée, elle put apercevoir les fils barbelées qui était tendus à quelques centimètres de son visage et derrière eux le jardin bien entretenus du commissaire qui semblait pour l'heure vide de toute présence.
En prenant garde à ne pas faire chanter les fils tendus, elle se redressa doucement, ramenant l'une de ses jambes sous elle. Ce moment était de loin le plus délicat et nécessitait un équilibre expert, qu'elle avait passé des années à affûter. Juché sur une bande de quelques centimètres de large, elle entreprit de se glisser par-dessus les barbelés. Avec quelques contorsions, pour ne pas offrir une silhouette trop visible à un éventuel garde en vadrouille, elle parvint à passer de l'autre côté et se laissa souplement tomber sur l'herbe grasse. Elle jeta un coup d’œil derrière elle pour jauger de l'état du mur intérieur et fut surprise de constater qu'il était presque aussi lisse que l'extérieur. Mais les briques étaient laissées apparentes et les légers creux laissés par le mortier suffiraient à lui accorder une escalade facilité. Elle n'avait pas besoin de plus de quelques millimètres de profondeur pour s'assurer une prise stable. Les combinaisons adhérentes faisaient des miracles dans ce domaine.
Le jardin était parfaitement géométrique, de forme rectangulaire et orné de différentes haies qui avaient du nécessiter un fil à plomb pour être ainsi taillées. Des allées de graviers sillonnaient les étendues de pelouse et les quelques parterres de fleurs. Le tout offrait plus de couverts que Viconia n'aurait été en droit d'en espérer. Elle roula à couvert derrière une haie lorsqu'elle vit la silhouette d'un garde se dessiner devant la baie vitrée de la salle de réception. Il resta un moment immobile, avant de reprendre sa ronde qui l'éloigna de l'assassine. Celle-ci traversa le jardin, bondissant d'un couvert à l'autre, évitant le plus possible les allées qui crissaient sous ses pas et effectuant parfois de larges détours pour profiter au mieux de l'ombre projeté par les haies.

Alors qu'elle s'approchait du manoir même, elle pouvait repérer plus de gardes. L'un d'eux, sur un balcon, risquait de poser de graves problèmes lorsque viendrait le moment de franchir les dernier mètres. Deux patrouillaient entre les haies et ne posaient pas de difficultés majeures, et elle pouvait en apercevoir deux autres à travers les larges vitres du rez-de-chaussée. Elle allait s'élancer, profitant d'un trou dans la surveillance, pour atteindre le mur du manoir lorsqu'un subtil mouvement dans la pénombre la stoppa net. Avec un peu de persévérance, elle reconnut la silhouette d'un autre garde, immobile dans l'ombre, sans doute en train de satisfaire quelque besoin. Mais là où il était, il ne manquerait pas de repérer son ombre lorsqu'elle traverserait la dizaine de mètre à découvert devant elle. Elle attendit, espérant intensément qu'il se retournerait quelques secondes qu'elle pourrait mettre à profit. Ce qu'il fit, sans doute distrait par un bruit qu'elle n'entendit pas.
Elle ne perdit pas plus d'un dixième de seconde et bondit de son couvert sans un bruit, s'élançant vers le massif face à elle. Elle plongea dans une trouée qu'elle avait repéré, se réceptionna en roulade et s'arrêta accroupie dans l'ombre d'un pilier, caché derrière des fleurs bleues au parfum entêtant. Passa une minute d'immobilité totale, à peine troublé par sa respiration aussi lente et discrète que possible, tandis qu'elle jaugeait au son si son manège avait été repéré. Mais aucune alerte, ni aucun bruit de course, ne lui laissa à penser qu'elle avait échoué et elle recommença à se mouvoir avec lenteur. Il lui fallait désormais atteindre l'étage, où se situait probablement sa cible. Essayer de rentrer par le rez-de-chaussée était un suicide au vu du nombre de gardes.
Dans l'obscurité, elle fit glisser ses doigts le long du pilier à la recherche de prise. Il était finement sculpté et offrait donc un certain nombre d'appuis possible. La façade du manoir et le balcon au-dessus d'elle rendait l'endroit assez sombre pour ne pas risquer de se faire repérer. Une prise après l'autre, elle entama donc l'ascension. Il lui fallut quelques minutes pour atteindre le dessous du balcon. Commençait alors les difficultés. Tournant autour du pilier, elle vérifia qu'aucun des gardes ne regardait dans sa direction : l'un d'eux patrouillait les allées sans quitter le sol des yeux, un autre surveillait le mur d'enceinte et le reste était caché par l'angle de la bâtisse. Raffermissant la prise de ses jambes, elle tendit les bras vers le rebord du balcon et chercha une prise suffisamment solide. Lorsqu'elle l'eut trouvé, elle lâcha le pilier et profita de son corps en tant que balancier pour se hisser au niveau de la rambarde du balcon et se glisser sur celui-ci.

Elle s'autorisa un soupir de soulagement en constatant qu'il n'y avait pas de réactions. Désormais le plus dur était fait, elle était hors de vue de la plupart des veilleurs. Elle se glissa près de l'angle du mur, à quelques mètre d'elle, et glissa un œil de l'autre côté. Elle repéra bien vite l'homme qui était occupé à surveiller le jardin, négligemment appuyé sur la rambarde en train de fumer un cigare local. Elle sortit précautionneusement une dague de son étui. Il n'était pas question de laisser un gêneur pareil en vie. Elle attendit qu'il se remette à bouger, ce qu'il fit lorsque son cigare arriva au terme, l'écrasant contre le talon de sa botte avant de le ranger dans une de ses poches et de s'éloigner de la position de Viconia. Elle couvrit la distance qui les séparait en deux pas, glissa un bras sous sa cage thoracique et la comprimant brutalement pour chasser l'air tout en lui tranchant la gorge. Il ne laissa échapper qu'un dernier soupir qui s'envola dans l'air nocturne et lui tomba dans la bras. Il pesait son poids et elle l'allongea difficilement au sol, veillant à ne pas faire de bruit.
Elle venait d'allonger le corps lorsqu'une impression étrange lui fit brutalement tourné la tête sur sa gauche, vers la façade de l'aile opposée du manoir. A cet instant l'air claqua. Elle sentit bien plus qu'elle ne vit le projectile frôler son crâne, traversant l'espace où se tenait sa tête un instant plus tôt, pour aller s'enfoncer profondément dans le mur derrière elle. Un tel calibre indiquait sans aucun doute possible le fusil de sniper, réservé aux bons, si ce n'est très bon tireurs. Mais Viconia s'en fichait, tout ce qu'elle comprit c'est qu'elle était repéré. L'instinct prit le dessus et elle roula sur le côté, évitant les deux tirs suivants, puis se projeta en l'air à l'aide de ses mains. Deux balles se plantèrent dans le dallage, là où l'assassine se serait retrouvée si elle avait continuée sur sa lancée.
Viconia atterrit sur la rambarde et se laissa tomber en arrière, ne se retenant qu'avec ses jambes. Un bref coup d'oeil lui permit de repérer un garde en dessous d'elle, qui armait un fusil à pompe. Elle fut plus rapide, détendit ses jambes et se laissa tomber en tournant. Elle atterrit directement sur son ennemi, l’assommant sous le choc et se réceptionna debout. Il était inutile d'espérer accomplir la mission maintenant, les hommes de mains convergeaient vers elle. Elle aperçut brièvement un type en armure noire descendre du toit en rappel, sans doute le tireur qu'elle n'avait pas repéré et qui avait faillit mettre un terme à son existence, avant de se détourner et de courir vers le mur arrière. Des volées de balles la prirent pour cible mais le manque de lumière et les haies la rendaient difficile à viser et tous la rataient largement. Le plus proche était sans doute le type en armure, qui brandissait un pistolet à la taille impressionnante et qui, non content de ne la manquer que de quelques dizaines de centimètres en pleine course, gagnait du terrain sur elle. Elle sortit deux dagues de jet, se retourna dans un saut par-dessus une haie et les projeta toutes deux aussi précisément que possible. L'une atteignit l'un des gardes à la jambe, le coupant net dans son élan, l'autre s'enfonça dans la spallière de l'armure noire, sans même que son porteur ne semble s'en apercevoir. Ce type était donc armé, rapide et blindé.
Viconia glissa au sol et se releva aussi vite que possible avant de reprendre sa fuite en zigzag pour éviter les balles. Son poursuivant ne prenait pas autant de précautions et s'ils sautaient habilement les murets et les plus gros massifs, il pulvérisa plus d'une haie sur son passage. Le jardin allait avoir besoin de semaines entières pour se remettre de cette nuit. Viconia atteignit finalement le mur, réussit à agripper son sommet en un saut particulièrement impressionnant, prit appui de ses pieds sur sa surface et se propulsa en salto par-dessus les barbelées. Elle se réceptionna durement sur les pavés de la rue et grinça des dents en constant que sa main droite était couverte sang, une longue plaie en zébrait le dos. L'adrénaline ne lui laissait pas le loisir de ressentir la douleur, en revanche elle avait de nouveau l'impression que sa tête était prise dans un étau mais ce n'était pas le moment de croquer une graine. Elle entendit quelqu'un en train d'essayer d'ouvrir le portail du manoir et elle se remit à courir vers le centre de la ville, juste au moment où le rugissement d'un pistolet dans son dos indiquait que l'on avait finalement employé un passe-partout.

Elle se mit à courir le long de la rue. Une longue ligne droite, bien trop exposé. Elle vira sur le côté, prit appui sur une benne et sauta par-dessus un mur pas trop haut, alors que plusieurs balles traversaient les airs pour la manquer. Elle se réceptionna souplement dans un jardin, et un grognement devant elle lui fit baisser les yeux vers un molosse qui la fixait, les crocs suintant. Il se jeta à l'attaque et fut sèchement accueillis par un coup de pied retourné à la mâchoire qui l'envoya au sol tandis que Viconia filait à travers le jardin et s'élançait par-dessus le mur opposé. Dans son dos, un jappement suivit d'une détonation et du bruit de la chair transpercé. Ce type s'accrochait.
Elle atterrit cette fois dans la rue principale et fila aussi vite que possible. Une pluie fine commençait à tomber du ciel et mouillait les pavés. Elle espérait que cela ralentirait ses poursuivants tandis qu'elle bifurquait dans une ruelle sur sa droite et se rapprochait toujours un peu plus de la basse-ville. Dans son dédale, elle pourrait les semer sans trop de problèmes, ici il y avait bien trop de visibilité pour que cela marche. Mais sa tête lui faisait de plus en plus mal et elle fatiguait, elle n'avait jamais été particulièrement endurante. Inéluctablement, le claquement des semelles dans son dos se faisait plus proches. Il avait arrêté de tirer, sans qu'elle ne sache pourquoi. Ce qui l'arrangeait mais, d'une certaine manière, l'inquiétait. Elle continuait quand même à courir à travers des ruelles de plus en plus resserrées et labyrinthiques, espérant le perdre. Mais il s'accrochait et dès qu'elle pensait l'avoir semé, elle entendait de nouveau sa course derrière elle. Si elle voulait s'en débarrasser, il lui fallait un peu de temps.
Elle dérapa dans un cul-de-sac et se plaqua contre l'angle. Elle guettait son approche, tendue et attentive. Elle fit doucement glisser une dague hors de son étui et la serra dans son poing. Il arrivait, elle pouvait discerner le bruit de l'eau de pluie sous ses semelles désormais. Puis, une fraction de seconde avant qu'il ne passe l'angle, elle projeta son pied. Elle vint le frapper au poignet, avant même qu'il n'ai eu le temps de réagir, et fit s'envoler en l'air le flingue qu'il tenait dans son poing. Viconia tenta de conserver l'avantage et frappa au visage de son arme mais son adversaire dévia le coup avec son gantelet et dégaina à son tour une dague avant de frapper le visage de l'assassine qui évita le coup d'un saut en arrière, n'écopant que d'une blessure superficielle à la joue. Mais l'armure noire n'en resta pas là et feinta à gauche avant de tenter de l'atteindre au flanc. Elle ne se laissa pas avoir, se baissa pour éviter le coup et tenta d'enfoncer sa garde. Il bloqua la dague qui fonçait vers son estomac et frappa, du plat de son gantelet, l'assassine à la tempe. Celle-ci recula d'un pas, tournoya sur elle même et lui décocha un coup de pied magistral au visage, qui le fit reculer de quelques pas et le maintint sur la défensive pour une seconde attaque. Viconia essaya de se glisser sous la garde et d'atteindre l'aisselle de son adversaire, mais celui-ci comprit son intention et lui donna un coup de genou dans le sternum alors qu'elle s'apprêtait à essayer de passer. La native en perdit son souffle et fut contrainte de reculer de plusieurs mètres en évitant une tempête d'attaques déchaînée. Elle avait de plus en plus mal à la tête, et même s'il ne lui avait infligé aucune blessure sérieuse, elle encaissait moins que lui.
L'armure noire désirait en finir, le petit jeu n'avait que trop duré et il paralysait son adversaire sous un déluge de coups. Toutefois elle était aussi insaisissable qu'une anguille et chaque fois qu'il s'attendait à mordre sa chair, elle réussissait à éviter l'attaque au dernier moment. Il ne se contentait plus de son arme et enchaînait coup de poing, de pied, de genou et de coude. Sans résultat probant, mais il sentait qu'elle se faisait moins vive, moins souple et qu'il l'acculait petit à petit au mur, littéralement. Il ne fit qu'une petite erreur d'appréciation, sans doute par excès d'orgueil, et voulut la cueillir au creux des reins d'un coup de pied. Elle se laissa tomber au sol et glissa sur elle-même, venant le frapper à l'arrière de son genou. Il perdit l'équilibre et tomba contre une benne à laquelle il essaya de se rattraper. Mais le métal mouillée glissa sous sa main et il se retrouva étalé au sol. Sa proie se remit debout et entreprit d'escalader le mur derrière elle avec la rapidité qui la caractérisait. Kylar n'avait plus le temps, se remit à genou et, avisant son pistolet, se jeta dessus. Il attrapa l'arme du bout des doigts, se retourna et sans prendre le temps de viser vida les quatre dernières balles du chargeur sur l'assassine, qui passait le bord du toit. Si trois balles frappèrent les tuiles ou la maçonnerie, il lui sembla qu'une dernière la toucha, et pourtant elle n'en fut pas affecté le moins du monde et disparut à sa vue. Sachant qu'il n'avait aucune chance de la rattraper sur les toits, il abandonna la poursuite et se releva douloureusement. Elle se battait mieux qu'il ne l'avait pensé et il fit jouer ses articulations, mise à mal par la course-poursuite. Ce faisant, un petit reflet attira son attention et il se pencha pour récupérer l'une de ses balles. Elle semblait aplatis, comme si elle avait percuté un blindage et rebondit dessus. Il jeta un dernier regard au sommet du toit, et serra la balle dans son poing. Elle n'allait pas aimer son échec. Il se détourna et se remit doucement en marche pour le manoir de Ferginson, sous une pluie désormais battante.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeLun 11 Nov 2013 - 9:41

Très bonne scène d'infiltration/action je trouve, très agréable à lire et un peu de mystère en fin de chapitre afin de donner envie d'en savoir plus... ben c'est réussi, j'attends la suite!
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 16 Nov 2013 - 23:14

Chapitre XII :

Viconia titubait sur les toits de la cité. Trempée par la pluie et le crane plus douloureux que jamais, elle avançait doucement, les pieds mal assurés sur les tuiles glissantes et les rebords étroits. Elle ne s'était que rarement sentie aussi faible. La descente de la drogue se faisait sentir plus rapidement qu'à l'accoutumée. Elle décida de s'asseoir un instant contre une cheminée, essayant de récupérer un peu ses esprits. Elle avait de la chance que l'autre ai abandonné la poursuite, il n'aurait eu qu'à la cueillir. C'était qui d'ailleurs ce type ? Certainement pas un des policiers que Ferginson débauchait d'habitude, il ridiculisait les forces de l'ordre tant en entraînement qu'en équipement. Il la ridiculisait aussi, elle l'avait sentie, elle ne s'en était débarrassé que parce qu'il avait fait une erreur. S'ils se recroisaient, elle n'aurait probablement pas autant de chance. Elle allait devoir redoubler de vigilance.
Elle sentit de nouveau une présence, comme la veille alors qu'elle parcourait les ruelles. Trop fatiguée, elle releva péniblement la tête et scruta les alentours. Il était difficile d'apercevoir quelque chose au milieu du rideau de pluie qui s'abattait devant elle, mais il n'y avait même pas l'ombre d'une silhouette. Bien sûr ça ne manquait pas d'endroits où se cacher, entre les divers cheminées et les combes abandonnées. S'appuyant sur les briques dans son dos, elle se releva doucement et se remit en route, elle avait encore mal au crane mais au moins sa vision était-elle redevenue nette. Il lui fallut plus d'une heure pour regagner sa planque, ralentie tant par son allure que par son impossibilité à sauter les ruelles ou à se livrer à ses acrobaties habituelles. Lorsqu'elle pénétra sa vieille mansarde, elle se débarrassa de ses habits trempées et se laissa tomber sur la paillasse, avant de sombrer dans un sommeil profond et sans rêves.

Elle fut réveillée par une série de coup bref à la porte. Elle s'extirpa de son sommeil et se mit péniblement debout, le corps courbaturé par ses exploits de la veille. Elle avait encore une migraine résiduelle mais le plus gros était passé. Par contre ses articulations lui semblaient raides et douloureuses. Elle boita presque jusqu'à la porte et l'ouvrit sur le visage amical du propriétaire de l'immeuble, lequel tenait une lettre.

« Oh je n'en espérais pas tant. » laissa échapper le vieil homme dans un gloussement.

Viconia baissa la tête et se rappela qu'elle était totalement nue. Elle fixa l'autre d'un regard mauvais, lui arracha le papier de la main et referma brusquement la porte. Des salutations étouffées lui parvinrent de l'autre côté, puis elle entendit des pas lents descendre difficilement l'escalier abrupt. Elle déplia le papier et s'approcha de l'unique fenêtre pour mieux le lire. Seuls quelques mots s'étalaient sur le papier, de cette habituelle écriture autoritaire : ''Venez au manoir. Immédiatement.'' Elle haussa un sourcil, se demandant ce qui se passait pour qu'on la convoque. C'était un phénomène rare que Hock souhaite s'entretenir directement avec elle. D'habitude il se contentait des lettres, parfois de Dan lorsque cela nécessitait une réponse. Mais s'il prenait le risque de la convoquer, mieux valait ne pas le faire attendre. Elle s'habilla donc en vitesse et très simplement avant de quitter sa mansarde, de descendre l'escalier en contournant au passage le propriétaire puis de sortir dans la rue et de prendre la direction du manoir de Hock.

Elle se présenta comme la dernière fois à la porte arrière. Le majordome l'y attendait déjà et lui fit signe de le suivre. Il avait l'air plus perplexe que contrarié, ce qui n'était pas l'habitude. Visiblement, l'attitude de Hock le surprenait sans doute autant qu'elle ne surprenait Viconia. Ils ne s'attardèrent pas au rez-de-chaussée et montèrent rapidement à l'étage où se situait le bureau du patron. Ils s'engagèrent dans le couloir qui y menait, mais alors qu'elle s'attendait à entrer dedans, le majordome s'arrêta devant la porte d'un salon secondaire et fit signe à Viconia d'entrer. Elle hésita un instant avant de s'exécuter. La pièce était assez vide, seuls quelques fauteuils et une table basse en occupait le centre, les murs étaient recouverts de bibliothèques. Et dans l'un des fauteuils, un homme chauve à l'âge incertain vêtus d'un long manteau noir aux boutons d'or attendait. En la voyant arriver il la salua d'un signe de tête avant de lui désigner un fauteuil ou s'asseoir. Le geste était autoritaire mais poli et relativement respectueux. Elle ne distinguait pas l'habituel mépris affiché vis à vis de son ethnie, de ses yeux. Ce qui aurait dus la mettre à l'aise la rendit suspicieuse, mais elle obéit et s'assit dans le fauteuil. L'homme se pencha un peu en avant et l'observa attentivement, la détaillant de ses yeux bleus. Ils restèrent tout deux silencieux un certain temps, puis il se décida à entamer la conversation. Lorsqu'il parla, sa voix était douce, légèrement condescendante, comme s'il s'adressait à un enfant, ou plutôt un adolescent susceptible.

« Viconia, c'est bien ça ? » Elle hocha la tête : « Bien, j'ai quelques questions à te poser, et avant que tu ne le demandes, ton maître est au courant et a autorisé cet entretien.
-Qu'est-ce qui me le prouve ? » demanda-t-elle, suspicieuse et sachant trop bien ce qu'elle risquait si elle révélait une information confidentielle.
« Moi. »

Elle se retourna pour voir Hock dans l'encadrement de la porte. Il semblait un peu contrarié, mais pas vis-à-vis d'elle, son regard se portait bien plus sur l'autre homme. Il fixa finalement Viconia et s'adressa à elle avec son ton autoritaire qui ne souffrait pas de discussions.

« Réponds à toutes ses questions, ne cache rien.
-Oui, maître. » Interrogation du regard, qui n'échappa pas à l'autre homme et bref assentiment de la part de Hock, qui repartit en fermant la porte.
« Bien, » reprit le chauve : « Raconte moi tout ce qui s'est passé dans les quartiers des Natifs lorsque ton maître t'as demandé de tuer un certain Konrad. »

Elle obéit sans trop rechigner et se mit à lui raconter tout ce qui s'était passé, de son arrivée chez Dan à son évasion du bâtiment. Elle n'occulta aucun détail, hésitant parfois, mais il semblait le percevoir et la pressait à la confidence de quelques questions qui faisaient étonnamment mouche. Elle réussit à ne pas pleurer à certains souvenirs, même lorsqu'elle revit le visage de la fillette contre le plancher, et serra les dents à l'évocation de certains autres. Lorsqu'il eut finis, le chauve lui posa d'autres questions, apparemment sans rapport, sur différents aspects de sa vie, de ce qu'elle avait accomplis pour Hock, de ses missions... Il remarqua la plaie de la veille, bien qu'elle ait déjà cicatrisé en bonne partie, et l'interrogea sur ce qui s'était passé chez Ferginson. Elle lui parla du guerrier à l'armure, ce qui le plongea dans l'interrogation. Il eut quelques autres questions, puis se plongea dans le mutisme. Viconia était mal à l'aise, elle avait l'impression d'être jugée. Mais on ne lui faisait pas signe de quitter les lieux, alors elle resta à sa place. Finalement l'homme se leva, lui dit d'attendre et rejoignit le bureau de Hock.
Lazares y trouva ce dernier assis derrière son bureau, visiblement impatient d'entendre ce qu'il avait à lui dire.

« Elle dit la vérité.
-Comment est-ce possible?Ce bâtiment n'existe pas, vos propres hommes l'ont constater de visu !
-Je me suis mal exprimer. Elle dit sa vérité. » Hock sembla abasourdis un moment :
« Comment ça ?
-Elle a été mentalement affectée par les récents événements et...
-Elle tue depuis qu'elle a douze ans.
-Il est tout à fait possible qu'elle ait été abusée, qu'elle ai inventé certaines informations, l'esprit humain...
-C'est une esclave.
-Est très malléable, le cerveau n'en fait parfois qu'à sa tête. » Il y eut un instant de silence tandis que chacun observait l'autre : « Enfin, vous avez vous même fait remarqué que la moitié des habitants de cette ville connaissait votre nom et vos usines, ça pourrait être n'importe lequel de vos contremaîtres.
-Elle a dit que ce n'était pas un natif.
-On ne reconnaît à coup sûr un natif qu'à la couleur de ses yeux. C'est tellement facile de se tromper que même certains des vôtres le font parfois.
-Et l'adresse ? Elle l'a rêvée ?
-Elle s'est échappée en pleine nuit, vu ce à quoi ressemblent les Taudis, qui s'étonnerait qu'elle se soit trompée ? Admettez-le, il n'y a probablement aucun impérial occupé à vous poignarder dans le dos à coup de grèves. Vous feriez mieux de vous concentrer sur ce qui nous occupe vraiment, à savoir l'héritage des Skarn.
-Mais l'insistance de Ferginson sur ces grèves...
-Ferginson est un opportuniste qui se jette sur chaque occasion comme un charognard sur une proie tout juste morte. Continuez de le tenir à l'écart et il ne pourra rien faire. Si ça peut vous rassurer, je vais mettre des hommes à moi à sa surveillance.
-Viconia doit s'en occuper.
-Elle s'est faites repérer, je vous conseille de lui retirer l'affaire.
-Vous pensez qu'elle a été identifié ?
-D'après ce qu'elle m'a raconté, je serais surpris, mais elle semble être tombé sur un os.
-Comment ça ?
-Un homme de main, d'un entraînement supérieur au sien et d'un équipement lourd à priori.
-Comment ce commissaire a-t-il pus s'attirer un tel service ?
-C'est bien pour y répondre que je mets mes hommes sur le coup. D'après la description, je ne serais pas étonné que nous ayons à faire à un hors monde. Si c'est bien le cas, il nous faut découvrir rapidement les intérêts derrière lui, sous peine de nous faire piéger.
-Bon, très bien, occupez-vous de ça, je m'occupe de l'héritage. D'ailleurs, Ferginson a organisé une soirée voilà deux jours, devinez qui y a été vus ? »
Lazares haussa un sourcil et Hock répondit :
« Le baron Cairn.
-C'est le cousin de la famille Skarn non ?
-Oui, le plus sérieux prétendant à l'héritage.
-Vous pensez qu'ils ont une alliance ?
-C'est encore un peu tôt pour le dire. Mais puisque vous comptez faire enquêter vos hommes sur le commissaire, j'apprécierais que vous me teniez au courant de leur avancée. Si vraiment il cherche à rentrer dans les bonnes grâces de Cairn et à s'emparer d'une partie de l'héritage, nous ne devons pas perdre de temps pour nous en débarrasser.
-Vous comptez toujours le faire assassiner ?
-Je laisse ça en suspens pour le moment. Mais s'il devait s'avérer qu'il menace directement nos principaux intérêts... N'oubliez pas tout ce que l'Imperium pourrait tirer du contrôle des industries Skarn.
-Aucun risque, on me le rappelle bien assez. Le sous-secteur semble s'effondrer sur lui-même, à se demander comment il tenait auparavant. Si on perd cette planète, on se dirige droit vers de sérieuses pertes.
-Alors faisons en sorte que ça n'arrive pas. »

Viconia suait, mais ce n'était pas la drogue pour une fois. Elle était appuyé contre la porte de bois, l'oreille collé à la cloison et guettait la conversation qui se tenait de l'autre côté. Elle grinça des dents en comprenant que les fameux hommes de Hock, ou plutôt de ce mystérieux inconnu, n'avait pas réussit à mettre la main sur ce fameux guide. Mais elle était sûr de son fait, elle avait toujours l'esprit clair, même dans les pires situations elle ne commettait pas d'erreur aussi grossière. Elle était sûre que celui qu'elle avait vus n'était pas un Natif, et elle était sûre de l'adresse. Il y avait forcément une autre explication.
Néanmoins, pour le moment elle avait du mal à réfléchir, concentrée sur ce qu'elle faisait et obsédée par l'idée qu'elle était en train d'espionner Hock. Tant qu'elle faillit ne pas entendre les pas qui se dirigeaient vers la porte. Avec lenteur et fluidité pour ne pas provoquer un grincement malvenue, elle se décolla de la surface du bois et se replia dans le salon où on l'avait laissé, reprenant sa place dans le fauteuil. Elle se composa un visage aussi neutre que possible en voyant arriver Hock. Il ne lui accorda pas plus d'attention qu'à son habitude, ce qui en l’occurrence la soulageait plus qu'autre chose. Il prit un instant pour peser ses mots et réfléchir à sa situation.

« Mission annulée. Laisse Ferginson tranquille, fais-toi oublier pour le moment. Attends toi à de nouveaux ordres dans les prochains jours. Et la prochaine fois que ta mission est un échec, préviens moi d'abord.
-Mais c'est vous... »

Il n'écoutait déjà plus et rentrait de nouveau dans son bureau. Viconia sentit le ressentiment, nouveau chez elle, grandir un peu plus mais se calma rapidement en se disant que visiblement Hock était énervé et qu'il se calmait sur ce qu'il pouvait. Ses nouveaux ordres étaient clairs, elle se releva donc et quitta le manoir par le passage des domestiques, avant de descendre pensivement dans les quartiers plus populaires. Elle se demandait encore ce que pouvait bien vouloir dire la disparition de cet immeuble. Elle fouillait sa mémoire à la recherche du moindre détail, mais bien souvent son esprit s'égara sur les traitements qu'elle avait subis cette nuit-là et elle s’arrêta soudainement, manquant par deux fois de percuter un esclave pressé. Il y avait là quelque chose qui lui échappait, qui échappait à tout le monde, et un sentiment de revanche en elle la poussait à ne pas abandonner. Tout à ses réflexions, elle était parvenus en bas de son immeuble. Elle jeta un coup d’œil à la porte et l'escalier qui était derrière. Elle pouvait bien sûr monter les marches, s'effondrer dans sa paillasse et passer les prochaines journées dans un brouillard de drogué quasi permanent, elle avait tout ce qu'il fallait pour ça. Mais elle reprit son chemin, descendant d'un pas décidé vers les Taudis.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeDim 17 Nov 2013 - 22:01

Sweet as usual ^^
Une partie de moi a envie de tenter de relire le passage dans les taudis à la recherche de petits indices mais j'ai un peu la flemme pour ce soir, à voir pour plus tard!
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeLun 2 Déc 2013 - 21:00

Il aura été un peu long à venir, j'en suis désolé.

Chapitre XIII :

Viconia traversait les taudis sans perdre de temps. Ce qu'elle faisait était une folie, elle n'était même pas passé chez Dan pour échanger son anneau d'argent contre un anneau de fer. Elle ne craignait personne du quartier en combat singulier, mais ce n'était pas vraiment le style local. Et puis même si elle ne doutait pas vraiment pouvoir leur échapper, cela l'obligerait à se cacher et à fuir. Aussi se contentait-elle de faire aussi vite que possible, pour éviter d'attirer l'attention ou de laisser les temps aux passants de se concentrer sur elle. Elle avait rabattu ses cheveux de son mieux sur son oreille, mais c'était une protection bien sommaire et mise à mal par le moindre coup de vent. Elle évitait également les groupes trop importants, une attitude normale pour une femme seule dans le quartier cela dit. Mais elle ne perdait pas pour autant son sens de l'observation et elle remarqua un nombre extrêmement élevé, pour les habitudes, d'appareils de surveillance aérienne. Ferginson peut-être, mais il était étonnant que le commissaire ait autant de ressources. Un autre ponte de la police peut-être, mais en ce cas, pourquoi. Il n'y avait pas grand monde pour s’intéresser aux soubresauts des natifs. Elle n'était certes pas éduqué, mais pas complètement idiote non plus, et son boulot lui avait permis de comprendre que bien peu avaient le sens du devoir dans cette ville.

Finalement, au terme d'un trajet stressant, elle parvint à proximité de l'endroit où elle avait été retenus. Enfin, d'après les bâtiments, dont elle reconnaissait les formes, les couleurs sales, les étages de bric et de broc en construction, elle était même exactement au bon endroit. Se plaçant au pied d'un bloc de cinq étages qui semblait s'affaisser vers l'avant, elle l'observa un moment puis, lorsqu'elle fut sûre et certaine que c'était du haut de celui-ci qu'elle avait repéré le repaire de sa proie, elle se retourna. Mais, de trace du bâtiment, il n'y avait rien. Elle reconnaissait, elle en était certaines, les deux bâtiments qui étaient ses voisins, mais ils étaient cette fois collés. Et lui semblaient étrangement étirés. Plus elle observait, plus sa vision lui semblait flou, comme en train de se déchirer en son centre. Elle cligna plusieurs fois des yeux et l'effet disparus un moment, pour reparaître encore plus impressionnant quelques secondes plus tard. Et rien n'y faisait, plus elle se concentrait, plus la réalité en face d'elle semblait se distordre. C'était comme si quelque chose souhaitait éclater au grand jour. Elle en avait confusément l'impression. Cela continua d'empirer, attirant de plus en plus son attention, jusqu'à ce que, finalement, l'image se déchire bel et bien devant ses yeux. Le phénomène n'avait rien d'agréable, elle n'arrivait pas à comprendre  ce qu'elle voyait, l'espace d'un bref instant tout se mélangea dans un kaléidoscope de couleurs vives, agressives et anarchiques. Elle secoua la tête, cligna des paupières et réussit à récupérer une vision normale.
Sauf que... désormais le bâtiment était là. Elle le voyait aussi clairement que n'importe quel autre désormais, logé entre les deux bâtisses légèrement plus imposante. Elle avait encore l'impression que ses bords étaient flous, comme mangé par les façades voisines, mais en dehors de cela il n'y avait rien d'anormal. Sa façade en bois, telle qu'elle s'en rappelait, le même nombre de fenêtre, elle put même reconnaître celle par laquelle elle avait plongée dans l'eau... Au détail près que le bâtiment semblait ne pas exister la seconde précédente, tout était parfaitement normal. Un instant elle crut qu'elle était définitivement folle, que les graines lui avaient fait frire le cerveau et qu'elle n'était plus bonne qu'à avoir des hallucinations. Puis elle remarqua qu'elle était en sueur, qu'elle avait mal à la tête et que ses articulations étaient plus sensibles. Elle était en manque. Et pourtant un petit quelque chose lui disait qu'elle arriverait à la supporter encore un peu. Elle rangea donc le sachet, qu'elle avait sortis sans y penser, et traversa ce qui tenait lieu de rue à l'aide d'une planche branlante jetée au-dessus de l'eau, puis s'approcha de la porte, fasciné qu'elle était par cette apparition. Il lui fallut sentir le bois contre sa paume, puis la poignée de métal tourner dans sa main, pour réussir à focaliser son esprit sur le fait que tout ceci était bien réel. Alors, doucement, glissant une dague dans son autre main, elle fit pivoter le battant et entra à l'intérieur.

Elle se retrouva dans la grande pièce dont le seul ameublement consistait en plusieurs chaises et quelques tables, qu'elle avait déjà identifié comme celle où se retrouvait le groupe d'esclaves dissidents. Seule changement, deux types étaient assis non loin d'elle et s'agitèrent soudainement en la voyant débarquer. Ils ne furent pas hostiles dans un premier temps, après tout elle était une esclave comme eux, et elle en profita pour s'avancer, sans menace et son arme soigneusement camouflée. Elle les examina. L'un était un solide gaillard, encore assez jeune et au regard un peu naïf. L'autre avait atteint ce qui pouvait s'apparenter à la vieillesse dans les taudis, des muscles noueux et un corps usé par les années de travail intensif, il avait encore le regard éveillé, farouche, et lui rendait son regard inquisiteur.
Il suffit d'un courant d'air pour faire claquer la porte et voler sa mèche, révélant l'anneau d'argent. Le plus jeune des deux ne remarqua pas ce détail mais l'autre comprit et, avec une vivacité étonnante pour un homme comme lui, se jeta sur elle. Mais la rapidité seule ne suffit et elle se dégagea souplement de son chemin, venant le frapper à l'abdomen d'un coup de pied. Emporté par sa chute, il s'effondra en roulé boulé, le souffle coupé et en train de vomir son dernier repas sous la violence du coup. Cette fois, le plus costaud avait compris mais, plutôt que de chercher à l'attaquer, il voulut sans doute aller prévenir les autres résidents. Elle ne lui en laissa pas le temps. Il était gênée par les nombreuses chaises, tandis qu'elle bondit de l'une à l'autre avec souplesse. Elle le rattrapa en quelques enjambées et elle se jeta sur lui, frappa de ses genoux juste entre les épaules et lui attrapa un bras qu'elle tordit douloureusement. Il s'écrasa face contre terre, l'assassine sur son dos et maintenant la pression de ses jambes pour l'empêcher de remuer. Lorsque l'on savait où appuyer, on n'avait pas besoin de force ni de masse. La dague qui se posa sur le cou de taureau acheva de convaincre son prisonnier que toute résistance était futile. Elle posa ses questions d'une voix sèche qui ne se laissait pas discuter :

« Votre guide est là ? »

Pas de réponse autre qu'un grognement étouffé. Elle appuya un peu plus de ses genoux, lui arrachant un gémissement de douleur.

« Réponds. Ou tu ne me sers à rien. » La dague se fit un peu plus menaçante.
« Il est là-haut, comme d'habitude. Il bouge jamais.
-Je croyais que vous changiez tout le temps de bâtiment ?
-Non ! Enfin, je suis pas sûr... »

Elle repensa à l'étrange phénomène auquel elle avait assisté dans la rue. Elle était réellement passé devant sans voir le bâtiment. Ou avait-il seulement été là ? C'était des plus difficile à dire. S'il était réellement là ,il y aurait forcément des gens pour entrer dedans, même par erreur, non ? Les réponses se trouveraient peut-être à l'étage.

« Y a d'autres gars ici ?
-Non, en journée on se contente d'être deux au cas où. On se regroupe juste le soir.
-Pourquoi y a autant de chambres alors ?
-Parfois on en accueille. Ou on en aide à échapper aux contremaîtres. Ils nous trouvent jamais ici. Je sais même pas comment vous êtes entrée. »

Viconia non plus en fait. Elle avait pénétré un bâtiment qui quelques secondes auparavant n'existait pas pour elle. C'était assez difficile à comprendre. Mais elle avait depuis longtemps appris à ne pas chercher à comprendre ce qui la dépassait. On avait fait d'elle un instrument aiguisé et autonome, mais un instrument. On ne voulait pas qu'elle réfléchisse, ou qu'elle comprenne ce qu'elle faisait réellement. Cela aurait été beaucoup trop dangereux. Elle décida qu'elle en savait assez et, retirant sa dague de la gorge de l'homme, elle le frappa à la nuque suffisamment violemment pour le mettre dans les vapes sans chercher pour autant à le tuer ou même à le blesser. Elle se releva et lança un regard à l'autre, qui peinait à se relever en s'aidant d'une chaise et jugea qu'il ne représentait pas une grande menace. Elle finit donc de traverser la pièce pour atteindre l'escalier et entamer l'ascension prudente des étages. L'autre n'avait pas mentis, le bâtiment semblait vide. Elle resta tout de même aux aguets tandis qu'elle montait les escaliers. Le bois pourri d'humidité grinçait et craquait autour d'elle, mais elle guettait les signes d'activité à l'étage. Finalement, elle posa le pies sur le dernier palier et s'approcha de la porte derrière laquelle, elle le savait, se trouvait ce fameux guide. Elle posa la main contre le bois et resta un instant pensive, à l'écoute de ce qui l'attendait. Elle ne perçut rien et poussa doucement la porte.
Celle-ci pivota dans un silence surnaturel, révélant une pièce dénuée d'ornements comme toutes les autres. Quelques meubles la désignaient comme un logement, ou au moins une chambre. Elle n'eut pas vraiment le temps de détailler, puisqu'elle fut irrémédiablement attirée par la silhouette qui se trouvait assise en face d'elle, accoudée à une table autour de laquelle était installée une deuxième chaise, vide. Elle n'arrivait pas vraiment à la détailler, même son visage, pourtant découvert, lui apparaissait comme étrangement flou. C'était probablement le Guide, il n'y avait guère à en douter. Elle était venue ici avec deux buts en tête : lui refaire le portrait et le ramener à Hock pour prouver ses dires. Désormais, tous deux lui paraissaient dénués d'intérêts et elle se sentait engourdie. Cela aurait pus être normal, mais elle n'avait pas touché à une graine depuis plusieurs heures. Elle suivit presque par automatisme le geste qui l'invitait à s'asseoir et s'exécuta. Elle essayait de se concentrer sur son visage, il tremblotait comme dans un rêve. Et ses yeux étaient vairons, avec un doré. Quelque chose ne collait pas. L’œil doré, il clignotait. Marron, doré, marron, doré... Il éleva la voix pour capter son attention sur ses paroles. Elle n'avait même pas remarqué qu'il s'était mis à parler. Il avait une voix charmante, douce et autoritaire à la fois. Il la questionna, à plusieurs reprises, et elle lui répondit sans mentir. L'idée semblait absurde. Lorsqu'il eut finis, il eut un sourire satisfait et la remercia. Elle sentit qu'on s'approchait derrière elle. Puis le guide claque des doigts et elle tomba à la renverse comme dans un trou noir.

La première sensation qui lui revint fut celle du bois humide contre sa joue et de la mousse qui le recouvrait. Ensuite, l'odeur caractéristique des taudis. Mais au moins avait-elle le goût de la liberté. En ouvrant les yeux, elle confirma ses premières impressions : elle était allongé sur l'un des pontons en plein cœur des taudis. Et elle avait un mal de crâne particulièrement atroce. Elle se redressa en position assisse tout en se massant les tempes et en essayant d'organiser ses pensées. Elle n'y arrivait pas. Elle se souvenait vaguement du bâtiment qui apparaissait, d'entrer à l'intérieur puis tout s'effondrait, s'effaçait. Plus elle s'accrochait aux souvenirs, plus ils lui échappaient, comme un rêve au réveil qui vous abandonne. Elle regarda les façades en face d'elle. C'était les même bâtiment dont elle avait le souvenir, sauf que cette fois-ci il n'y avait rien entre eux, pas de façade en bois dont elle avait sauté d'un fenêtre. Et elle eut beau se concentrer autant qu'elle voulait, rien ne changeait. Elle avait du s'évanouir ou halluciné, c'était la seule explication qui lui semblait logique. Ses doigts tâtonnèrent instinctivement ses poches jusqu'à trouver le sachet bienvenue et à en extraire l'une des graines. Elle ne suffit pas à calmer entièrement son mal de tête, mais elle n'avait pas envie de finir à moitié paralysée en plein  milieu des taudis. Elle se releva rapidement, examina une dernière fois les alentours et remarqua que le soleil avait déjà bien entamé sa pente décroissante dans le ciel. Il était temps de mettre fin aux recherches. Il lui vint à l'esprit qu'il n'était probablement pas une bonne idée de parler de son initiative à qui que ce soit, idée qu'elle approuva intérieurement. Elle prit donc la direction de sa planque, d'un pas pressé pour essayer d'éviter les ennuis. Et depuis une fenêtre qu'elle ne pouvait voir, un regard sombre la suivit, méditatif.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeMar 10 Déc 2013 - 21:25

Chapitre XIV :

Eric essayait vainement de se réchauffer les doigts en soufflant dessus. Il ne parvenait pas à comprendre comment ce maudit monde pouvait avoir des matins si froids et des soirées si chaudes. On lui avait bien parlé de problèmes d'atmosphère, mais il n'y avait pas prêté une oreille suffisamment attentive. Il était trop occuper à pester intérieurement contre cette nouvelle affectation. Quel trou paumé. Et ils n'étaient là que pour aider un magnat local à s'emparer d'encore plus de pouvoir et s'assurer de sa fidélité. Qu'on envoie la Garde et la question serait réglé quant à la fidélité. Mais il n'y avait pas de régiment à disposition, avait-on dit. Eux, ils l'étaient.

« Mon cul ! » grogna-t-il pour lui-même.

Ils étaient en planque depuis le matin et n'avaient rien appris de vraiment intéressant. Ferginson semblait à priori tout à fait normal. Les serviteurs allaient et venaient, les gardes patrouillaient, parfois un rendez-vous arrivait et repartait, tout cela sans incidents notables. Et l'un de ses collègues mitraillaient tout ça l'air de rien. Le plus dur était de rester discret dans ce genre de quartiers nobles. Ils bougeaient sans cesse, répartis en trois équipes, donnaient des livraisons factices et profitaient de la surprise du garde pour effectuer leur travail. D'autres avaient piqué un aéronef de surveillance de la milice local et imitait les patrouilles habituelles. Un troisième groupe était déguisé en personnel d'entretien et allait et venait au hasard, effectuant le moindre boulot qu'ils trouvaient. Le plus important c'était la coordination. Le manoir ne devait pas rester un seul instant sans surveillance.
Eric jeta un coup d'oeil las à Karl en train de s'engueuler à moitié avec un garde. Ils avaient encore une dizaine de minutes à tenir avant que la patrouille aérienne ne repasse. Puis il se perdit dans la contemplation du rétroviseur. Mais qu'est-ce que le troisième foutait à la fin ? il avait une chiasse ou bien ? Il fit discrètement signe à Karl, qui enguirlandait le garde, qu'il bougeait et descendit de leur faux camion de livraison avant d'en faire le tour. Bon, voyons, où était passé ce chieur. Il était allé dans la petite impasse juste derrière. Au vu de l'odeur qui en émanait tandis qu'il approchait, l'endroit devait servir régulièrement à ce genre de soulagement. Il tourna l'angle et s'adressa machinalement à ce qu'il pensait y trouver :

« Putain, mec tu fous quoi enc... oh merde ! »

Son pote était plaqué contre le mur, maintenus par un type combinaison noir qui lui plantait une lame entre deux côtes tout en lui broyant la gorge pour l'empêcher de crier. L'assassin fut le premier à réagir, relâchant brusquement le cadavre pour dégainer un pistolet de joli calibre et de faire feu à trois reprises sur Eric. Lequel eut un mal de chien lorsque les balles frappèrent sa protection. Elles n'avaient pas perforé mais c'était pas agréable pour autant. Le plus surpris fut sans doute le tueur lorsqu'il constat que sa victime ne s'effondrait pas. Un laps de temps suffisant à Eric pour dégainer sa propre arme et faire feu. Le projectile à pointe creuse, conçue pour être utilisé contre les émeutiers plutôt que contre les combattants, frappa le type au torse et le projeta en arrière. La détonation résonna à travers toute la rue.
Près du camion, le garde braqua soudain son arme mais un coup de poing à la gorge de Karl le prit par surprise et il s'effondra mollement contre le portail qu'il gardait. Le faux livreur ouvrit précipitamment sa portière et en sortit un fusil à pompe avant de se ruer vers l'endroit d'où venait le tir. Il y arriva juste au moment où un type en noir en sortit. Il n'eut que le temps de lever son arme pour contrer un coup de couteau qui lui aurait ouvert la gorge avant qu'un coup de genou ne l'envoie au sol, plié en deux. Le type ne s'arrêta même pas et s'élança en direction du portail de Ferginson, disparaissant quasiment à la vue tandis que la caméléonine de sa tenue s'activait. Eric sortit à son tour de la ruelle, le nez en sang après reçus un méchant coup visiblement, et vida le reste de son chargeur dans la direction qu'avait pris leur ennemi, sans parvenir à le toucher visiblement.
Désormais les gardes des alentours s'agitaient. Ils n'allaient pas tarder à sortir pour voir ce qui se passait, pour l'instant la prudence leur intimait de ne pas s'en mêler tant qu'ils n'étaient pas concernés directement.

« Mais c'était qui ce type ? » Demanda Karl.
« Sans doute celui dont on nous a parlé. Il est doué, le connard. On se tire en tout cas, aide-moi à transporter Raul.
-Il est mort, aucune chance de le sauver.
-Je sais. Mais j'ai pas envie que les flics aient le loisir de l'autopsier.
-Oh putain oui. »

Ils empoignèrent le cadavre de leur ex-collègue et le déposèrent à l'arrière du camion avant de remonter dans celui-ci et de démarrer en trombe pour reprendre la voie des vrais axes de circulation. Pendant que Karl conduisait, Eric cogitait. Le type avait été aussi surpris qu'eux, il ne s'attendait donc pas à les voir ici. S'il ne s'y attendait pas, il pouvait prendre peur, ou au moins s'inquiéter. Et ce type n'était pas une tête pensante, plutôt le genre homme de main. S'il était là, c'est sans doute qu'une tête s'y trouvait. Et les têtes n'aimaient pas traîner là où on trouvait des espions indiscrets. Elle allait probablement bouger. Il se retourna sur son siège et empoigna l'une des jumelles d'observation qu'ils avaient amenés ainsi qu'un flingue plus approprié au cas où il croisait de nouveau celui qui lui avait détruit le nez.

« Qu'est-ce que tu fais ?
-Dis aux autres patrouilles d'arrêter de surveiller le secteur après leur prochain passage, je vous retrouve au quartier général.
-Hein ? Mais où tu vas ?! »

Sans répondre, Eric ouvrit soudainement sa porte tandis que le véhicule passait devant une ruelle d'esclave et se jeta en dehors. Karl eut le bon réflexe de refermer la porte derrière lui d'un coup de volant et le fourgon continua sa route sans avoir à aucun moment trahit ce petit incident. Eric se redressa, perclus de douleur. Il vérifia que les jumelles n'avaient pas manger un mauvais coup puis rassuré s'approcha du mur d'enceinte d'un des manoir qui l'entouraient, le plus proche de celui de Ferginson. S'aidant d'une benne à ordures, il entreprit de l'escalader et de se laisser tomber lourdement au milieu des massifs de fleurs. Pas de garde en vue pour le moment, il entrepris de contourner le bâtiment, somme toute modeste et si géométrique que c'en était inquiétant. Alors qu'il tournait un angle il croisa le type sans doute chargé de surveiller le lieux et ne lui laissa pas le temps de réagir avant de le frapper à la tempe de son arme, ce qui l'étala au sol sans autre forme de procès. Il arriva près de l'autre mur et le franchit à son tour, infligeant au passage des dégâts irréparables à un arbuste qui n'avait rien demandé. Se réceptionner sur le pavé lui tira un grognement de douleur, il s'était probablement fait plus mal qu'il ne le pensait dans sa petite acrobatie de tout à l'heure. Il était de nouveau dans une ruelle. Enfin, c'était tellement étroit que cela tenait plus de la frontière diplomatique entre les deux bâtisses de chaque côté, comme si il avait été impensable qu'elles se touchent. Mais un bienveillant urbaniste avait eu la bonne idée de planter à l'extrémité de cette étrangeté un buisson florissant, masquant de fait l'endroit à tous ceux qui emprunteraient la rue principale. Eric se glissa dans le buisson et parvint à se dégager un point d'observation sur l'entrée du manoir de Ferginson, à quelques centaines de mètres. Ce n'était l'idéal, à causse de la légère pente qui le mettait en contrebas, mais il espérait que cela suffirait. Il se cala aussi confortablement que possible, malgré son dos voûté à cause d'une branche tordue, porta les jumelles à ses yeux et commença sa surveillance du manoir. Il avait au moins trois quart d'heure avant que les deux autres patrouilles se soient fait la malle, et il ne savait combien de temps avant que ses cibles ne daignent bouger. Si elles daignaient bouger.

Il n'eut pas à attendre trop longtemps. Les patrouilles n'avaient cessé que depuis une petite heure lorsqu'il remarqua le premier signe d'agitation suspecte. Une voiture antigrav, normalement un luxe, venait de se garer devant le manoir de Ferginson. Ce n'était pas le véhicule de ce dernier, Eric le savait parce qu'ils l'avaient déjà aperçus de nombreuses fois. Il était plus discret, comme si son propriétaire ne voulait pas attirer l'attention tout en affirmant sa richesse. Eric augmenta le réglage de ses jumelles, visualisant mieux le portail et le véhicule. Les vitres étaient teintés, la carrosserie noire. Tellement banale qu'elle en devenait presque reconnaissable. Le chauffeur n'était pas descendus. Finalement, la porte de Ferginson s'ouvrit et deux gardes du commissaire sortirent, accompagnant une jeune femme qu'on pouvait qualifier sans risques de magnifique. De taille moyenne, élancée et aux courbes épanouies, elle se déplaçait avec grâce et un rien de sévérité. Elle semblait contrarier, ce qui semblait normal si elle était bien la tête. Eric activa l'enregistrement de ses jumelles.
Les gardes l'accompagnèrent au portail. Le chauffeur descendit à ce moment là. C'était un grand type, large d'épaule mais pas spécialement musclé. Les cheveux grisonnants, il tournait le dos à Eric ce qui l'empêchait d'en voir davantage. Il accueillit ce qui était sa patronne en lui ouvrant la porte. C'est à ce moment là qu'Eric capta le détail qui confirmait ses soupçons : juste avant de monter à bord, la jeune femme sembla s'adresser à quelqu'un, mais pourtant elle ne regarda pas son chauffeur, et les deux gardes du manoir étaient déjà partis. Son agresseur vêtus de caméléonine était donc là. Il fut certain lorsqu'il vit la porte se refermer sans que personne n'y touche visiblement. Et il y avait comme un léger flou dans l'air. Rien n'était parfait. Le véhicule démarra et descendit la rue, dans sa direction donc. Il s'aplatit au sol, aussi discret que possible au milieu du buisson. Ils passèrent sans même marquer un temps d'arrêt. Il attendit encore plusieurs longues minutes, pour être certains que la rue était sûre, avant de lentement se dégager de l'enchevêtrement de branche et regagner l'étroit passage dont il venait à l'origine. Alors, tranquillement et sans se presser, il se mit en route à travers les ruelles de service après avoir soigneusement rangé son attirail sous son manteau et camouflé sa protection.

Eric mit près de deux heures à atteindre la butte dédié à l'administratum. Cet endroit était tellement éloigné du centre de la ville que c'en était presque une insulte à lui tout seul. Et une idiotie aussi, personne ne pouvait y mettre un pied sans attirer l'attention de tous ceux qui surveillaient l'endroit. Il leur avait suffit de s'installer un petit passage camouflé depuis le pied de la colline, que les tous premier agents sur place n'avait pas manqué de mettre au point, pour entrer et sortir de leur quartier général en toute discrétion. Quartier général qui était tranquillement installé en plein milieu du quartier, juste sous la basilique principale, tout à fait inatteignable. Hors donc Eric entra dans un entrepôt vaguement réhabilité en entreprise de façade. Dedans, une demi-douzaine de véhicule banalisé qu'ils avaient préparé. Il descendit au sous-sol, où s'alignait tout une collection de tenues diverses et variées. Il se débarrassa de sa combinaison de travailleur et récupéra sa casquette de sous-officier. Il en profita pour regarder pour la première fois ce qu'il avait encaissé. Les balles s'étaient profondément enfoncées dans le plastron. Il avait bien manqué y passer. Il haussa les épaules et tapa le code sur le digicode au mur. Aussitôt un pan se dévoila pour le laisser pénétrer dans un long couloir sans fioritures. Il arriva en haut avec les jambes douloureuses. L'escalade avait ravivé ses ecchymoses. Il arriva devant une porte blindé et présenta son visage au scanner, puis la porte pivota sur ses gonds dans un chuintement. Il pénétra le quartier général.
Il était assez simple, tout au plus un baraquement doté du minimum de matériel. Pour la plupart, ils l'avaient amenés eux-même. Ce monde était un trou. Il salua mécaniquement les quelques hommes qu'il croisa, pour la plupart en train de se tourner les pouces. Ce qu'ils faisaient depuis le début. Il avait envie de les secouer un peu mais devait d'abord faire son rapport. Il passa devant l'armurerie, où il vit Karl en train d'examiner la lame du tueur, qu'il avait oublié dans le corps de sa victime.

« Alors ?
-Juge par toi-même. »

Karl la prit bien en main, s'approcha d'un tube d'acier posé sur un support et frappa sèchement. Un petit bruit, et deux morceaux d'acier tombèrent au sol dans une série de tintement. La lame n'avait même pas une égratignure. Et, se rendit compte Eric, elle était incroyablement fine.

« Mono-moléculaire. Du sacré bon matériel si tu veux mon avis.
-C'était pas prévus ce genre de tueur.
-C'est pas toi qui voulais de l'action ? Railla Karl.
-J'aurais préféré qu'elle ne nous coûte pas un homme.
-Désolé.
-Rien d'autre ?
-C'est toi qui a les informations. Le chef t'attend.
-Bien. »

Eric quitta l'armurerie et reprit son chemin. Un ascenseur plus tard, il pénétrai dans la salle tactique principal, où se trouvait la plupart des cogitateurs de leur petite installation. Autour d'un table, Lazares et trois autres hommes vêtus de la même protection qu'Eric attendaient, se tournèrent vers lui lorsqu'il arriva. Il salua son supérieur comme il se devait et celui-ci lui rendit avant de lui faire signe de s'asseoir. Il obtempéra en adressant un signe de tête respectueux à chacun des autres membres.

« Alors, que signifie cet ordre ?
-Nous avons été repéré, probablement par le même homme de main dont nous suspections la présence.
-Vous avez pus en apprendre plus.
-On a probablement sous-estimé ce type, il possède une tenue de camouflage en caméléonine et des lames mono-moléculaires. Pas franchement le genre de gadget du premier mercenaire venus. » Le silence qui accueillit sa déclaration ne fit que confirmer ses dires et il poursuivit : « Quelques temps après que les patrouilles se soient stoppés, une jeune femme a quitté le manoir, en voiture privée. Elle ne fait pas partie des personnalités dont nous avions la liste. Je pense que notre agresseur l'a accompagné. J'ai filmé la scène. » conclut-il en tendant les jumelles.

Lazares les prit et les brancha sur l'un des cogitateurs. Après quelques réglages plus ou moins minutieux, ils parvinrent à avoir une image de la scène. Chacun l'observa dans le plus grand silence. Ils firent des arrêt sur image, zoomèrent ou repassèrent plusieurs scènes tout en échangeant de nombreux commentaires. Une rapide vérification des bases de données confirma que la jeune femme n'y était pas. Ils ne trouvèrent que des rumeurs parlant d'une habitante de l'archipel en affaire avec Ferginson parmi ce qu'il savait. Et elle correspondait au type. Mais la coïncidence était un peu grosse au goût de Lazares qui dépêcha plusieurs enquêteurs pour obtenir le nom et le maximum d'informations sur cette rumeur. De nouvelles équipes furent désignées pour surveiller Ferginson et c'est quelques ordres distribués, la plupart des hommes quittèrent la pièce, ne laissant que Lazares et Eric. Le silence dura un instant, avant que le sous-officier ne commence à se justifier.

« J'ai désobéi au protocole mais c'était le seul moyen d'avoir ces informations.
-Je ne vous le reproche pas, votre improvisation était bienvenue. Ce qui m'embête, c'est que vous vous soyez fait repérer. Vous êtes absolument certains que vous respectiez toute la procédure ? Qu'il n'y avait aucune fausse note.
-Aucune monsieur, je m'en porte garant.
-C'est bien ce que je craignais.
-Que voulez-vous dire ?
-Cela signifie que nous avons affaire à des types assez malins pour identifier un tel schéma de surveillance en une seule mâtinée, et c'est encore le moins pessimiste que je puisse envisager.
-Sauf votre respect, qu'est-ce qui pourrait être pire ?
-Qu'ils n'aient pas besoin d'identifier le schéma. Parce qu'ils le connaissent déjà. » Un léger silence suivit : « Vous êtes certains de ne pas avoir été suivis ?
-J'ai pris toutes les précautions possibles. »

Le silence gêné qui suivit sous-entendait bien ce que chacun des deux ressassait : quand votre ennemi pouvait se rendre quasiment invisible, était-ce vraiment suffisant ?
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeDim 15 Déc 2013 - 10:32

Chapitre XV :

La voiture antigrav glissa sans un bruit dans l'allée du manoir, puis un domestique s'approcha et la guida jusqu'à un garage un peu à l'écart. Le véhicule se glissa dedans puis coupa ses moteurs et se posa en douceur sur le sol. Le domestique vint ouvrir la porte porte passager pour permettre à Alesa d'en sortir, tandis que derrière eux le conducteur s'extirpait de l'habitacle et glissait une cigarette entre ses lèvres avant de l'allumer. On les conduisit tous deux à l'intérieur du manoir et on les fit attendre dans un salon chic. La femme s'assit dans un canapé et resta parfaitement immobile, tandis que son acolyte faisait les cent pas autour de la pièce, dispersant négligemment des cendres sur son passage et contemplant d'un œil morne des œuvres qui devaient coûter plus cher que leur poids en or.
Finalement, après une assez longue attente, la porte du salon s'ouvrit pour laisser entrer d'abord deux gardes de la résidence, puis un autre homme. C'était, à la tenue riche qu'il portait, de toute évidence un noble. Son physique trop fin lui donnait un air un peu gauche qui contrastait avec son regard bouffis de suffisance et de confiance en lui. Il portait à son flanc une rapière cérémonielle dont il aurait été incapable de dire par quel bout elle se tenait. Anthony Cairn salua son invité avec son petit air narquois.

« Eh bien miss, que me vaux le plaisir de cette visite, vous n'étiez pas censé revenir aussitôt.
-Un léger contretemps, je préfère rester quelques jours discrète.
-Je vois. Puisque vous êtes là, combien de temps encore allons-nous devoir nous servir de ce commissaire. Il est rustre et fonce tête baissé sur tout ce qui lui semble approprié.
-C'est précisément cela qui le rend indispensable, il est si aisé à manipuler. Il est toujours bienvenue de mettre un fusible entre nos actions et nous-même.
-Et lorsque ce fusible sautera ? Vous irez vous faire sauter par un autre responsable de la sécurité ? » Son sourire narquois était devenus provocateur.

Alesa n'eut pas un seule signe d'énervement ou de vexation, au lieu de ça elle se contenta de lui rendre son sourire, dépourvus de la moindre chaleur : « Vous devriez respecter un peu plus mon travail, Anthony. » Il tiqua à l'utilisation de son prénom : « Vous risquez de vous en mordre les doigts, sinon.
-Ah oui ? »

Il claqua des doigts et les deux gardes à ses côtés levèrent leurs armes et mirent en joue les deux invités. A leur décharge, ceux-ci n'eurent aucun mouvement de peur ou de recul. Alesa se contenta de continuer à fixer Anthony de ses yeux calculateurs et de son sourire sans joie tandis que le conducteur n'avait même pas daigné se retourner et égrenait toujours ses cendres sur le tapis. La scène resta un instant figé, puis Alesa baissa la tête, eut un petit rire et releva son regard pour le planter dans celui d'Anthony. Mais cette fois les iris marron étaient froids et durs, sans malice aucune, et elle avait perdus son faux sourire. Elle appela d'une voix autoritaire :

« Kylar.
-Je le tue ? »

Celle-ci était grave et assourdie, émanant du dos des trois hommes. Anthony eut un sursaut de peur et fit volte-face pour se retrouver face à la gueule d'un pistolet, ce qui lui arracha un petit cri, tandis que les deux gardes mettaient en joue le type en armure sombre qui venait de faire son entrée, se déplaçant de quelques pas sans le quitter des yeux.

« Non, je pense qu'il a compris comment il doit se comporter. »

Répondit Alesa en s'approchant du noble d'une démarche langoureuse. Elle posa une main délicate sur son épaule mais il y réagit comme si elle l'avait brûlé avec un fer porté au rouge. Kylar rangea son arme à sa ceinture et accorda derrière son casque un regard méprisant aux deux soldats. Le conducteur daigna enfin se retourner tout en jetant négligemment sa clope au sol avant de l'écraser du talon, creusant un énième trou dans le tapis.

« Je serais dans mes quartiers si vous me cherchez, Anthony. » Précisa Alesa en s'éloignant dans le couloir, suivit de ses deux hommes de mains.

Ils montèrent quelques escaliers et empruntèrent une suite de couloir aussi naturellement que s'ils avaient toujours habité ici. Les domestiques s'écartaient sur leur passage et personne n'osa leur demander la raison de leur visite, en partie à cause de l'apparence de Kylar il est vrai. Puis parce que l'un des deux gardes d'Anthony Cairn les rattrapa et essaya tant bien que mal de donner l'impression de les guider, sans qu'ils ne lui accordent le moindre regard. Finalement ils entrèrent dans une suite mis à leur disposition, où leur chaperon factice les abandonna. Kylar verrouilla la porte derrière eux, se défit de son casque et toisa la jeune femme.

« On dirait que je suis arrivé juste à temps.
-Il n'aurait pas osé tirer » répondit-elle l'air de rien.
« Je suis bien d'accord. » intervint le conducteur : « Tout ce qu'il voulait faire c'est essayer de nous prouver qu'il a des couilles dans son pantalon de soie, mais y a juste un gros portefeuille.
-Ça manque un peu de subtilité, mais l'idée y est Zeph.
-Je continue de penser que ce type n'est pas réglo. » insista Kylar.
« Moi non plus. Tu devrais le savoir. »

Elle se tut un instant pour retirer la robe qu'elle portait, dévoilant dans les grandes largeurs sa superbe plastique, avant de s'affairer à trouver une tenue plus confortable dans ses affaires, qui avaient été montées avant leur arrivée. Kylar, de son côté, détourna le regard comme un enfant prit en faute, sous le regard amusé de Zeph. Le chauffeur était toujours surpris par son collègue, capable de tuer sans la moindre émotion mais qui rougissait dès que leur patronne ne se retrouvait en petite tenue près d'eux. Il se demandait toujours par quel genre de formation ce type était passé pour être comme ça. Quelque part, il le plaignait un peu.
Finalement Alesa se redressa, vêtue d'un simple peignoir.

« Avant que j'aille me débarrasser de tout ce maquillage, j'aimerais savoir ce que tu as découvert durant ta filature. »
Ravis de revenir sur un terrain qu'il maîtrisait, Kylar s'exécuta sans attendre : « Il y avait effectivement un espion caché à proximité, mais il n'a pas cherché à vous suivre. Il s'est dirigé vers les quartiers impériaux puis, arrivé au pied de la colline, est entré dans un hangar. J'ai préféré ne pas y entrer et j'ai simplement observé à travers une porte mal condamnée. J'ai juste vus un tas de camion, certains des services de la ville, d'autre d'entreprises connues.
-Du matériel de filature sans aucun doute. » Intervint Zeph.
« C'est ce que je me suis dit. Comme tu m'avais demandé de faire vite, j'ai préféré ne pas tenter d'entrer et je suis revenus.
-Près des quartiers impériaux hein ? » Kylar hocha la tête à la question de son employeuse.
« Intéressant. Tout cela sera à surveiller. Zeph, trouve moi quelques hommes de mains assez fiables et envoie les à l'Archipel. Qu'ils surveillent. » Acquiescement de la part du concerné : « Et toi Kylar, je n'ai pas eu l'occasion de te demander des détails sur l'assassine que tu n'as pas réussis à arrêter. » L'intéressé fit la moue, avant de répondre :
« Elle est plus douée que ce à quoi je m'étais attendus. Elle a réussit à traverser tout le jardin de Ferginson sous mon nez et sans aucun dispositif de camouflage...
-Tu m'as déjà dit ce qu'il s'est passé. Il n'y avait rien d'étrange, d'inhabituel ?
-Oh, j'avais faillis oublié. »

Il sortit un petit objet d'une poche de sa combinaison et le lança à Alesa qui l'attrapa adroitement avant de l'examiner. Elle regarda son acolyte avec un air circonspect, avant de parler :

« Ce n'est qu'une balle aplatie.
-Je suis à peu près sûr de l'avoir touché quand elle s’est enfuit. Mais elle n'a rien eu. Et j'ai retrouvé cette balle juste en dessous de sa position. Elle ne portait pas de blindage et je serais étonné qu'il existe sur ce monde des champs de force personnels suffisamment puissants pour arrêter un tir comme ça.
-Vraiment ? Tu es sûr ?
-Autant que je peux l'être à une vingtaine de mètre sous une pluie battante, de nuit et après avoir pris plusieurs coups. » Alesa hocha la tête en continuant d'inspecter la balle.
« Intéressant. Et en dehors de ça ?
-Elle est plus agile qu'un chat, elle cogne sacrément fort pour son gabarit et elle est encore plus vive que moi. Mais elle manque d'entraînement et d'expérience. Et elle est insuffisamment protégé. Si je la retrouve, elle ne s'en tirera pas aussi facilement, tu peux me croire.
-J'espère bien. Mais ne la tue pas, je veux la rencontrer. »

Kylar et Zeph regardèrent chacun la jeune femme, avant de se consulter du regard pour savoir s'ils avaient bien entendus. L'assassin fut le premier à émettre des doutes.

« Tu n'as pas entendus ce que je viens de dire. C'est une tueuse. Et on ne sait pas encore si c'est à toi ou à Ferginson qu'elle en voulait.C'est complètement inconscient de vouloir... » Il fut stoppé dans son élan quand Alesa se retourna brusquement et le fixa d'un regard mauvais.
« Je t'interdis de me considérer de la sorte Kylar, je ne suis pas une gamine, je sais me défendre et surtout c'est moi qui t'emploie, alors lorsque je t'ordonne de m'amener quelqu'un, je veux entendre ''Oui je le ferai'' et pas autre chose, est-ce que c'est clair ?! »

Son ton avait été agressif et sans équivoque. Ils se fixèrent longuement dans les yeux et la pièce sembla sur le point d'exploser. Zeph choisit de battre en retraite pour regagner sa chambre et laisser les deux autres régler leurs problèmes tout seuls, ils n'avaient certainement pas besoin de lui dans leurs pattes. Peu de temps après qu'ils soient restés en tête-à-tête, Kylar détourna le regard et se plongea dans un profond mutisme, comme totalement absorbé par la contemplation du mur face à lui. Alesa se calma, soupira et vint s'asseoir à côté de lui. Lorsqu'elle parla à nouveau, elle semblait plus calme et maîtresse d'elle-même :

« Désolée de m'être énervée. Je sais que tu veux juste me protéger, mais fais moi confiance d'accord ? »

Elle vint caresser sa joue du bout des doigts mais n'obtint qu'un grognement et il lui tourna un peu plus le dos. Elle sentit la colère remonter mais l'en empêcha, elle se contenta de répondre d'une voix sèche : « Tu devrais essayer d'évoluer un peu ! » Elle se releva brusquement, attrapa quelques affaires au passage et gagna sa propre chambre. Juste avant de fermer les portes, elle s'adressa à l'assassin : « Nous n'avons plus quinze ans, Kylar, ce temps est révolus. Définitivement. » Et elle claqua les battants.
Quelques minutes passèrent tranquillement, puis il se releva, attrapa son casque et quitta la suite pour rejoindre les locaux des gardes du manoir. Il avait besoin d'un peu d'exercice pour se détendre les nerfs.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 28 Déc 2013 - 23:26

Je peux enfin commenter et dire que j'ai particulièrement apprécié ces derniers chapitres. On se rend compte petit à petit de l'intrigue qui se met en place et qui jouit d'une belle ampleur, l'ajout de personnages charismatiques qui viennent s'ajouter à une héroïne déjà fort originale donne encore plus envie de suivre et de voir comment le tout va se démêler!
Chapeau! Cette fic entre dans le cercle de mes préférées avec un Garde Ordinaire, ça faisait longtemps que j'attendais de pouvoir dire ça!
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeLun 30 Déc 2013 - 8:34

Le commentaire me va droit au coeur ^^

Pour l'instant, pendant les vacances, j'ai mis en pause tout ce qui concernait l'écriture, mais ça devrait revenir après les vacances.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeDim 9 Fév 2014 - 13:02

La pose aura été un peu longue, j'en conviens, mais j'ai finalement trouvé la motivation de m'y remettre.


Chapitre XVI :

Trois jours avaient passés. Trois jours d'inactivité pour Viconia. Habituellement elle les savouraient pleinement, du moins dans les moments où elle n'était pas totalement inconsciente, étalée sur sa paillasse ou chez Dan. Mais là elle était perturbé. Quelque chose grattait aux frontières de son esprit et l'empêchait de se détendre. Elle n'arrivait même pas à se droguer, elle fixait le sachet qui contenait les graines, posé sur le seul meuble décent de sa planque. Elle était en manque, elle suait à grosses gouttes et ses membres étaient perclus de douleurs. Mais pourtant quelque chose la retenait, dès qu'elle prenait une graine en main elle hésitait puis la reposait. C'était comme un intense sentiment de dégoût d'elle-même qui la saisissaient brusquement à chaque fois. Elle n'arrivait plus à se comprendre, alors que tout semblait aller de mal en pis autour d'elle. Elle se mit à faire les cents pas, tâche fastidieuse dans une pièce dont elle faisait le tour en à peine cinq.
Elle n'était pas entraînée pour réfléchir, on ne l'avait jamais éduquée et elle n'en avait jamais ressentis le besoin. Et maintenant qu'elle avait l'impression que toutes ses certitudes s'effondraient les unes après les autres, elle se sentait désespérément impuissante. Tout avait commencé avec cette mission étrange dans les taudis : Konrad était une cible dont elle n'aurait jamais dus avoir à s'occuper. Et tout allait de mal en pis depuis. Elle ne pensait pas seulement à cette mission chez Ferginson et à la rencontre imprévisible qu'elle avait faite. Elle se sentait de plus en plus étrange, se retournait parfois, persuadée d'être observée, alors qu'elle était totalement seule. Ça l'avait fait deux fois dans sa planque. Dans sa planque, dont elle connaissait suffisamment les grincements de planchers ou le bruit des tuiles pour entendre quelqu'un arriver plusieurs minutes en avance. Et bien évidemment il n'y avait personne. Et elle se surprenait à avoir des pensées incongrues, particulièrement envers Hock. Elle se mettait à le détester. Et pourtant rien ne lui semblait avoir changé, son maître était égal à lui-même depuis qu'elle le connaissait. Alors pourquoi maintenant ? Et ses journées d'introspection loin des brouillards de la drogue n'amélioraient pas les choses. Elle attrapa à nouveau le sachet d'une main féroce, glissa sans attendre une graine entre ses dents et... rien. Elle resta un instant immobile, puis recracha la graine qui alla rouler sur le plancher, glissant dans un interstice. Autrefois elle se serait jeté dessus rien qu'à voir une graine lui échapper. Cette fois elle n'eut qu'un soupir et reposa le sachet. Elle se contenta de s'étirer, faisant naître tout un tas de douleurs articulaires qui commençaient à lui devenir presque habituelles.
Il fallait que quelque chose arrive. Et que quelque chose arrive vite. Satisfaite de cette conclusion, elle se laissa retomber sur sa paillasse, puis perçut des grincements tout à fait connus. Leur rythme la renseigna : son logeur montait l'escalier. Elle se redressa brusquement, se prit la tête dans les mains comme son mal de crâne désormais presque permanent se rappelait à elle. Elle ne s'arrêta pas pour autant, sortit de la piaule et dévala l'escalier précipitamment. Son apparition soudaine déstabilisa le vieil homme qui bascula en arrière avant qu'elle ne le rattrape par le col et le redresse. Elle avisa alors qu'il tenait une lettre en main et s'en empara sans attendre avant de remonter en grognant un vague remerciement. Elle ouvrit la lettre, le mot était aussi bref que le précédent. Elle avala les dernières marches qui la séparaient de sa planque, s'habilla rapidement et sortit par le toit. Elle prit aussitôt la direction du manoir de Hock.

Lorsqu'elle y arriva, le majordome attendait déjà dans la pièce des gardes. Il lui ouvrit même la porte en la voyant arriver par la fenêtre. Il avait l'air si féroce que, si elle ne l'avait pas sus parfaitement inoffensif, Viconia aurait craint qu'il se jette sur elle. Il lui fit signe de la suivre d'un geste autoritaire et elle s'exécuta sans discuter, un peu blême à dire vrai. Et elle n'était pas la seule puisque même les gardes qui occupaient la pièce regardait le vieil esclave avec ce qui ressemblait presque à de la crainte. Quant aux autres esclaves, ils se jetaient pour ainsi dire hors du chemin. Ceux qui n'étaient pas assez rapides ne manquaient pas de se prendre une remarque insultante ou blessante. L'assassine se demandait se qui avait pus provoqué un tel accès de fureur. Alors qu'elle s'attendait à ce qu'il monte à l'étage, le majordome passa sous l'escalier et se dirigea vers l'autre aile de la demeure. Ils trouvèrent finalement Hock dans ce qui n'était guère plus qu'un vestibule, habillé comme pour sortir. Il jaugea un moment Viconia, comme s'il cherchait à l'évaluer, puis se décida et laissa échapper naturellement un « Nous y allons. » qui sonnait pourtant comme un ordre. Elle vit alors la mâchoire du majordome se crisper tandis qu'il ouvrait une porte qui donnait sur un garage. Viconia ne savait même pas que Hock possédait une voiture antigrav. C'était pourtant l'évidence quand on y pensait, et son modèle semblait avoir été conçus pour s'éloigner le plus possibles des véhicules à roues. L'engin était quasi circulaire, extrêmement plat et une bulle de verre teinté recouvrait l'habitacle. Il était quasiment impossible de savoir depuis l'extérieur dans quel sens l'appareil était orienté. Un chauffeur attendait juste à côté et se précipita pour ouvrir la porte à Hock. Il allait la refermer derrière lui quand Hock fit signe à Viconia d'embarquer, ce qui la surprit autant que le chauffeur et crispa un peu plus encore le visage du majordome. L'assassine s'exécuta avec prudence, comme si elle craignait de n'avoir mal entendus et qu'on ne la jette dehors, mais finalement on referma la porte derrière-elle et Hock se contenta d'ordonner de rejoindre la basilique impériale.
L'appareil décolla difficilement, sortit du garage puis se mit en route, volant au même niveau que les appareils de surveillance locaux. Ils en croisèrent d'ailleurs un qui s'arrêta, ses deux pilotes les observant les yeux ronds, probablement à se demander si cela était verbalisable. Viconia était partagée entre la terreur et la fascination. Elle avait déjà une certaine habitude de l'altitude et des cabrioles, mais voler était quelque chose de totalement nouveau et elle avait envie de se coller contre la vitre pour profiter au mieux de la vue. A côté de ça, elle était dans le véhicule personnel de son maître en compagnie de celui-ci. Il était invraisemblable qu'un esclave bénéficie d'un tel traitement de faveur, et d'ailleurs le conducteur, impérial évidemment, jetait fréquemment un coup d’œil par dessus son épaule, comme s'attendant à tout moment à voir Hock se rendre compte de ce qu'il faisait et exiger que Viconia descende. Mais il n'en fit rien et ils arrivèrent finalement à destination. Un homme les attendait devant le bâtiment et leur fit signe de le suivre. Le conducteur attendit un confirmation de Hock avant de s'exécuter et ils allèrent finalement se poser dans un garage à quelques mètres seulement. A l'intérieur les attendait cinq hommes, parmi lesquels celui qui avait interrogé Viconia lors de sa précédente venue au manoir de Hock. Les autres portaient une armure imposante qu'on ne voyait que sur les gardes d'élites du gouverneur, un casque comme fait d'un seul bloc qui ne laissait voir qu'une fine visière horizontale et le bas de leur visage, une électro-masse ainsi qu'un fusil à pompe en bandoulière. Viconia sentit sa peur augmenter et remarqua qu'elle n'était pas la seule puisque le chauffeur suait à grosse gouttes. L'appareil se posa et l'un des gardes ouvrit la porte pour les passagers, avant de les aider à descendre. Deux autres ouvrirent l'habitacle du chauffeur et le saisirent par les épaules fermement avant de sortir une seringue et de lui injecter le contenu dans le cou. Il s'effondra sur son tableau de bord, mais Viconia l'entendait respirer encore faiblement. Elle suivit Hock qui rejoignit l'homme chauve et lui serra la main avant que tous deux ne s'enfoncent dans le bâtiment. Elle les suivit, et en sentant les quatre gardes se refermer derrière elle elle réprima un frisson.

Ils enfilèrent une suite de couloir très fonctionnels, descendirent quelques escaliers. Ils croisèrent quelques autres hommes, plus ou moins protégés et armés. Finalement, ils pénétrèrent une pièce qui ressemblait plus ou moins à ce que Viconia connaissait d'une salle de réunion. Elle était simplement très épurée comparé à ce qu'elle avait l'habitude, ici rien n'était inutile contrairement aux demeures nobles dont elle avait la vision habituellement. Tout ici sentait le professionnel. Et ce n'était pas l'attitude des gardes qui allaient trahir tout ça, les quatre qui les accompagnaient se répartir autour de la porte sans même se concerter. Autour de la table centrale les attendaient une demi-douzaine d'hommes. Ils avaient moins l'air de soldats, vêtus de vestes droites d'un style militaire qui désignaient plutôt des officiers. Lazares prit place à un bout de la table, Hock s'assit à côté de lui et Viconia attendit debout, en retrait, jusqu'à ce qu'un des hommes lui fasse signe de venir s'asseoir. Elle hésita encore un peu, puis s'exécuta voyant que Hock ne semblait pas s'y opposer.
Puis ils attendirent. Visiblement c'était celui avec qui elle avait déjà parlé qui commandait. Mais il ne daignait pas prendre la parole. Et les autres attendaient. Cela ne posait pas de problème à Viconia, en fait c'était pour ainsi dire ce qui était le plus normal pour elle depuis qu'ils avaient quitté le manoir. Elle attendait qu'on lui dise quoi faire, les choses prenaient enfin un tour un peu plus normal. Finalement, Lazares se décida à donner un signe de vie et se tourna vers l'un des officiers qui s'éclaircit la voix et commença à parler, s'adressant principalement à Hock et... à elle.

« Nous avons une piste sur l'origine de cet homme de main qui a tenus en échec la tentative d'assassinat contre Ferginson. Lui-même est difficile à observer, mais nous pensons avoir identifié son, ou plutôt sa, commanditaire. » Il appuya sur une commande et l'écran principal s'alluma en grésillant, montrant une image d'une jeune femme magnifique, qui sans qu'elle ne comprenne pourquoi mit Viconia mal à l'aise. L'arbitrator poursuivit : « D'après les informations récoltés, elle se présente comme Alessa du clan Kambuu, et viendrait faire affaire avec Ferginson depuis l'Archipel.
-Les gens de l'Archipel ne font pas affaire avec d'autres personnes que les franc-marchands. Les clans interdisent formellement tout autre échange aux dernières nouvelles » Intervint Hock.
« Nous le savons. C'est ce qui nous a intrigué aussi, et Ferginson fait donc beaucoup parler de lui. Rien ne vous était venus aux oreilles ? » C'était Lazare qui venait de répondre. Hock plissa son front sous la concentration, avant de reprendre :
« Peut-être, mais je n'ai pas dus y prêter attention. Ça m'aura semblé trop invraisemblable pour être vrai.
-A nous aussi. D'autant plus que ça n'explique absolument pas pourquoi cet homme de main est aussi particulier, l'Archipel n'a à notre connaissance aucun contact extra-planétaire. Mais il est difficile d'en savoir plus depuis Pharunn, les échanges sont trop laconiques pour ça. Il va falloir aller enquêter sur place.
-Et si vous me disiez pourquoi vous avez voulus que je vienne ?
-J'aimerais que votre agent accompagne mes hommes. »

Viconia tourna brusquement la tête vers celui qui venait de parler, le fixant avec des yeux comme des soucoupes. Il ne sembla pas la voir, attendant seulement une réaction de la part de Hock. Celui-ci avait encore le front plissé sous la concentration. Posément, il répondit :

« En quoi pouvez-vous avoir besoin d'elle ? Elle n'y est pas plus familière que vos hommes, je n'ai aucun contact là-bas...
-J'ai des enquêteurs, pas autre chose. Nous sommes habitués à avoir toutes latitudes dans nos recherches, même à Pharunn la plupart de nos procédures doivent être revus pour s'adapter aux contraintes administratives. Là-bas, ils auraient les mains liés. Je ne compte pas envoyer une escouade à découvert, je compte les y infiltrer. Oublions les lois et les règles, il va falloir jouer serré et discret. C'est pour ça que j'ai besoin d'elle.
-Admettons. Vous devez savoir que les natifs n'y sont pas tolérés, non ?
-Évidemment. Nous avons déjà prévus la solution pour ça. Bien évidemment cela ne sera pas sans risques. Mais est-ce jamais le cas après tout ? Et de toutes manières, tant que nous n'en saurons pas plus sur cette femme, il est hors de question de s'attaquer directement à Ferginson de nouveau. Il s'est attiré des alliés très compétents de ce que nous avons pus en juger. Trop compétents, sans doute bien plus que lui en fait.
-Je vois... C'est d'accord, elle sera à votre service autant de temps que vous le jugerez nécessaire. Maintenant, ne faisons pas traîner cette réunion plus que nécessaire, j'ai déjà bien suffisamment attiré l'attention je pense.
-Je le pense aussi. Messieurs, ramenez-le à son véhicule. Je vous recontacte dès qu'il y a du nouveau, Hock.
-J'espère bien. »

Les deux hommes se serrèrent la main, puis Hock partit en compagnie de deux gardes et de quelques uns des officiers dont on n'avait manifestement plus besoin. Viconia resta figée sur sa chaise. Elle avait du mal à croire ce qu'elle avait entendus. Elle n'était plus au service d'Hock, même si ça n'était que temporaire. C'était de loin la chose la plus incroyable qui lui soit arrivé de toute sa vie. Cela suffisait presque à lui faire oublier qu'on comptait l'envoyer dans un endroit où elle serait battue, probablement violé, certainement torturée puis exécutée à peine poserait-elle le pied à terre.
Finalement, ils n'étaient plus que trois à la table : Lazare, un officier avec une casquette profondément enfoncée sur son crâne, au visage carré pour bonne partie mangé par des favoris blonds, et elle. Le premier se reposa contre le dossier de son siège et posa sur Viconia un regard à moitié compatissant, chose dont elle n'avait certainement pas l'habitude.

« Bon, nous sommes partis pour de longues explications. » dit-il dans un soupir.


Dernière édition par Jarlaxle le Sam 15 Fév 2014 - 21:39, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 15 Fév 2014 - 21:32

"et posa sur Luuçaliia un regard moitié compatissant, chose dont elle n'avait certainement pas l'habitude."

Si ce n'est pas une faute de frappe, il faut que l'on m'explique, dans tous les cas, j'attends les "longues explications" promises ^^
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeSam 15 Fév 2014 - 21:40

C'était une totale faute de frappe x)
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeMar 11 Mar 2014 - 18:38

Chapitre XVII

« Vous avez compris maintenant ? » Le ton de Lazare était patient, mais un peu de lassitude se faisait ressentir.
« Je crois. » Hésita Viconia avant de reprendre : « Tout ce monde est une boule de roche qui se balade dans le vide autour du soleil, mais il existe des tas de soleil comme le nôtre avec d'autres planètes autour et d'autres mondes différents du nôtre. On peut se balader entre ces mondes avec des vaisseaux de métal. Tous ces mondes sont unis dans ce qu'on appelle l'Imperium, qui est gouverné par le Grand Conquérant. Vous vous êtes l'équivalent de la police et vous traquez les rebelles qui voudraient s'opposer à l'Imperium.
-C'est un bon résumé. » conclut Lazare.

Il s'amusait toujours de la vision, que les plus grands historiens auraient qualifiés de très juste, que cette planète avait de l'Empereur. Pour eux il était le conquérant, celui qui avait colonisés ces terres aux sauvages et établis la suprématie de ceux qu'on appelait aujourd'hui encore les Impériaux, quand bien même leurs liens avec le reste de l'Imperium était aussi sporadiques que possibles. Viconia, elle, avait plusieurs interrogations. L'une d'elle, qu'elle préférait ne pas évoquer à haute voix, pouvait se résumer simplement : si toutes les planètes appartenaient à l'Imperium, que pouvaient bien faire les rebelles ? Et à quoi servaient les escadrons de soldats -généralement des Natifs trop peu dociles- qu'on voyait chaque année partir à bord de gigantesques vaisseaux ? L'autre question, plus anodines, franchit ses lèvres comme intimidée :

« Et pourquoi vous me racontez tout ça ?
-Parce que j'ai besoin que vous soyez un minimum renseignée pour nous aider à trouver nos ennemis.
-Et vous ne pouvez pas simplement me dire à quoi ils ressemblent ? »

Un silence grave lui répondit. Lazare pianotait ses doigts l'un contre l'autre, tandis que l'officier aux favoris blonds semblait dormir sous sa casquette, les bras croisés sur son torse puissant. Finalement Lazare prit comme précautionneusement la parole :

« Nos ennemis peuvent adopter de nombreuses apparences. Vous en faire une description serait aussi fastidieux qu'incomplet. Retenez ceci : ils ne sont pas originaires de votre monde et ils ne vénèrent pas le Grand Conquérant. »

La question de savoir d'où venaient ces rebelles toucha de nouveau l'esprit de Viconia, mais elle la retint. Quant aux croyances, elle même n'avait jamais vénéré vraiment le Grand Conquérant, comme la plupart des Natifs. D'après les légendes, il restait la cause même de leur mise en esclavage, et celui qui viendrait les punir de nouveau s'ils s'avisaient de tenter la moindre rébellion. On le craignait, mais on ne le vénérait pas.

« Bien, » Reprit Lazare sur un ton plus assuré : « Maintenant que vous en savez assez, il est temps de vous expliquer plus spécifiquement comment va se dérouler votre mission. Eric ? » L'officier aux favoris se réveilla, repoussa d'une pichenette sa casquette en arrière et posa ses mains jointes sur la table :
« Nous serons cinq, plus vous. Moi et mes hommes serons chargés de trouver et installer une planque, de récolter les informations de bases et de les analyser tandis que vous vous occuperez de mener les investigations plus avant -en gros vous entrez dans la maison de ceux qu'on vous indique et vous nous dites si vous trouvez des choses bizarres. » ajouta-t-il devant l'air confus de Viconia : « Nous mettrons pied sur l'Archipel sous l'identité d'un groupe de touristes. Nos armes et nos équipements seront camouflés dans nos bagages et nous vous avons déjà prévus de quoi satisfaire vos demandes. Vous aurez le rôle d'une servante, nous avons estimé que c'était celui que vous seriez le plus en mesure de jouer. Cela dit sans vouloir vous vexer. » Elle haussa les épaules à sa dernière remarque, hésita puis demanda finalement :
« Et pour ma couleur de peau ? Les Natifs ne sont pas tolérés sur l'Archipel, serviteurs ou esclaves. »

Pour toute réponse, Eric se leva et lui fit signe de la suivre. Ils quittèrent la pièce, laissant là Lazare. Ils s'enfoncèrent un peu plus dans le complexe. Viconia n'osait pas trop regarder autour d'elle, ne sachant pas trop ce qu'elle avait ou non le droit de voir. Mais ils n'allèrent pas loin et à peine un étage plus bas ils entrèrent dans une nouvelle pièce. Celle-ci était remplis de machines et d'équipement, des plans de travail surchargés de fusils démontés et de munitions en pagaille. Il y avait là de quoi équiper une petite armée. Ils se dirigèrent vers le fond de la pièce, où un homme travaillait. Il se retourna en les entendant arriver : il était brun, les yeux recouvert par des lunettes de protection et le visage bronzé par les arcs de soudure. Il salua Eric d'un geste amical et fit un signe de tête à Viconia. Il était aussi extrêmement grand, une bonne tête de plus que l'officier, qui lui même était déjà nettement plus grand que l'assassine. Enfin, elle remarqua une petite broche orné d'un crâne cranté.

« Il faudrait que je montre à l'auxiliaire le matériel que tu as prévus pour elle.
-Ah, très bien, je l'ai mis quelque part par là, ne bouge pas je vais te le retrouver. »

Il fouilla quelque instant parmi une étagère remplie au-delà du raisonnable avant d'en extirper ce qui ne ressemblait qu'à une valise métallique tout à fait banale. Il l'ouvrit et la déposa au sol. L'une de ses moitiés étaient remplis d'une espèce de gelée à la couleur chair. L'armurier donna quelques explications :

« Il vous suffit de plonger les deux pieds dedans et d'appuyer sur le bouton rouge à côté. Il vaut mieux vous débarrasser de la plupart de vos vêtements, même si ce n'est pas indispensable. »

Elle s'exécuta, et pas à un instant les regards des arbitrators ne cillèrent pour profiter du spectacle -certes tout à fait moyen- qui s'offrait à eux. Prudemment, Viconia trempa un pied dans la mixture. Elle n'avait même pas l'impression de la toucher, c'était comme si une mince pellicule s'était glissée entre sa peau et le gel. Elle mit son autre pied et la même sensation bizarre était présente. Une fois cela fait, elle se pencha pour appuyer sur le bouton rouge. Aussitôt, elle eut l'impression d'un film qui la recouvrait en un instant, puis disparaissait aussitôt. Elle aurait dis que rien n'avait changé, mais le bras qu'elle tendait pour appuyer sur le bouton était devenu d'une couleur albâtre.

« Vous devriez vous regarder dans la glace. »

Ce qu'elle fit en se redressant doucement. Elle avait désormais la peau aussi blanche que la plus claire des impériales. Par elle ne savait trop quel miracle, ses bras, ses longues jambes, son ventre plat, sa poitrine et ses fesses étaient devenus d'un blanc presque éclatant. Même, nota-t-elle, son intimité avait subis le traitement. Elle releva le regard vers son visage pour découvrir, comble de la stupeur, que ses deux yeux étaient désormais d'une magnifique couleur émeraude. Pendant ce temps elle entendait à moitié l'armurier qui expliquait à Eric :

« Le plus dur ça a été les yeux, les pseudo-peau classiques ne les recouvrent pas, et celles qui le font ne sont pas conçus pour le camouflage mais pour la protection. J'ai quand même réussit quelque chose d'assez convaincant, à même normalement de tromper même les scanners rétiniens qu'ils emploient parfois.
-Tu en es certain ? Je n'ai pas envie que tout cela capote à cause d'un gadget défectueux.
-Autant que je peux l'être. L'appareil que vous m'avez fournis n'est pas assez précis pour faire la différence, mais s'ils en ont des plus performants... Et de toutes façons, c'était tout ce que je pouvais faire en aussi peu de temps.
-Très bien, très bien.
-C'est... c'est magique... » articula faiblement Viconia.
« Hum ? Oh non rien de magique là-dedans, simplement l'action de molécules chromatiques emprisonnés dans un film électrostatique...
-Ça ira. Autre chose ?
-Ben, vous pouvez toujours emmener ça, j'ai crus comprendre qu'elle se débrouillait avec les lames. » Disant cela, il attrapa l'épée mono-moléculaire arrachée à Kylar : « De toutes façons on n'en fera rien. »

Viconia jaugea l'arme, qu'elle trouva aussitôt beaucoup trop fine pour être utile, elle allait probablement se fracasser au moindre choc. Néanmoins elle l'attrapa en main lorsqu'on lui tendit et elle la fit tourner entre ses doigts. Elle était exceptionnellement légère, presque autant que ses dagues et pourtant trois fois plus longue. Elle allait en tester le tranchant de son doigt, mais Eric l'arrêta juste avant. Néanmoins, et sans même qu'elle eu sentit quoi que ce soit, une fine ligne rouge décorait sa peau désormais.

« Ne t'avise jamais de refaire ça. Ça coupe beaucoup mieux que tu ne peux le croire. » Elle suçota la coupure avant de demander, sur le ton de la conversation :
« Je peux me rhabiller maintenant ?
-Évidemment. » répondit l'officier comme s'il y prêtait tout juste attention. Lorsqu'elle fut de nouveau présentable, on l'amena auprès de ce qui tenait lieu d'intendance pour s'assurer qu'on disposait de déguisements à sa taille.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge - Page 2 Icon_minitimeMer 12 Mar 2014 - 17:58

On  avance pas beaucoup sur ce post, mais dans le même temps je n'avance pas beaucoup sur mes propres récits ^^
La suite est comme toujours attendu avec bon esprit :)
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