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 De Noir et de Rouge

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Jarlaxle
Bregan d'Aerthe.
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MessageSujet: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeLun 26 Nov 2012 - 22:52

Une envie et une inspiration soudaine, peut-être passagère, mais en tout cas un prologue en textes et en mots.



L'air de la pièce était humide et lourd des effluves si particulière du sexe. Dans la pénombre, que ne venait transpercer qu'un pâle rayon d'une des trois lunes principales de la planète -si grosses et brillantes que jamais les étoiles n'étaient visibles-, l'on ne pouvait guère distinguer le luxe outrancier de la chambre, en dehors de l'immensité de celle-ci et des meubles qui l'occupaient. Au centre, dans ce qui était un lit suffisamment large pour y accueillir plus de dormeurs que la maison ne devait en compter, l'on pouvait voir bouger deux silhouettes. Leur posture et leurs mouvements, plus sûrement encore que les gémissements de plaisir qui s'en échappaient, ne laissaient aucun doute à ce qui les occupaient.
Ils continuèrent ainsi longtemps, assez pour que la lune se déplace dans le ciel et que ses rayons viennent éclairer leurs peau d'albâtre à tout deux. Elle était une brune aux appâts généreux, au visage fin mais trop maquillé, et qui semblait vouloir se faire passer pour encore plus jeune qu'il ne l'était réellement. Ses yeux noisettes étaient mis-clos dans l'extase. Son compagnon était tel un éphèbe sous la beauté lunaire. Sa peau parfaite luisait légèrement de sueur, ses muscles se dessinaient nettement mais pas sans brutalité et son visage, sévère mais jeune, se blottissait dans le cou de sa partenaire, qu'ils faisaient gémir sous ses caresses et ses coups de reins.

Finalement, après un dernier cri de bonheur commun, ils se laissèrent doucement glisser dans les draps de satin et semblèrent s'endormir rapidement. Le clair de lune, encore plus avancé, révélait désormais des tentures filées d'or et un lit à baldaquin semblant taillé dans la masse d'ivoire. La demeure était encore plus somptueuse qu'elle avait pus le paraître jusqu'à alors.
Lentement, presque imperceptiblement, la femme bougea, se releva légèrement, puis avec souplesse et discrétion se glissa hors du lui et de l'étreinte de son amant. Elle attrapa un peignoir, masculin de toute évidence, et se glissa d'une démarche légère qui ne fit que bruisser l'épais tapis jusqu'à la porte. Celle-ci pivota en silence et le femme s'effaça dans le couloir.

Il était à l'image de la chambre, recouvert de boiseries et de tableau pour la plupart d'un prix largement supérieur à tout ce qu'elle ne pourrait jamais s'offrir. Elle se pressa contre une porte à sa droite et s'aventura dans la pièce. Il s'agissait, comme elle le pensait, d'une salle de bain. Plus mesurée dans sa décoration, sans doute car nombres d'ornements ne supportait guère l'humidité, elle contenait tout de même une baignoire aussi démesurée que le lit qu'elle venait de quitter. La femme laissa son peignoir glisser le long de ses épaules, fit tourner les robinets puis, lorsque l'eau arriva presque au plus haut niveau, se laissa glisser avec un frisson de plaisir.
Se laissant aller contre la paroi d’émail, elle se félicita intérieurement. Ce jeune milliardaire était sans conteste un imbécile prétentieux, mais un imbécile prétentieux et riche. Très riche. Pour tout dire l'une des plus grosses fortunes de la planète. La quasi-totalité des mines de l'hémisphère sud était sous le contrôle direct de la famille Skarn, et une bonne moitié des usines de raffinages tout autant. Ils étaient dans les petits papier de tout le monde. Lorsque le dernier né avait hérité, suite au retrait inopiné de ses parents, le gratin de l'aristocratie féminine s'était empressé de le séduire. Oh, elle n'avait pas prétention de la marier, mais elle comptait bien profiter de sa richesse aussi longtemps qu'elle arriverait à l'attirer. Ce qui, au vu du caractère versatile de l'à-peine adulte, pouvait se révéler court.

L'eau commençait déjà à se refroidir, et elle décida de retourner sous les draps. Elle sortie du bain, se sécha rapidement et enfila de nouveau le peignoir avant de regagner la chambre. Essayant vainement de maîtriser ses cheveux trempés, elle vint s'asseoir sur le lit et posa une main sur le matelas. Elle le sentit chaud et poisseux. Intrigué, elle releva la main. Dans le clair de lune, sa main lui apparue soudainement rouge cramoisie et l'odeur du sang lui agressa les narines. Elle se releva d'un bond et se retourna tandis qu'un hurlement d'horreur se bloquait dans sa gorge.
Les draps et le lit baignait dans l'humeur sanguine, laquelle jouait de milles et un reflets irisés dans la pénombre revenue. Le satin humide se collait à la peau du jeune Skarn, moulant son corps nu d'une macabre précision. La jeune femme ne put empêcher son regard de remonter. La gorge avait été profondément entaillée, pour ainsi dire découpé. Sur le visage de l'héritier se dessinait l'horreur et l'imminence de la mort dans ses yeux saphir, tandis que les ecchymoses nouvelles de ses lèvres suggéraient qu'on l'avait maintenus avec une force peu commune. Le lit étaient défaits depuis longtemps, mais au vu de la posture des bras et des jambes de l'homme on pouvait deviner qu'il s'était débattus, sans visiblement une chance.

Alors qu'elle s'effondrait contre une armoire en bois massif gravé de hauts-faits, la jeune femme laissa finalement échapper un cri strident, de surprise et de terreur, entrecoupés de sanglot qui lui mettaient la gorge en feu. Réagissant avec un professionnalisme tardif, il ne fallut pas plus de quelques secondes aux gardes de la maison pour se ruer dans la chambre, se figeant aussitôt qu'ils découvraient le spectacle de leur employeur, gisant pantelant dans son propre sang. Certains se ruèrent à la fenêtre de la pièce, mais ne purent rien discerner dans la nuit d'encre qui s'étendait sur la capitale planétaire. D'autres frappèrent d'un poing rageur contre le mur, faisant éclater la boiseries sous leurs implants. Un seul, le plus vieux, s'approcha doucement du cadavre et vint lui fermer les yeux avant d'adresser une rapide prière. Puis en quelques mots il réorganisa les hommes, fit évacuer la jeune femme et lança plusieurs équipes dans la nuit, à la poursuite d'un fantôme.

Le bruit dans la chambre avait cessé depuis plus d'une dizaine de minutes lorsqu'une ombre remua doucement sur la façade. Le mouvement n'était qu'à peine perceptible, et n'importe quel quidam se n'y aurait prêté aucune attention. Un garde l'aurait peut-être fixé quelques minutes avant de détourner le regard. Mais il n'y avait de toute façon personne, personne hormis quelques mammifères nocturnes en chasse sur les toits de la cité, pour voir soudain une ombre se détacher soudain d'une renfoncement et se laisser tomber avec souplesse sur une terrasse quelques mètres sous elle. Elle ne s'arrêta qu'une seconde, nécessaire pour vérifier qu'on ne l'avait repérée, puis pris son élan de deux pas assuré qui ne firent plus de bruit qu'un courant d'air, s'appuya sur la rambarde d'un saut agile et se propulsa dans les airs, en direction d'un saule imposant.
Elle l'attrapa à deux mains, bras tendus, effectua presque une rotation complète pour venir poser ses deux pieds sur l'épaisse branche. Nouvelle pause, un peu plus longue cette fois-ci, puis l'ombre se laissa souplement glisser de son perchoir pour atterrir dans l'herbe grasse. Désormais caché dans la végétation du jardin, elle avança à pas lents, veillant à ne pas frôler de branches ou déplacer quelques feuilles qui auraient signaler sa présence à un éventuel observateur. Elle enjamba sans s'en soucier le cadavre de l'un des jardiniers du manoir, puis celui épais d'un chien de garde. Aucun d'eux ne l'avait détecté plus de quelques secondes, et aucun ne risquait de poser problème désormais. Elle se félicitait de tuer aussi peu de civils que possible, mais certains se trouvaient aux mauvais endroits aux mauvais moments, ou s'y faisaient attirer par la bêtise crasse d'un animal trop stupide pour comprendre le danger.
Arrivée au pied du mur qui entourait la propriété, elle l'avisa un instant. L'extérieur pouvait se féliciter d'une façade haute et aussi lisse que possible, qui ne l'avait guère retenus plus d'une vingtaine de secondes. L'intérieur était un ensemble de pierres variées et désordonnées. Très esthétique, mais ne lui opposa pas plus de trois secondes de résistance avant qu'elle n'atterrisse souplement dans la rue, sans frôler les barbelés ou même les lasers de détection.

A cette heure, alors que l'aube n'allait plus tarder, les quartiers nobles étaient parfaitement déserts. La classe dirigeante aimait à profiter du climat doux de la soirée, parfois même tard dans la nuit, mais évitait le plus souvent les froides heures matinales et leur humidité. C'était, après tout, des heures bonnes pour les paysans, les artisans et le reste des roturiers qui se devait de travailler pour gagner sa vie. Un déjeuner d'affaire ne commençait que rarement avant la mi-après-midi, et rare était les aristocrates à se déplacer en dehors de telles manifestations.
Quant aux forces de l'ordre, dans ces rues, elles étaient pour ainsi dire inexistantes, de toute façon chaque manoir avait sa propre garde privée et mieux valait ne pas mélanger flics et mercenaires. Et puis, dès fois que les premiers auraient découverts des choses embarrassantes, il était toujours fastidieux de faire taire un serviteur public. Non, il était beaucoup plus simple pour le préfet de tenir ses hommes éloignées des hauteurs, et pouvoir ainsi y être invité à l'occasion.

L'ombre n'hésita pas longtemps, et suivit la rue principale, qui descendait en pente douce. Lorsqu'elle eut gagné des quartiers moins huppés, où les demeures perdaient en superficie et en hauteurs -bien qu'elles atteignaient encore trois ou quatre étage et plusieurs centaines de mètres carrés- et où commençaient à apparaître des rues plus étroites, elle disparut dans l'une d'elle, avant de reparaître sur le toit d'une maison voisine.
Vive et souple, elle s'élança à travers la ville, sautant d'un toit à l'autre, se laissant glisser sur les toits de tuile des maisons bourgeoises, s'abritant de temps à autre dans une cheminée, redescendant au sol pour éviter d'apparaître à la vue d'une quelconque garde. Plus elle descendait la colline, moins les maisons se faisaient hautes et plus les toits sous ses pieds étaient incertains. Elle n'avait pas encore atteint les quartiers populaires lorsqu'elle disparut si soudainement qu'on aurait pus la croire envolé, si un discret reflet bien vite calfeutré n'avait révélé une fenêtre ouverte, juste dans l'ombre d'une cheminée imposante.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 27 Nov 2012 - 18:01

Intriguant, est ce le retour d'un perso connu ou une toute nouvelle aventure?
On notera tout de même une constante dans les fics du fofo: on ne passe pas grand temps chez les bouseux What a Face
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Jarlaxle
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 27 Nov 2012 - 18:35

Toute nouvelle aventure :oui:
Le personnage principal est vaguement inspiré d'un perso de RP que j'ai trop peu joué (indice maigre j'en convient :p )

Et on notera aussi que les aristos ont pas toujours la tête sur les épaules :noel:
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 28 Nov 2012 - 19:55

Chapitre I :

Sieur Bathelm descendit de sa voiture, demandant à son chauffeur d'aller se garer un peu plus loin dans l'avenue. Le véhicule s'éloigna en ronronnant doucement, tandis que le nouveau venu s'approchait du portail forgé qui donnait accès à la propriété. Il ne s'éloignait que rarement des hauteurs, mais le vicomte Hock les avait quitté voilà déjà plusieurs dizaines d'années, lorsqu'il y avait été contraint par le reste de sa famille au sortir d'un duel d'honneur.
Ah, les duels, c'était le bon temps. Le chevalier se rappelait encore l'époque où la moitié de la juridiction noble se réglait sur le pré, avec pour toute preuve le talent à l'épée. Cela avait lentement dégénéré au fur à mesure que les aristocrates se rendaient compte qu'il était plus facile de payer quelqu'un pour tuer l'autre dans son sommeil que de l'affronter loyalement. Désormais le duel n'était plus qu'un passe temps de courtisan et bien peu comprenait toutes les subtilités qu'il avait pus receler. Et les chevaliers comme Bathelm avaient dus se faire, par exemple, notaire. Les plus prestigieux avaient réussit à se faire entretenir un temps par quelques familles mais c'était désormais révolus.

Bathelm vint se camper devant le portail et attendit. Comme toujours, il possédait l'épée à la ceinture, mais cela ne gêna aucunement le garde de la demeure qui vint lui ouvrir accompagner d'un serviteur. Qu'est-ce qu'un vieux chevalier aurait pus faire contre un fusil automatique de toute façon. Bathelm jeta un regard méprisant sur l'arme. Ça ce n'était pas nouveau, évidemment, mais il trouvait toujours ce genre d'équipement bas et méprisable. Seule les armes blanches méritaient selon lui la moindre estime. Enfin, il laissa échapper un discret soupir et suivit le domestique à l'intérieur de l'hôtel particulier. Le gravier de la cour crissa sous ses bottes puis il pénétra dans le hall du bâtiment. Comparativement à ce qu'affichait certains pontes de la trempe de Hock, l'endroit était relativement simple. Il affichait bien sur une certaine richesse mais pas de la façon outrancière qu'avaient l'habitude de le faire la majorité des aristocrates. Les murs semblaient d'ailleurs étrangement vide aux yeux de Bathelm.
Évidemment, pas de portraits des aïeux ou des descendants, se fit-il la réflexion.
A l'exil répondait rarement le respect, et Hock n'avait jamais eu de descendants. Cela étant ils ne s'attardèrent pas dans le salon et le domestique le mena jusqu'à l'étage, le guida dans quelques couloirs où il était sûr de ne pas arriver à se repérer. Ces hôtels particuliers étaient de vrais labyrinthes, construits dans des bâtisses généralement ancienne et ré-arrangés comme il était possible. Les couloirs devaient parfois contourner un mur porteur, les pièces affichaient toutes sortes d'angles étranges. Mais au moins, cela donnait un certain cachet à la demeure, loin des nouveaux manoirs où des pièces ridiculement longue et plus haute encore affichaient une fadeur mal camouflée sous une montagne de dorure.

Finalement, le domestique le conduisit dans un petit salon, où quelques fauteuils de cuir et plusieurs bibliothèques attendaient. Une large vitre permettait aux visiteurs de profiter de la vue sur la basse-ville. Bathelm se dit que bien peu d'invités qui passaient par là ne devaient s'en soucier, et lui-même n'accorda aucun intérêt aux quartiers de la roture, et encore moins à ceux des Natifs, que l'on pouvait discerner écrasés dans les anciens marécages, massés le long du fleuve ou bien encore tassés contre les quartiers industriels dont les hautes usines émergeaient fièrement du tapis urbain qui recouvrait le vallon.
Au moins Hock savait recevoir, puisqu'un flacon d'un millésime de la région trônait sur une petite table, ainsi qu'un verre qui ne demandait qu'à servir. Ainsi mis à disposition, Bathelm devina déjà l'évidence dont s'apprêtait à l'entretenir le domestique.

-Monsieur Hock ne pourra vous recevoir dans l'immédiat, il vous prie d'excuser ce retard imprévus et sollicite votre patience, il n'en aura pas pour longtemps.

Bathelm congédia le serviteur d'un geste de la main et alla s'asseoir dans l'un des fauteuils, où il se servit un verre de vin et attendit patiemment, explorant du regard la bibliothèque de la pièce. Nombre de titre dont il n'avait jamais entendus parler. Certains rayons possédaient des rangées entières d'ouvrages à la reliure qui sonnait étrange, loin du cuir de l'habituelle. En se levant pour en examiner un, Bathelm comprit qu'il s'agissait là de livres hors-monde. Il leur jeta un regard noir et retourna s'asseoir. Il aurait du s'y attendre, mais il était quand même un peu surpris qu'Hock laisse de tels objets dans un salon de réception. Mais le magistrat avait toujours sut se faire provocateur, tout en subtilité néanmoins. Un invité peu attentif ne l'aurait sans doute jamais remarqué.
Plusieurs minutes s'écoulèrent, lentement, rythmés par les bruits des domestiques qui s'agitaient dans les autres ailes. Puis il entendit une porte s'ouvrir et vit passer deux hommes en costume militaire devant la porte du salon. Il se leva pour saluer celui qu'il reconnut comme le préfet de la ville ainsi que celui qui l'accompagnait mais dont l'identité lui était inconnus. Tous deux lui rendirent un salut polis.
A leur suite apparus un nouveau domestique qui l'invita à le suivre. Sa livrée était différente du précédent, qui portait les habituels frusques de couleur, chatoyants, dont le but était surtout d'impressionner les éventuels rivaux par l'argent que l'on pouvait y mettre pour de simples domestiques. Une tradition un peu idiote, même Bathelm en convenait. Mais celui-là... Il ne portait qu'un grand manteau noir, maintenus fermés par deux rangées de boutons dorés sur chacun desquels était gravé quelque sceau inconnu, qui lui descendait quasiment jusqu'au pied, fendus pour laisser plus libre de ses mouvements. Hormis cela, il avait le crâne rasé. Le chevalier n'hésita toutefois pas un seul instant à le suivre dans le couloir puis à une nouvelle porte avant qu'on ne le fasse entrer dans le bureau de Hock.

Il fronça le nez. Non pas que le bureau diffère tant que cela du reste de l'hôtel, la décoration y restait relativement sobre et discrète, comme il seyait selon le chevalier à un espace dédié au travail... mais elle était trop exotique à son goût. Hock avait voyagé dans l'espace, chose relativement peu fréquente sur ce monde, mais contrairement à la plupart il en avait ramené une certaine fascination. Et la brusque ouverture avec le reste de l'Imperium des dernières dizaines lui avait permis d'exposer cette fascination au grand jour. Son statut de magistrat impérial en était déjà un bel exemple, ainsi que son investissement dans les industries d'exportation qui s'était formée -et lui avait assurer ses revenus- mais il l'exprimait aussi de manière plus visible.
Ainsi la majorité des meubles du bureau était fait en métal ou en plastique, deux matériaux qui certes existaient sur la planète, mais n'était guère du goût de la décoration classique. A cela s'ajoutait divers œuvres d'art venus d'autres planètes, et mêmes murmurait-on d'autres races : des tableaux représentait des paysages étranges que Bathelm n'aurait sans doute jamais l'occasion de voir, tandis que certains ne ressemblait littéralement à rien, vulgaire amas de couleurs sans signification. N'importe quel maître peintre de la cité se serait sans douté évanouis en voyant de tels œuvres, puisqu'il fallait les appeler ainsi.
Hock lui-même, enfoncé dans son fauteuil, était au diapason de cette ''culture''. Ainsi, alors qu'il devait avoir le double de l'âge de Bathelm, il paraissait trente ans de moins, son visage creusés des quelques rides de l'homme tout juste mûr abritant deux yeux aux reflets carmin -une lubie esthétique- et surmonté d'une longue chevelure noir de jais retenus en arrière par une queue de cheval alors que les hommes portaient traditionnellement des cheveux courts et arboraient volontiers le blanc associé à la sagesse. Bathelm lui-même ne faisait guère exception, les restes de ses cheveux soigneusement lissé en arrière, d'un blanc d'ivoire, qui laissaient dégarnis un front plissé par les années sous lequel deux yeux gris n'avaient rien perdus de leur vitalité.

-Ah, sir Bathelm, enchanté de vous recevoir. Désolé de vous avoir fait attendre, un incident dans l'une de mes usines ce matin, quelques formalités se devaient d'être rapidement réglées.
-Merci de cet accueil. Il me semblait bien avoir reconnus le préfet.
-C'est exact, lui et le commissaire des affaires terroristes.

Bathelm haussa un sourcil, auquel Hock répondit d'un sourire conciliant.

-Ce n'était qu'une simple précaution, rien n'indique autre chose qu'un petit débordement de la sécurité pour le moment.
-Certes. Maintenant, si vous le voulez bien, attaquons l'affaire qui m'amène. Ma journée risque d'être chargée.
-Je comprends. Le décès de mon cousin doit faire remuer beaucoup de choses.

Bathelm eut un petit grognement. Hock était vaguement lié à la famille Skarn, la plus riche famille du continent, dont le dernier représentant était mort l'avant-veille. Assassiné même. Tout se perdait. En tant que l'un des notaires employés par la richissime famille, il devait se charger de toutes les questions d'héritage. Question épineuse, puisque la famille Skarn se voyait dépourvus de tout héritier direct. D'ici quelques mois les seules traces qui resteraient d'elle se réduiraient à quelques formulaires dans d'obscures administrations.
Déjà, les vautours voulaient s'emparer du butin. Des cousins, beaux-frères, oncles et filleul en tous genres venaient assaillir les notaires. Si nombre d'entre eux était éconduits rapidement, leurs liens beaucoup trop vague pour figurer sur un quelconque testament, la complexité généalogique des grandes familles laissait tout de même une quinzaine de prétendants sérieux entre lesquels devrait se répartir l'héritage. Cela dit, on pouvait sans trop se risquer affirmer que certains d'entre eux ne verraient plus la lumière du jour longtemps.
Et le chevalier parierait que Hock n'en ferait pas partis. Il n'était qu'un cousin lointain du père de l'héritier, mais avait au cours des dernières années tissés de nombreux liens économiques avec la famille Skarn et s'était attirés les bonnes grâces de ses derniers membres. S'il n'était pas le favori face à des personnes comme un cousin direct, il pouvait prétendre à quelques richesses.

-En effet. Après une première estimation, il s'avère que vous restez dans les héritiers potentiels d'une partie du patrimoine Skarn, puisque plus aucun représentant direct de cette maison n'est en vie. Je suppose ne pas avoir besoin de vous rappeler l'étendue de ce patrimoine ?
-Épargnez-vous cette peine, je devine que vous aurez bien trop à le répéter dans les prochains jours.
-Très aimable à vous. Bien, pour commencer avez-vous besoin de quelconques précisions ?
-Puis-je savoir quels sont les autres héritiers potentiels ?
-Non. Autre chose ?
-Pas pour le moment.
-Bien, dans ce cas commençons les formalités...

Bathelm ramena à lui la sacoche qu'il tenait et en sortie plusieurs liasses de documents. Lui et Hock devisèrent longuement, planifiant rendez-vous et rencontres, discutant des premiers termes de l'héritage et de la part que comptait revendiquer le magistrat. Si tous deux semblaient parfaitement calme, le ton parfois acéré qu'ils prenaient laissait tout à penser qu'il était en conflit ouvert. Finalement, alors que l'après-midi était déjà bien avancé, Bathelm récupéra ses documents, en laissa quelques uns à Hock et salua ce dernier avant de quitter le bureau puis le manoir. Hock le regarda s'éloigner à travers la baie vitrée teinté puis se dirigea d'un pas las vers sa réserve d'alcool, pour se servir une liqueur de premier choix. Dès fois, il en venait à respecter le chevalier et s'estimait chanceux de ne pas l'avoir comme rival.

-Un personnage intéressant que ce chevalier.

Hock se retourna vers celui qui venait de parler. Il s'agissait de l'homme que Bathelm avait pris pour un domestique. Il était bien moins protocolaire, assis dans l'un des fauteuils en cuir de Hock, les jambes négligemment croisé et son visage débarrassé de l'expression absente des serviteurs. Son regard scrutait Hock, qui comme à chaque fois ne pus retenir un frisson dans son dos. Il reprit contenance et leva son verre en direction de l'homme.

-Un verre ?
-Non merci.
-Comme vous voulez. Et donc, je suppose que vous voulez m'entretenir de Bathelm ? Le magistrat haussa les épaules et vint s'asseoir en face de l'homme.
-En effet. Il ne posera pas de problèmes ?
-Non, il n'est qu'un notaire. Il ne m'aime pas parce que je représente l'évolution qu'il ne veut pas accepter, mais la loi et son propre code lui interdisent toute intervention. Il va bien essayer de nous ralentir, mais il ne pourra rien faire de significatif.
-Vous le croyez homme de parole ?
-Il l'est. La tradition chevaleresque est très présente dans notre civilisation. Et il est sans doute aucun le meilleur exemple. Il fait passer son devoir avant son ressentit personnel. La seule chose qui pourrait m'inquiéter serait de devoir croiser le fer avec lui.
-Je croyais qu'il respectait la loi.
-La loi sur les duels n'a jamais été abrogé, il pourrait sans peine trouver un prétexte à cela et venir me défier au champ d'honneur. Refuser ne serait pas impossible, cela dis, mais me ridiculisera s'il présente bien la chose.
-Vous me dites qu'il n'a qu'une parole puis vous sous-entendez qu'il pourrait trouver un prétexte pour vous tuer ? Vous n'avez pas l'impression de vous contredire ?
-La loi l'autorisera à me défier s'il parvient à me mettre dans l'offense. Le concernant, il me considère déjà comme une offense à notre culture, et je ne doute pas un instant qu'il adorerait l'idée d'un duel contre moi. Mais pour l'heure, il serait débouté et ridicule de me défier.
-Je comprends. Hors de question de lui laisser l'opportunité de faire cela dans ce cas. Peut-être faudrait-il envisager quelques méthodes...
-Trop risqué, les chevaliers sont très bien considérés au vu de la société, et plus encore lorsqu'ils sont devenus notaire, clerc ou fonctionnaire. Bathelm n'est pas un sale gosse de riche dont la mort n'entraîne que l'appât du gain de la part d'une foule d'intrigants...
-Dont vous.
-C'est avant tout un homme d'honneur, très bien considéré par ses pairs et par l'aristocratie. Non, l'éliminer ne pourrait que nous desservir, je sais ce que je fais.
-Je n'en doute pas. Et vous ne pouvez pas envisager de l'affronter en duel ?
-Si j'avais une chance de gagner, oui.
-Allons, vous avez reçus une formation non ? Et c'est un vieillard.
-Il a passé la moitié de sa vie à apprendre à se battre. Et je ne doute pas un instant qu'il suit quelques cures rajeunissantes. Simplement la vieillesse est symbole de sagesse, et la plupart de mes confrères l'arborent volontiers. La fausse jeunesse n'est guère apprécié j'en ai peur.
-Bien. Si vous êtes convaincus qu'il ne posera de toute façons pas de problèmes.
-Pas seul, il n'a pas de réel possibilité. Et il existe bien des moyens de se charger des autres.
-Vous en craignez ?
-Le Baron Cairn peut-être, c'est un intriguant, qui possède beaucoup de droits à l'héritage. Mais il est vieux et fatigué...
-Parfait. Puisque tout se présente pour le mieux, je vais vous laisser, je dois faire quelques rapports pour l'Administratum. Vous savez ce que c'est.
-En effet. Je ne vous retiens pas plus.
-Nous nous reverrons vite je pense, laissa tomber l'homme tandis qu'il s'éloignait, les bras croisés dans ces manches larges.

Lui aussi quitta rapidement le manoir, pas seul toutefois puisque deux hommes en armure de plaques l'accompagnait au dehors, jusqu'à un véhicule antigrav stationné dans la rue qui s'éleva sans un bruit pour se diriger vers les locaux de l'Administratum, dont la basilique impériale dominait l'une des collines de la ville. A cette heure le Soleil était déjà passé derrière la bâtisse et ses rayons se découpaient des les statues saintes et à travers les vitraux, faisant ressortir les arches élancés de l'architecture.
Hock prit le temps de finir son verre avant de se lever et de regagner son bureau. Il tira un tiroir et en sortit plusieurs liasses de billets. Il les recompta soigneusement, attrapa une boîte à proximité et les y rangea, avant de l'emballer de papier quelconque. Il appela l'un de ses coursiers, lequel se présentât aussitôt. Il récupéra le paquet et un simple « Adresse habituelle » avant de s'incliner et de quitter aussitôt le bureau.
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Tenkaranpu
La chienlit c'est lui!
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 28 Nov 2012 - 21:38

Citation :
Cela avait lentement dégénéré au fur à mesure que les aristocrates se rendaient compte qu'il était plus facile de payer quelqu'un pour tuer l'autre dans son sommeil que de l'affronter loyalement. Désormais le duel n'était plus qu'un passe temps de courtisan et bien peu comprenait toutes les subtilités qu'il avait pus receler.
Ils pourraient vivre une existence intéressante de par son intensité, mais maintenant ils crèvent comme des chiens la gueule ouverte. Bien fait ! :banzai:
Toute ma sympathie pour ce pauvre Bathelm.


Citation :
Qu'est-ce qu'un vieux chevalier aurait pus faire contre un fusil automatique de toute façon. Bathelm jeta un regard méprisant sur l'arme. Ça ce n'était pas nouveau, évidemment, mais il trouvait toujours ce genre d'équipement bas et méprisable. Seule les armes blanches méritaient selon lui la moindre estime.
L'épée du vieux chevalier à l'avantage à moins de quatre mètres. Si le garde était pénétré de la science des arts martiaux, il resterait hors périmètre. A la différence, le vieux Chevalier a dut se développer pour survivre aux contraintes des armes modernes, il le sait donc d'instinct et d'intellect.


Citation :
Les murs semblaient d'ailleurs étrangement vide aux yeux de Bathelm.
Évidemment, pas de portraits des aïeux ou des descendants, se fit-il la réflexion.
A l'exil répondait rarement le respect,
Certes ! Souviens-t-en, car l'amertume vaut parfois le sel et le sucre, tu en auras peut être besoin bientôt. ;)


Après la mise en bouche qui donne le ton, c'est un passage où on montre les couleurs. Classique mais efficace !
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Jarlaxle
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 28 Nov 2012 - 23:07

"L'épée du vieux chevalier à l'avantage à moins de quatre mètres. Si le garde était pénétré de la science des arts martiaux, il resterait hors périmètre. A la différence, le vieux Chevalier a dut se développer pour survivre aux contraintes des armes modernes, il le sait donc d'instinct et d'intellect."

Certes, la rigueur aurait dus me faire préciser 40 fusils d'assaut :noel: Au bas mot.
Qui plus est le garde n'est jamais prêt de Bathelm, c’est un domestique qui escorte celui-ci. Le garde ouvre la porte et surveille la propriété.
Si je dis que l'épée n'est pas une menace, c'est qu'elle ne l'est pas, en tout cas pas pour le maître des lieux.

Mais merci quand même du commentaire :p
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeVen 30 Nov 2012 - 12:34

Sympathique ma foi, même si je ne sais pas encore quels sont les persos que l'on suivra de manière active, néanmoins c'est agréable à lire, continue! :ok:
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Jarlaxle
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeSam 1 Déc 2012 - 19:21

Chapitre II :

Le brouillard se dissipa lentement, une lumière diffuse s'immisçait révélait progressivement des formes sans signification première. Elle cligna plusieurs fois des yeux et les formes s'affinèrent, révélant la charpente d'un quelconque immeuble des quartiers commerçants. Elle porta une main à son front et décida de rester encore un moment allongée. Du dehors lui parvenaient les bruits de la cité, les cris des marchands qui appâtaient le chaland pour essayer de leur vendre leur marchandises, celui des véhicules qui essayaient tant bien que mal de progresser tandis que leurs chauffeurs s'invectivaient avec force imagination et le brouhaha incessant de la foule en mouvement. A la lueur du jour qui se glissait dans sa planque, tirant sur l'orangé, elle estima qu'il devait être bien avancé dans l'après-midi. Un coup d’œil à la montre qu'elle portait au poignet lui apprit qu'elle avait raison.

Elle se releva doucement, glissant ses jambes hors des draps. Elle voulut se lever mais son pied gauche lui fit mal. Palpant doucement les articulations elle crut y déceler une bosse anormale. Elle avait du se tordre un muscle la veille et ne pas le sentir. Elle se rappela vaguement une tuile mal ajustée sur l'un des toits. A ce moment elle n'y avait guère prêté attention, tous ses muscles lui étaient de toutes façon douloureux de leur forte contribution. Décidant qu'elle ne pouvait quand même pas rester allonger jusqu'à ne plus avoir mal, elle banda sommairement son pied et le reposa au sol, serrant les dents avant de faire quelques pas.
Elle jeta un œil par la fenêtre, vers les Hauteurs et tous ses manoirs qui étincelaient sous les rayons du soleil déclinant. Elle eut une moue de mépris et se détourna de la vue, pour poser son regard sur le miroir, seul objet dénotant d'un quelconque confort dans la mansarde. Elle faisait une certaine peine à voir, deux ou trois ecchymoses peu visibles sous sa peau chocolat la faisaient se tenir un peu voûté, et ses cheveux roux s'égayaient en tous sens. Elle haussa les épaules et se mit à la recherche de ses vêtements, qu'elle avait dispersé au hasard, fatiguée qu'elle était. Moins d'une dizaine de minutes plus tard, elle avait retrouvé l'ensemble à l'exception d'un bas qui semblait avoir disparus. Elle tendit la main vers le fourreau d'une dague, qui vint s'accrocher dans son dos, manche vers le bas, dissimulé sous son chemisier brun.
Elle réajusta sa coiffure et daigna s'examiner de nouveau dans le miroir. Sa toilette restait trop sommaire pour faire réellement bonne impression, mais elle avait déjà retrouvé une apparence plus correcte. Elle aurait même pus être jolie, malgré ses formes peu dessinées, si elle n'avait été si musclé. Ce n'était pas flagrant, mais quelque chose dans sa largeur d'épaule, dans le galbe de ses jambes et de ses bras, dans sa seule façon de bouger, donnait cette impression qui lui déplaisait. Et ce n'était pas les pantalons et vestes informes dont elle devait s'attifer qui allaient arranger la chose. Pour un peu, sans ses longs cheveux et la courbe appréciable de ses hanches, on l'aurait prise pour un homme un peu maigrichon.
Et puis il y avait ses yeux. Bon dieu, qu'elle haïssait ses yeux. Le droit était d'un vert d'émeraude, tandis que le gauche luisait comme de l'or en fusion. Si les poètes et autres fantaisistes auraient pus y consacrer des vers grandioses, elle n'y voyait rien d'autre que la cause même de toute sa condition. Elle se détourna de cet examen avant de s'énerver et quitta la petite pièce, s'engageant dans un escalier en colimaçon dont les marche traîtresses ne songeaient qu'à vous jeter au bas, hurlant des craquements incompréhensibles pour signifier leur mécontentement de ne pouvoir le faire.

Elle posa finalement dans l'arrière-boutique d'un horloger. La petite boutique atypique ne voyait passer que peu de clients, qui généralement ne s'y attardaient pas. L'artisan faisait surtout des commandes individuelles, et les appareils variés qui ornaient les murs n'étaient pour la plupart destinés qu'à faire joli. Les clients avaient tendance à ne pas accorder de crédit sans cela. L'artisan, pour sa part, s'en moquait bien et semblait vraiment heureux de créer ces petites œuvres d'art, n'accordant que peu d'importance au reste, plus encore avec son âge qui s'avançait. Il n'accordait pas grande importance à son unique locataire, et ne s'étonnait pas vraiment de la voir souvent sortir de son bâtiment mais rarement y entrer. Plus probablement, il ne le remarquait pas.

-Enfin réveillé mademoiselle Vic' ?
-Oui, j'ai eu une nuit agitée.
-J'en doute pas un instant, bonne journée, pour ce qu'il en reste.

Viconia quitta la boutique sans plus de cérémonie. Finalement, peut-être qu'il le remarquait. Peu importait après tout. Elle marcha dans la rue, se dirigea vers le port de la ville, descendant la rue en pente douce. Elle traversa un marché aux épices, et laissa un instant les odeurs lui monter à la tête. Phàruun avait toujours été une cité marchande, encaissé dans l'estuaire du plus grand fleuve du continent nord. Elle échangeait aussi bien avec les mines du sud, les plaines céréalières ou les côtes tropicales, et même un peu avec l'Archipel. Aussi toutes sortes de marchandises passaient par ses quais, toutes plus ou moins tolérées, plus ou moins bien acceptées.
Néanmoins, elle ne s'attarda pas lorsqu'elle remarqua qu'on la dévisageait étrangement, entre méfiance et mépris. Un duo de bourgeoise passa à côté d'elle, dans leur robes neuves et émanant une douce odeur fleurie, feignant ne pas la voir. Elle porta inconsciemment la main au bas de son dos et se força à la ramener devant elle, grinçant légèrement des dents. Elle reprit sa marche et quitta la place, encore couvée de quelques regards.

Les rues ne descendaient presque plus, elle avait pour ainsi dire atteint le fond, ce qui avait été voilà plusieurs millénaires sans doute, des marécages sauvages, que seul d'incessants travaux d'assèchement avaient permis de rendre vaguement habitable. Et ceux-là même qui avaient permis un tel exploit se traînaient désormais dans les reliquats de leur œuvre, dans les ruelles lourdes d'humidité et infestés d'insectes, où la moitié des bâtiments se dressaient sur pilotis pour éviter l’inondation tandis que l'autre voyaient leur bois lentement pourrir, où la moindre pluie pouvaient transformer le sol en un tel bourbier que l'on s'y enfonçaient jusqu'au genou.
Il s'agissait néanmoins de la plus courte route pour rejoindre le port, pour tous ceux qui n'avaient pas les moyens d'emprunter la ligne de monorail, ou qui pour toute autre raison préféraient l'éviter. Ainsi l'endroit était-il devenus un terrain de passe-droit, où se retrouvaient la plupart des réseaux de contrebande et ceux qui pour une raison ou une autre étaient désireux d'échapper au regard de la loi. Pourtant l'endroit n'était guère accueillant avec les étrangers et Viconia dut éviter plus d'un crachat alors même qu'elle semblait identique à tous ceux qu'elle croisait. Seule sa tenue, qui avait parus misérable dans les quartiers marchands, semblait ici témoin d'une quelconque richesse. Rien d'impressionnant, mais assez pour révéler les serviteurs des bourgeois.

Elle ne s'attarda pas plus qu'il n'était nécessaire, et traversa l'endroit sans halte pour finalement atteindre le port. L'humidité s'y faisait plus agréable, moins moite et plus rafraîchissante, et un grand nombre d'insectes harcelaient les passants, à l'approche des heures nocturnes. Les bâtiments ressemblaient beaucoup aux précédents, les même masures vieillis par le climat et dont les senteurs de bois pourris chatouillaient les narines trop délicates. Viconia, elle, ne le sentait plus depuis longtemps. D'abord parce qu'elle avait grandis ici, ensuite parce qu'elle avait été habitué à des odeurs bien plus pénétrantes que celle-ci.
Elle bifurqua dans quelques ruelles et déboucha finalement sur l'une des voies principales du quartier. Elle était encombré par la foule de marins qui se dirigeaient vers les tavernes, d'ouvriers qui transportaient les dernières caisses de marchandises vers leur destinataire ou les bateaux que la prochaine marée emmènerait, de commerçants et capitaines qui se dirigeaient vers le monorail pour rejoindre des endroits plus à leur aise et d'un certains nombres de prestataires de service qui peuplait le port, du tavernier à la fille de joie en passant par le truand des bas-fonds.

Viconia n'eut guère d'autres que de se laisser un peu entraîner par la masse avant de réussir à rejoindre le bâtiment qu'elle voulait. Façade simple, relativement bien entretenue, une lumière chaude commençaient à se répandre par les fenêtres du rez-de-chaussée tandis que la nuit tombait doucement. Les fenêtres des niveaux supérieurs étaient calfeutrées derrières d'épais rideaux. Une enseigne qui battait au vent indiquait le nom : Le Lotus. Elle poussa la porte du bâtiment pour pénétrer dans la taverne, et se dirigea vers le bar qui en occupait toute la longueur, où s'accoudaient des hommes de divers horizons, de divers couleurs de peau, la plupart absorbé dans la contemplation de leur verre. Viconia laissa un œil glisser sur le reste de la salle. La majorité des tables étaient encore vides mais quelques groupes avaient déjà investis les lieux, certains jouaient aux cartes, d'autres discutaient à voix plus ou moins basses, sans doute à se raconter quelques histoires de marins. D'ici quelques heures la salle serait bondé, remplis d'hommes à moitié ivre pour la plupart. Elle comptait bien profiter de l'endroit avant.
Elle vint s'asseoir sur un tabouret et accosta la serveuse, lui demandant la spécialité locale, un espèce de distillat de céréales importé des plaines du Nord. Sans doute l'une des boissons les plus fortes que l'on pouvait trouver dans le quartier, sans se tourner vers les mélanges étranges de l'Archipel. Un verre glissa jusqu'à elle, contenant un liquide à la couleur ambre, légèrement sirupeux. Elle glissa un billet dans la main diaphane que lui tendit la serveuse, puis porta la boisson à ses lèvres. Le liquide coula dans sa gorge, embrassant son palais au passage. La saveur amer, douce, roula en bouche et les enceintes du bar crachotait une nouvelle musique.

La nuit était désormais tombés, quelques traînes oranges zébraient encore l'horizon tandis que le soleil disparaissait sous l'océan et que ,comme si elle ne voulait pas laisser ce monde sombrer dans la nuit, l'une des trois lunes faisait son apparition, se dessinant délicatement parmi le ciel d'encre. Il n'y avait aucun nuage, chassés par le vent durant tout l'après-midi et tandis que celui-ci retombait une douce tiédeur s'installait dans les rues et sur la ville. C'était le moment parfait pour sortir, alors que les journées de travail de la plupart étaient déjà largement finis, l'on profitait de l'instant pour se retrouver entre amis autour d'un ver.
Le Lotus ne faisait pas exception et de nombreuses tables avaient été sortis dehors pour permettre au client de s'y installer. L'intérieur était totalement remplis et les éclats de voix ou de rires ponctuaient le fond sonore ou la musique peinait à se faire entendre. Les serveurs peinaient à satisfaire toutes les demandes qui affluaient, plus encore par les soucis que commençaient à poser les clients eux-même. Entre les mains baladeuses et les ivrognes un peu trop accrocheurs, les serveuses refusaient pour ainsi dire de quitter la protection du bar et accueillaient les clients de leur sourire affable, de leur peau clair et de leurs yeux rieurs, le plus souvent bleu ou marron. Quant aux serveurs... L'un d'eux étaient en train de se faire rouer de coup, replié en position fœtale sur le sol, par deux marins un peu avinés. Il saignait du nez, des lèvres et d'une arcade sourcilière. Son nez était sans doute cassé d'ailleurs, au vu de sa position bizarre. Un anneau de fer lui perçait l'oreille droite. Des ecchymoses parcouraient ses bras noirs, peu visibles mais bien présentes. Il ne pleurait pas, ne gémissait même pas de douleur alors qu'on coup venait le cueillir dans l'estomac.
« Oh, ça va, il a eu son compte. »
Le patron venait d'intervenir. C'était un type grand, large d'épaule, sans doute un ancien militaire. Il était suffisamment musclé pour calmer la plupart des personnes, et faisaient assez de démonstration de tir pour refroidir les autres. Les deux marins laissèrent là le serveur, l'un d'eux lui cracha dessus pour la forme, et les différents spectateurs de la scène s'en retournèrent à leur première occupation. Le serveur se releva rapidement et se replia vers les cuisines, à moitié voûté, trébuchant en chemin sur un pied malicieusement tendus en travers.

Le patron de la taverne le surveilla du regard, puis s'en retourna vers le bar. Il sembla alors apercevoir Viconia, eut un haussement de sourcil peu appréciateur, puis se dirigea vers elle. Il vint se planter devant ses yeux, et elle sembla d'abord l'ignorer tandis qu'il attrapait un quelconque verre à proximité et se servit un peu d'amasec. Il s'accouda au comptoir et daigna finalement parler.

-Bordel, je croyais t'avoir dit de pas te pointer là Vic'.
-J'avais envie d'un verre Dan, tu sers encore tout le monde, non ?
-Justement non, on ne sert pas les esclaves je te rappelle.

Viconia grinça des dents et porta négligemment deux doigts à son oreille droite, ou un petit anneau d'argent y était attaché. Elle laissa retomber ses boucles rousses dessus, le dissimulant à la vue de tous.

-Bah, personne ne l'a remarqué.
-Ouais, jusqu'à ce qu'un agent se pointe et fasse une petite tournée de vérification. Tu sais comment ils m'apprécient, tu pense qu'il m’arriverait quoi s'ils te trouvaient ici ? Et tu pense qu'il l'apprécierait ?
-Ça va, je vais me casser.
-Pas maintenant, je te fais passer derrière et tu te barreras quand tu le voudras.
-Parce que derrière j'ai le droit d'y être ?

Dan se releva en arborant un petit sourire en coin.

-Tu penses vraiment que si un agent débarquait derrière il s'interrogerait sur ton oreille ?

Et il se détourna d'elle, repartit dans une tournée du bar, saluant au passage quelques habitués, plus agréablement. Il glissa quelques mots à l'oreille d'une serveuse en désignant Viconia d'un doigt, l'air de rien. La serveuse hocha la tête, prépara les consommations qu'on lui avait demandé et cela fait quitta l'arrière du bar pour se diriger vers Viconia, évitant au passage les mains qui folâtrait.

-Madame, commença-t-elle avant d'apercevoir ses yeux, euh... je veux dire... Suivez-moi je vous pries.

Viconia eut un grognement et suivit la silhouette fluette dans la foule. Elle ignora quelques furtives caresses, se hérissa lorsqu'elle sentit une main claquer sur son postérieur mais se retint de faire quoi que ce soit, ce qui aurait inévitablement dégénérer, et reprit sa marche aussi décontracté qu'il lui était possible, tandis que plusieurs rires gras s'élevaient derrière elle. La serveuse la fit finalement sortir de la foule et la guida à l'étage. Celui-ci n'était qu'un long couloir, le long duquel s'alignait sans fantaisie des chambres où dormaient les clients trop ivres pour quitter les lieux -après avoir été soulagé de quelques crédits supplémentaires bien sûr-. La serveuse s'arrêta devant ce qui semblait une tapisserie parfaitement normale, bien que d'assez mauvaise qualité -et de mauvais goût aussi d'après Viconia-. Elle l'écarta et passa doucement son doigt sur les rainures de bois du mur. Elle repéra enfin ce qu'elle cherchait et appuya sur un nœud de bois, qui s'enfonça avec un petit bruit. Aussitôt un panneau glissa pour révéler un petit escalier qui descendait. La serveuse s'apprêtait à descendre lorsque Viconia l'arrêta d'une main sur l'épaule.

-C'est bon, je connais, vous en faites pas.
-Bien.

Elle repartit, s'éloigna le long du couloir. Viconia la suivit un instant du regard, avant de s'avancer dans le passage dévoilé, de tirer la tapisserie et d'abaisser une poignée. Le panneau se remit en place dans un frottement et elle descendit l'escalier. Elle arriva finalement dans une toute autre salle. Aussi grande que celle de la taverne, elle était bien moins peuplé. Une trentaine de personnes étaient allongées sur des canapés et des coussins disposés en rond autour de petites tables, et il en restaient encore plusieurs de libres. Au plafond flottait une épaisse fumée, aux couleurs variés suivant les endroits, qui émanaient des nombreux encens et des pipes des clients. Viconia se glissa entre plusieurs canapés avant d'en trouver un libre où elle s'allongea, s'enfonçant dedans.
Des serveuses, à la peau noire, allaient et venaient parmi les clients, apportant des verres, des bouteilles, des pipes, des appareils de verre d'où sortaient des tuyaux, de la drogue... Certaines d'entre elles étaient occupés à prodiguer des massages ou servaient de poupées à quelques clients. Viconia en appela une et lui demanda une pipe de lotus. La serveuse s'éloigna et la jeune femme se laissa aller à fermer les yeux, au son léger que le musicien, dans un coin, tirait de son instrument. Cela ressemblait à un piano, mais le clavier était remplacés par une dizaine de cordes, qu'il sollicitait aussi bien d'un archet que de ses doigts.
Lorsqu'elle rouvrit les yeux, se fut pour trouver Dan qui lui tendait une pipe d'où s'élevait quelques volutes à la couleur légèrement violette. Une manière comme une autre de savoir ce qu'il y avait dedans. Elle se redressa un peu et prit la pipe. Il lui tendit également un petit paquet emballé dans du papier.

-Y a autant que d'habitude ?
-Qu'est-ce que j'en sais moi, je l'ai pas ouvert.

Elle soupesa rapidement le paquet, l'agita un peu.

-Y a l'air.
-De toute façons, c'est pas comme si tu pouvais réellement te plaindre.
-Certes. Il n'a rien transmis d'autres ?

Dan fit sortis une lettre de son veston et la lui tendit.

-C'est arrivé dix minutes avant toi, guère plus. Pas la peine de te presser, c'est ma tournée.
-Quelle générosité. Tu me préparerais quelques grains ?
-Je te notes ça, on te l'apportera dès que ça sera près. Besoin d'autre chose ?
-Hum, si tu pouvais m'envoyer une masseuse.

Dan eut un petit hochement de tête et s'apprêta à repartir quand il se retourna vers elle.

-Et, désolé pour tout à l'heure, mais j'ai vraiment pas envie de m'attirer des problèmes en ce moment.
-T'inquiètes, je comprends, j'aurais dus venir ici directement.

Et il s'éloigna, la laissant seule. Elle posa le paquet, la lettre et la pipe sur la petite table face à elle, s'étira puis s'allongea. Elle reprit la pipe d'une main et aspira quelques bouffées de fumée. Elle était douce, légèrement chaude et parfumée. La drogue fit rapidement effet et elle se sentit soudain plus détendus, ses pensées vagabondaient et ses muscles de déliaient. La musique portaient ses songes en des mondes inconnus. Elle sentit des mains se poser sur ses épaules et tourna un peu la tête pour s'assurer qu'il s'agissait bien de la masseuse qu'elle avait demander. Rassurée, elle referma les yeux et se leva aller aux caresses de la drogue et de l'esclave. D'une main elle détacha quelques boutons de son chemisier et le fit un peu glisser sur ses épaules, pour apprécier le contact des doigts agiles sur sa peau nue. Dans le brouillard du Lotus, qui amplifiait doucement les sensations, chaque frôlement lui apparaissait une caresse délicate.

Lorsqu'elle émergea de nouveau, la soirée était encore bien plus avancée. La masseuse s'était retirée depuis sans doute un moment, lorsqu'elle avait deviné que sa cliente n'était plus tout à fait présente. Viconia se redressa doucement, et un courant d'air le long de son dos lui fit réajuster son chemisier. Elle avisa la petite table, sur laquelle un sachet contenant d'épaisses graines vertes avait rejoint ce qu'elle y avait déjà déposé. La pipe de lotus traînait au sol, éteinte. Ailleurs dans la salle, la plupart des clients étaient plongés dans leur transe droguée ou en train de se réveiller. Ils semblaient également moins nombreux que lors de son arrivée, de même que les serveuses, qui n'étaient plus que deux pour s'assurer de combler les éventuels besoins des derniers clients.
Viconia se releva, récupéra ses affaires et quitta la pièce, après avoir laissé un billet sur la table. Elle déboucha dans une ruelle sordide, qu'elle quitta rapidement pour reprendre les grandes rues du port. La nuit très avancée, sans doute même n'étaient-ils plus qu'à quelques heures de l'aube, avait chassé la foule et quelques groupes de marins allaient en chavirant d'un côté à l'autre, leurs jambes incertaines manquant se dérober sous eux. Quant à elle, elle reprit le chemin inverse de son arrivée.

Au détour d'une ruelle, elle déboula à proximité de deux hommes costauds, dont les silhouettes se découpaient à peine dans la pénombre de la rue. Elle ne vit pas ce qu'ils étaient en train de faire, mais elle ne s'arrêta même pas et poursuivit sa route, espérant qu'ils ne lui prêteraient pas attention.

-Hé, mais regarde ça.

Raté. Elle sentit les deux individus se rapprocher et fit volte-face, sur la défensive. L'un d'eux s'approchait d'elle, l'autre la contournait en quelques pas allongé. Elle aurait sans doute pus les semer, mais le lotus la laissait peu réveillée. Ils se rapprochèrent un peu plus et elle recula vers un mur.

-Et bien, on se promène, c'est pas très prudent tu sais.
-Un petit jouet comme toi ne devrait pas être seule dehors. Il me semble qu'ils ont pas le droit passer une certaine heure, non ?
-Ouais, sûr. Une fois j'en ai vus un se faire clouer au poteau de la grande place par les mains, il avait été surpris passer le coucher de la première lune.

Ils se rapprochèrent encore, alors que Viconia avait atteint le mur et s'y appuyait. Elle glissa une main dans son dos, attrapa de deux doigts le manche de la dague. Elle avait besoin qu'ils soient encore un peu plus près.

-Et la première lune est couché depuis longtemps. Qu'est-ce qu'on va pouvoir faire ? On devrait la dénoncer, mais peut-être que si elle se montre reconnaissante...

Le plus proche glissa une main dans ses cheveux. Il sentait la sueur, le mauvais alcool et la puanteur du sexe. Elle expira profondément. La main descendit doucement, glissa sur son épaule jusqu'à...

-Essayez et vous pouvez dire adieu à vos couilles !

Elle avait parlé entre ses dents, dardant un regard meurtrier sur les deux agresseurs. Surpris, ils baissèrent soudainement la tête vers l'entrejambe du premier, sur laquelle une bonne vingtaine de centimètres d'acier faisait peser une menace parfaitement claire. Avant qu'ils n'aient pus réagir, elle frappa vers le haut, du pommeau. Celui-ci frappa l'homme à la mâchoire, lui cassant sans doute une ou deux dents. L'autre n'eut pas le temps de réagir avant qu'un coup de pied précis de l'atteigne dans les côtes flottantes.
Viconia prit deux pas d'élan et prit appui sur les épaules du deuxième pour sauter par dessus les deux hommes avant de partir en courant dans la ruelle. Les deux crapules lui coururent après dès qu'ils furent en mesure de le faire, l'un d'eux dégaina un long couteau. Elle dérapa dans une petite ruelle.

-Ah ! Je connais l'endroit c’est un cul-de-sac, on va se la faire !

Ils tournèrent également à l'angle et se figèrent soudain. La ruelle finissait effectivement au bout d'une dizaine de mètres sur un haut mur parfaitement lisse. Malgré les bâtiments alentours, la troisième lune parvenait à projeter sa lumière sur l'endroit et peu d'ombres restaient. Il n'y avait ni bennes ni déchets. Pas une porte ne donnaient sur l'endroit. Aucune plaque d’égouts -inexistants par ici de toute façon-.

-Mais bordel où elle est passée ?

Viconia contempla ses deux poursuivants le sourire au lèvres, perchée sur le toit de la maison. Elle y était parvenue juste au moment où il débouchait sur le cul-de-sac et visiblement restait abasourdis de sa disparition. Elle aurait pus leur tomber dessus, là, maintenant. En deux coups ils seraient mort. Sans doute que personne ne se serait jamais inquiétés de leur sort. Mais ça n'aurait rien réglé de toute façon, d'autres auraient pris leur place.
Elle se releva et se détourna, continuant son chemin par les toits de la ville. Elle ne reposa pas pied à terre jusqu'à sa mansarde, se glissant de nouveau par la fenêtre. Elle se débarrassa de ses affaires, posa le paquet et l'enveloppe sur la table, glissa le sachet dans une petite sacoche de cuir qui traînait, se défit de ses vêtements qu'elle jeta en boule dans un coin, puis se glissa dans son lit. Elle regarderait la lettre demain.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 5 Déc 2012 - 14:59

Très agréable à lire je dois dire, cette Viconia m'a l'air tout à fait sympathique et cohérente avec ce à quoi tu nous as habitué ^^
Tu est d'inspiration Donjon et Dragon pour tes noms actuellement? Entre la ville qui fait penser à Pharaun et Viconia on sent un peu de drow là dedans!
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 5 Déc 2012 - 22:26

Viconia vient de "L'Ange de la Nuit" et pour le nom de la ville c'est totalement inconscient :noel:
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeJeu 6 Déc 2012 - 0:07

Chapitre III :

Viconia se réveilla alors que le soleil était déjà haut dans le ciel et que le brouhaha de la rue se répercutait sous son crâne comme un essaim d'insectes vengeurs, qui ne faisaient qu'amplifier son habituelle migraine matinale. Elle grogna et essaya vainement de s'enfouir la tête sous son chemisier qui traînait, pour étouffer les sons si désagréable, puis renonça rageusement et se releva. Elle avait la bouche pâteuse et lui semblait qu'elle n'avait rien mangé depuis une éternité. Elle s'habilla donc rapidement et descendit dans la rue pour aller prendre un petit déjeuner dans la première auberge pas trop cher qu'elle trouva. Une fois à peu près remise sur pied et vaguement consciente, elle remonta dans sa mansarde, s'allongea sur le lit et attrapa la lettre qui traînait sur l'unique meuble de la pièce.
Elle était encore scellée, marquée du même sceau que d'habitude -qui bien évidemment ne correspondait à rien, il s'agissait que l'on ne puisse pas identifier l'expéditeur en cas d'interception, si tant est que le coursier n'est pas parlé-, et était donc parfaitement authentique. Elle la décacheta soigneusement, en sortit une feuille qu'elle déplia pour y lire sa nouvelle mission. Elle haussa un sourcil. Ce n'était pas dans les habitudes du patron ce genre de services. Qu'est-ce qui pouvait bien le tracasser ? Elle haussa les épaules et replia la lettre avant de la glisser dans un repli de son vêtement. Son rôle n'était pas de remettre les ordres en question, mais de les exécuter. Et mieux elle le faisait, plus on lui foutait la paix.

Elle quitta son lit et s'approcha du meuble qui occupait le mur opposé. Elle tira l'un des tiroirs, puis se baissa pour en observer le dessous. Plusieurs armes blanches de diverses longueurs y étaient accrochés par quelques bandes de cuir. Elle en tira une autre dague, ainsi qu'un sabre d'abordage. De sous un autre tiroir, une demi-douzaine de couteaux de lancer vinrent rejoindre son équipement, ainsi qu'une corde d'escalade et un grappin simple. Elle ne savait pas vraiment à quoi elle allait avoir droit, alors mieux valait se montrer prudent. Elle poserait la plupart du matériel chez Dan de toute façon, il était suffisamment proche.
D'un coup sec elle retira le drap de son lit puis étendit la majorité de son équipement dessus, ainsi qu'une combinaison noire. Prenant garde à maintenir le tout aussi serré que possible, elle enroula le drap puis le serra à l'aide de quelques cordes. Elle enfila une veste de cuir usée et trop large puis attacha ses cheveux avant de les glisser sous le cuir. C'était désagréable, mais en remontant bien le col et en enfonçant une casquette sur sa tête, puis en remplaçant son pantalon par un modèle de toile, l'illusion était suffisamment convaincante pour qu'on ne s'y attarde pas. Elle s'aperçut dans le miroir et afficha une grimace de dégoût à l'intention de son reflet avant de descendre l'escalier.

Cette fois elle ne passa pas par la boutique, mais préféra s'éclipser par la ruelle de derrière, non sans entendre un petit ricanement derrière elle. Ou peut-être était-ce juste son imagination. Elle descendit entre les bâtiments, abrités du soleil de mi-journée qui dardait ses rayons sur la ville. Elle ne croisa pas grand monde. Quelques serviteurs ou esclaves, le plus souvent chargés de colis ou d'objets plus encombrants, qui remontaient ou descendaient sans se soucier d'elle. Tout au plus s'écartaient-ils légèrement, et elle esquissait alors un petit sourire.
Elle emprunta ces voies détournés pour rejoindre le quartier des Natifs, ne traversant qu'occasionnellement une artère bondé ou une place trop vaste pour être contournée aisément. Elle avait chaud, très chaud, mais préférait ne pas poser sa veste. En lieu et place de quoi elle prit un instant pour s'asseoir sur une caisse et tira d'une poche le petit sachet de la veille. Elle l'ouvrit et saisit entre ses doigts l'une des graines, de petites taille. Elle referma le sachet et le rangea, avant de glisser la graine dans sa bouche. D'un coup sec, elle l'écrasa entre ses dents et avala aussitôt le liquide acide et pâteux qui s'en échappa.
Elle réprima un haut-le-cœur et se força à avaler le produit. Un immense frisson se propagea le long de sa colonne vertébrale et tout lui parut soudain plus sonore. Le bruit des centaines de pas dans la rue non loin, les gouttes qui s'échappaient d'une canalisation à quelques mètres d'elle, le rats qui fourrageait dans la caisse sur laquelle elle était assise... ses propres battements cœurs résonnaient comme un gigantesque tambour à ses tempes.
L'effet se calma presque aussitôt et elle revint à la normale, seul ses tempes continuaient de battre à un rythme affolé. Elle sentait sa pupille dilaté et ses muscles lui semblaient raides. Elle se releva d'un bond et reprit sa marche, plus rapidement qu'avant. La sensation de chaleur avait disparus, au lieu de quoi des frissons la prenaient encore à chaque fois qu'elle posait un pied au sol.

Elle revint finalement au port, après avoir traversé un quartier quasiment désert, où seuls quelques enfants et les femmes chargées de les élever furent visibles, le reste de la population étant le plus certainement du monde occupé à travailler dans les manufactorum. A cette heure les ports étaient pris d'une toute autre fièvre que celle de la soirée et l'essentiel de sa population était répartis entre ceux qui récupéraient de la veille dans n'importe quel coin assez sombre pour ça et ceux qui s'occupaient sur les quais des bateaux qui arrivaient comme de ceux qui repartaient.
A l'exception de quelques camions de marchandises, les rues plus en profondeur était donc pour l'essentiel désertes. La monotonie venait seulement être brisé de temps à autre par un agent de sécurité qui effectuait sa ronde. L'endroit, pivot du commerce de la ville, se voyait entouré de multiples attentions quant à sa sécurité, sous la lumière du jour en tout cas. L'un d'eux passa à côté de Viconia sans lui accorder la moindre attention et elle disparut dans l'ombre des rues à nouveau. Elle parvint finalement à ce qu'elle cherchait, la façade arrière du Lotus. A cette heure de la journée, le bâtiment semblait désert et elle s'approcha d'une porte en bois simple. Elle frappa une fois, puis deux. Un petit panneau se déverrouilla pour laisser apparaître une œil, l'autre étant visiblement aux abonnés absents.

-Va dire à ton patron que Vic' l'attend.

Le panneau se referma et elle entendit vaguement quelqu'un s'éloigner derrière la porte. Elle regarda nerveusement autour d'elle. C'était sans doute le moment le plus délicat, si quelqu'un la surprenait maintenant il risquerait de se poser des questions. Si c'était un agent, elle était bonne pour une course rapide. La drogue continuait de battre à ces tempes, accélérait son rythme cardiaque. Il lui semblait entendre quelqu'un s'approcher mais le bruit s'évanouissait dès qu'elle tournait la tête. Elle essaya de se calmer, de se dire que ce n'était que des hallucinations provoqué par les graines, mais rien n'y faisait. De grosses gouttes de sueur perlait et descendaient le long de sa nuque, se glissait sous son chemisier pour glisser dans son dos. Un frisson la prit, et elle se surprit à claquer des dents.

Puis la porte face à elle s'ouvrit et elle se glissa à l'intérieur du bâtiment sans attendre, avant de la claquer derrière elle. Elle s'adossa au mur, reprit un instant son souffle, calma ses tremblements et regarda autour d'elle. Elle se tenait face à Dan, vêtus seulement d'un pantalon et d'un peignoir, ce qui laissait penser qu'elle le tirait du lit. Il avait les yeux rouges, les cheveux en désordre et des cernes immenses. Elle s'étonna de remarquer comment, lorsqu'il n'arborait son air affable de commerçant, il semblait plus menaçant, avec cette cicatrice qui lui barrait une joue et ses muscles développés.

-Bon alors, qu'est-ce que tu veux pour me réveiller aux aurores ?
-On est en plein milieu de l'après-midi.
-C'est quand la dernière fois que tu étais levée à cette heure ?

Touchée, elle n'insista pas sur le sujet et prit le temps de se débarrasser de son fardeau sur une table proche avant de continuer.

-J'aurais besoin de toi pour avoir une planque dans le coin, pour quelques temps.
-J'ai peut-être une chambre qui pourrait convenir, suis-moi. C’est lui qui t'as ordonné de t'installer là ?

Il traversa le salon, Viconia juste derrière lui, pour aller s'engager dans l'escalier qui montait à l'étage, tandis qu'un homme blanc, le borgne qui l'avait accueillis, redescendait et allait s'installer à une table, dans un coin de la pièce.

-Non, mais vu ce que j'ai à faire, ça me semble le plus simple.
-Je vois. Ça fait un bail que t'as pas exercé par ici, qu'est-ce qui se passe, il a à nouveau un problème avec un inspecteur des fraudes trop scrupuleux ?
-Non, même pas. En fait c'est vraiment étrange comme mission.
-Tu m'en diras tant.

Ils étaient au deuxième étage quand Dan ouvrit l'une des portes à leur droite et entra dans la pièce. C'était une chambre classique, un lit au centre, un petit coffre dans un coin, une armoire contre un mur. Pas de miroir. Viconia ne put s'empêcher de froncer les narines en entrant : ça puait le sexe. Cette partie de l'établissement servait de bordel, aussi la chose n'était guère étonnante, mais elle n'en demeurait pas moins une gêne. Dan dut remarquer son odeur puisqu'il désigna le coffre.

-Y a un peu d'encens là-dedans si tu veux.
-Je devrais réussir à supporter.
-S'toi qui vois. Je suppose qu'il vaut mieux éviter que les esclaves ne rentrent ici.

Si elle fut gênée par le terme, elle ne le montra pas. Elle était en tran de défaire son paquet et celui-ci se libéra d'un coup, répondant sur le matelas les armes, la combinaison et tout ce qu'elle avait emmener avec elle. Dan y jeta un coup d’œil circonspect, puis sortit de la chambre en parlant à voix basse.

-Ouais, je vais leur dire d'éviter la pièce...

Viconia referma la porte derrière lui et se laissa retomber sur le lit. Elle répugnait à se glisser sous ces couvertures, mais un nouveau frisson la convainquit de le faire. Ressortant l'enveloppe de sa veste, elle la déplia et la consulta à nouveau. L'écriture sévère s'alignait sans fantaisie, comme des caractères d'imprimerie, mais pourtant manuscrite. Elle se demandait parfois si c'était sa véritable écriture ou s'il s'agissait d'un quelconque camouflage.
Mais cette fois le contenu l'intriguait bien plus que la forme. Elle avait déjà eu à faire taire quelqu'un dans les quartiers industriels : un contremaître trop fouineur, un inspecteur trop honnête... Il y avait nombre de secrets là-bas qui se devaient d'être gardés enfouis. Mais assassiner un ouvrier, c'était une première. Konrad, donc. Il travaillait dans l'une des raffineries de la ville. A part ça elle n'avait pas grand chose, une vague adresse chez les Natifs, qui ne mènerait sans doute à rien de toute façon, et un portrait. Il avait la peau noire, un épais anneau de plomb à l'oreille droite, ce qui voulait dire qu'il appartenait à l'usine, et une tignasse de cheveux blonds qui masquaient presque des yeux vairons, gris et doré.

-Qu'est-ce que t'as bien pus faire pour que ta tête vaille si chère... Et surtout pourquoi moi ?

Il y avait bien des moyens de faire disparaître quelqu'un dans les quartiers des Natifs. Alors pourquoi faire appel à elle ? Elle n'était pas la plus efficace, pas pour ce genre de type que n’importe quel gros bras pouvait faire disparaître au fond de l'estuaire. Il devait y avoir une raison à ce choix, et elle était curieuse de la connaître. Elle jeta un coup d’œil par la fenêtre. Elle avait encore de nombreuses heures avant que la nuit ne tombe. Elle n'agirait que là. Débarrassant son lit de ce qui l'occupaient, elle tira les épais rideaux de tissus, tira le loquet de sa porte et s'affala sur le matelas pour se laisser gagner par un sommeil lourd de droguée.



Hock les entendit arriver depuis l'autre bout du couloir, aussi était-il déjà debout lorsque la porte s'ouvrit à la volée. Le préfet et le commissaire des affaires terroristes entrèrent dans la pièce. Le premier était un homme un peu petit, au ventre un peu trop rebondis pour passer encore pour un soldat de profession. Il venait d'une ancienne famille noble et avait compris que le meilleur moyen de garder sa place était de faire le moins de vague possible. Sous son autorité, les bandes de milices privés avaient gagnés en puissance, tant et si bien qu'en dehors des quartiers les plus neutres -le port en tête- la sécurité de la ville n'était plus qu'une formalité.
Le commissaire lui était un jeune homme énergique, qui se figurait pouvoir changer le monde sur la seule force de son caractère. Il avait le visage et les épaules carré, surplombant la plupart de ses interlocuteurs en hauteur. Ses yeux marrons luisaient d'une ruse et d'une fourberie qui contrastaient avec sa stature de force de la nature. C'était un ambitieux, qui briguait sans doute possible la place du préfet. Il avait bien compris les nouvelles règles et jouaient avec, ses agents étaient pour la plupart des mercenaires et des petites frappes qui exécutaient le moindre de ses ordres. Il commençait à se faire un nom parmi les nobles, et plusieurs avait d'ailleurs envisagé de l'attaquer pour racket avant de se raviser. Hock n'avait eu pas eu à faire à ces malversations pour le moment, bien qu'il en soupçonnait certaines. Ce fut le commissaire qui parla le premier.

-Encore une grève ! Ça ne peut plus continuer ainsi !
-Ferginson, ravis de vous revoir. Daignez prendre un siège et peut-être allez-vous enfin m'expliquer au nom de quoi vous vous donnez le droit d'intervenir ainsi dans mes affaires ?

Hock avait parlé sur un ton calme, mais tranchant. Il n'aimait pas ce jeune impudent, qui se mêlait de ce qui ne le regardait pas. Pire, il en devenait suspect, il avait commencé à le harceler dès la deuxième grève et n'en démordait plus, alors que la sixième venait d'éclater dans un manufactorum qui lui appartenait.

-Que vous le vouliez ou non, Hock, vous appartenez encore à cette ville et je suis censé y faire régner l'ordre.
-Vous ? Je croyais que telle était la tâche du préfet, vous n'êtes qu'un vulgaire agent antiterroriste ! De quel droit intervenez-vous ainsi ?
-Six grèves ! Six ! J'estime que tout cela entre largement dans mon domaine de compétences. Il ne s'agit plus d’événements isolés, c'est...
-Foutaises, vous...
-Il a en partie raison Hock.

C'était le préfet qui venait de parler. Il était resté silencieux durant le début de l'échange, en retrait, et son soudain intérêt pour l'affaire fit aisément taire les deux autres hommes, bien qu'il n'ait pas haussé la voix et s'exprimait d'un ton polie et calme.

-Nous ne savons pas ce qui se passe dans vos usines, mais cette agitation commence à gagner tous les Natifs. Si nous ne réprimons pas cela au plus vite, nous risquons d'avoir à instaurer une nouvelle Pax Militari. Et nul ne le souhaite.

Hock s'enfonça de nouveau dans son fauteuil. La Pax Militari était le terme communément utilisé pour désigner les massacres qui avaient été perpétrés, à l'aube de la colonisation de la planète, pour assurer aux Impériaux la supériorité sur les Natifs. Il en découlait directement toute la situation actuelle, et la soumission totale et inconditionnelle des Natifs, qui servaient d'esclaves et de main d’œuvre sur toute la planète. La Pax Militari était encore célébrée une fois tous les dix ans, pour rappeler à tous qui étaient les maîtres, mais personne en vérité ne se sentait l'ardeur de la renouveler, bien plus occuper à se battre avec le voisin. Si les Natifs le comprenaient, s'ils se rendaient compte de la faiblesse caché de leurs maîtres, la situation pouvait devenir catastrophique.

-Ces incidents ne dureront pas.
-Je l'espère pour vous Hock, je vous laisse deux semaine, après quoi je serais contraint d'intervenir que vous le souhaitiez ou non.

Le commissaire affichait un sourire narquois, presque victorieux. Cela faisait plus d'un mois que les grèves avaient commencé. Avec la régularité d'un métronome, chaque semaine en apportait une nouvelle. Les derniers jours en avaient même apporter deux pour ainsi dire coup sur coup. Deux semaine était un délai incroyablement court, surtout lorsque l'on ne savait pour ainsi dire rien.

-Oui, et alors vous pourrez vous emparer par la force de mes installations, à l'aide des chiens qui vous servent de subalternes. Je sais ce que vous désirez Ferginson, et tant qu'un souffle de vie animera ma carcasse, vous pouvez vous asseoir dessus, est-ce clair ?
-Nous verrons Hock, nous verrons.
-Je ne vous raccompagne pas à la sortie, vous la trouverez sans mal tous seuls je suppose.

Le commissaire ne se fit pas prier et se releva avant de quitter le bureau. Le préfet fut plus lent à quitter la pièce, et avant de s'éloigner se pencha légèrement vers le magistrat.

-Soyez raisonnable Hock, vous ne pourrez le maintenir à l'écart éternellement, ne vaudrait-il mieux pas collaborer et le garder à l’œil ?
-Merci de vous inquiéter Sirius, mais je sais ce que je fait.

Le préfet hocha légèrement la tête et s'en fut de sa démarche pesante. Lorsqu'il quitta la pièce, une silhouette facilement identifiable entra à son tour dans le bureau. Il portait le même manteau qu'à son habitude, bien que de couleur grise cette fois-ci. Il avait cette fois un regard plus fatigué, ses paupières s'abaissant lourdement sur ses deux yeux bleus. Hock lui adressa un salut tout en se relevant pour aller se chercher un verre.

-Tiens, Lazares, vous n'avez pas mis longtemps à revenir.
-Les événements ne nous laissent guère de répit. Servez-moi un verre aussi je vous pries.
-Il me semblait que vous ne buviez pas en service ?

Le dénommé Lazares haussa imperceptiblement les épaules avant de se laisser choir dans l'un des fauteuils. Il se pinça l'arrête du nez, puis récupéra le verre que lui tendait Hock, lequel alla de nouveau s'asseoir dans son fauteuil. Pour une fois, le magistrat eut à parler le premier.

-J'ai l'impression que quelque chose ne va pas.
-C'est ce commissaire... Ferginson... Vous m'aviez dit qu'il ne s'agissait que d'une brute rusée.
-C'est ce qu'il est, et alors ?
-Et alors pour une brute il démêle particulièrement bien les ficelles législatives pour arriver à ses fins, j'ai mis la moitié de la nuit à démonter l'un des dossiers qu'il a dresser contre vous. Il me semblait qu'il ne poserait pas de problème ?
-Je le pensais. Je ne l'ai toujours connus que brutal, réglant ses problèmes par la force. Je ne pensais même pas qu'il justifierait son action aux yeux de la loi.
-Et pourtant, il le fait, et sacrément bien même. Ce qui ne l'empêche pas d'envoyer des homes de mains faire la besogne. En tout cas, rien ne me donne chez lui l'impression qu'il agit sans finesse, il me semble justement particulièrement bien organisé ses coups.
-J'ai dus le sous-estimer.

Hock contempla un moment sa boisson, avant de porter le verre à ses lèvres et de reporter son regard sur l'un des tableaux de son bureau. Il s'agissait, de ce qu'on lui avait dit, d'une représentation d'une cité-ruche. Il se perdait souvent dans la contemplation des arêtes d'acier et de verre qui la constituaient, et s'imaginait la même super-structure s'élever au-dessus de l'estuaire.

-Du reste, reprit Lazares, je ne comprends pas pourquoi ne pas suivre le conseil du préfet, cela me semble une bonne solution.
-Je me méfie. A dire vrai, je ne serais pas si surpris que Ferginson soit derrière toutes ces grèves, surtout d'après ce que vous me dites. Et si c'est le cas, lui permettre d'intervenir serait signer la perte des usines.
-En attendant, tout ce que vous avez pus essayer c'est avéré inefficace. Et pourtant vous avez déjà dus faire lester de roches la moitié des agitateurs connus de vos esclaves.
-Je sais. Il y a quelqu'un derrière tout ça, j'en ai la conviction. Je ne sais pas qui, ou quoi, mais quelque chose lie ces types, quelque chose que je ne peux atteindre directement.
-Et donc, qu'est-ce que vous comptez faire ? L'attirer à découvert ?
-Non, cela ne m'est certainement pas possible. Non, je compte bien aller le traquer, jusque dans les ombres où il se réfugie. Et j'ai le parfait agent pour cela.
-Ne devrait-elle pas être employé à meilleur profits, comme contre vos opposants à l'héritage ?
-Si je perds les usines, je perds toute place dans la course. Non, il me faut garder le plein contrôle des usines. C'est primordial.
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Jarlaxle
Bregan d'Aerthe.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeLun 10 Déc 2012 - 21:34

Chapitre IV :

Viconia rouvrit les yeux doucement puis se redressa. Elle se dégagea des draps raides, qui puaient la luxure, et se releva. Elle avait le corps lourds, les muscles mous, les articulations endolories, son crâne lui faisait mal et ses tempes tambourinaient douloureusement. La rechute, elle était toujours la même, toujours brutale. Elle prit instinctivement une graine entre deux doigts, puis se ravisa et la reposa dans le sachet. Elle avait besoin de tous ses moyens, la douleur ne durerait pas, envolée d'ici qu'elle ait atteint le quartiers des Natifs.
Elle avait dormis toute l'après-midi et grande partie de la nuit. L'heure était venue de se mettre en chasse. En quelques gestes, elle se défit de son chemisier et fit glisser son pantalon le long de ses jambes. Farfouillant dans ses affaires, elle en ramena un body en tissu qu'elle enfila avant de se glisser dans sa combinaison aussi noire que la nuit. Ramenant ses cheveux en arrière elle les tressa autant que possible puis les glissa sous la cagoule qui complétait sa tenue. Elle fit descendre ses lunettes de protection sur son visage, désormais dissimulé aux yeux de tous. Elle attrapa son sabre sur le lit, une longue lame courbe, à un seul tranchant et exécuta quelques passes pour détendre ses muscles. Un mouvement trop large lui arracha un râle de douleur. Elle rengaina l'arme et l'accrocha dans son dos. Une ceinture de couteaux de lancer s'accrocha autour de ses hanches, puis une dague vint garnir son bras droit tandis qu'une autre était à sa cuisse gauche. La corde vint s'enrouler en bandoulière, le grappin glissé dans celle-ci.

Lorsqu'elle fut prêtre elle tira les rideaux de la pièce et ouvrit la fenêtre. Elle ne donnait sur l'arrière du bâtiment, la ruelle par laquelle elle était arrivé cet après-midi. Celle-ci était déserte, à l'exception d'un homme seul qui attendait devant la porte du club, deux étages en dessous. Elle lui était pour ainsi dire à la verticale, il ne la verrait pas. Elle se hissa sur le rebord, referma presque la fenêtre derrière elle, puis se laissa tomber en avant dans la ruelle. Une légère impulsion au dernier moment la projeta en saut périlleux et elle traversa la ruelle pour venir saisir d'une main une poutre saillante de la maison d'en face, stoppant là sa chute.
Elle regarda en bas mais l'homme n'avait pas bougé, rien perçut. En quelques mouvements elle se hissa sur la poutre, puis attrapa un rebord de fenêtre, glissa un pied dans une aspérité des briques et se hissa encore un peu plus. En quelques secondes, elle avait atteint le toit, en double pente comme la majorité de l'architecture locale, et s'y installa à califourchon sur la poutre centrale. Elle ressortit la lettre de son maître, glissée auparavant dans une poche de la combinaison, et relut l'adresse qu'on lui avait donné. Elle rangea de nouveau la lettre, se releva d'un bond et s'élança à travers la nuit, bondissant de toit en toit avec l'agilité d'un félin en chasse, invisible aux yeux de tous.

Viconia guettait le baraquement qui lui servait de cible. Elle était agenouillé en haut de son vis-à-vis, de l'autre côté du canal putride qui serpentait au sol. Les taudis construits pour abriter la population esclave était bâtis sur les pires endroits du marécages et s'enfonçaient tellement dans le sol que régulièrement les habitants devaient se construire un nouvel étage supérieur et ceux du rez-de chaussée s'y installait pour éviter d'avoir de l'eau aux chevilles. Ces constructions étaient primitives, rapides et en matériaux précaires. Seul l'humidité omniprésente empêchait les incendies de ravager des hectares de terrain. Néanmoins, les bâtiments y étaient-ils plus haut, les esclaves s'y entassaient dans de ridicules cellules individuelles ou de couple. A cette heure, les esclaves qui n'étaient pas du service nocturne dormaient. Elle était arrivé en plein milieu d'une plage de travail et ne risquait pas d'être dérangée par le déplacement des masses avant plusieurs heures, le temps que le soleil ne pointe au-dessus de l'horizon.
La deuxième lune éclairait la majorité de la scène, découpant des ombres étranges dans les chantiers qui se dressaient sur chaque toit, et elle n'avait aucun mal à s'y calfeutrer. L'on la prendrait pour une toile au vent si jamais on la remarquait. Elle se décida donc à bouger et s'approcha du bord, jaugeant la distance qui la séparait de la façade en face. Trop longue pour un saut, mais pas pour un habile lancer. Elle leva les yeux. Le temps n'était pas au beau fixe, et elle put distinguer la masse noir d'un nuage qui se rapprochait. Elle attendit, assez longtemps. Les filaments d'ombres se glissaient devant l'astre lunaire, jusqu'à totalement le recouvrir, ne laissant plus filtrer qu'une pâleur tout juste suffisante pour discerner l'environnement proche.
Viconia se leva, porta la main à ses lunettes et fit glisser d'un cran l'un des objectifs. Après un bref flash, elle put voir comme auparavant, le peu de lumière amplifié par ses verres lui permettait de distinguer les objets même à bonne distance. Et elle se savait invisible. D'un mouvement d'épaule elle fit glisser la corde dans sa main et saisit le grappin. Elle trouva un point d'accroche dans le chantier en face, puis lança l'outil d'une main experte. Il vint tinter contre une barre de fer, puis échoua sur une poutre. Elle tira un coup sec et deux des dents de métal vinrent se planter dans le bois. Elle vérifia la solidité du support en tirant un peu, puis accrocha l'autre extrémité de la corde à un bloc en béton à ses pieds. La différence d'un étage entre les deux bâtiments laissait la corde légèrement penchée, mais cela ne gênerait en rien.
Elle s'avança et posa un pied sur la corde, avant d'en poser un deuxième. Elle testa rapidement la solidité de l'accroche en sautant un peu, puis, satisfaite, reprit sa progression. Ses pas était sûr et elle n'avait qu'à peine besoin de surveiller ses pieds. Elle regardait plutôt la fenêtre de la cellule dans laquelle devait entrer. Fait rare, il semblait s'agir d'une cellule disposant d'une pièce de vie. Cet esclave devait être un maître d’œuvre. Ou sa conjointe. Elle parvint finalement sur le toit et se laissa souplement tomber au sol, amortissant son atterrissage pour ne faire aucun bruit. Elle gagna le bord du toit et se pencha. Sa cible était un étage en dessous. Elle se glissa doucement dans le vide, solidement accroché au rebord. Le torchis de ses immeubles était plein d'aspérités, mais nombreuses étaient les prises à se dérober sous ses doigts ou ses pieds. Elle progressa donc lentement, prudente dans descente. Elle arriva à la fenêtre. Comme prévus, elle n'avait pas de vitre et elle pus se glisser à l'intérieur sans problèmes.

C'était une pièce simple, dénuée de tout ornement, une table et quelques chaise en constituait le principal mobilier. Les murs étaient rongés par l'humidité et le plafond semblait craqueler. Le sol, quant à lui, était un plancher mal ajusté dont chaque latte ne demandait qu'à faire entendre sa présence. Aussi se déplaçait-elle le moins possible, tâtonnant du pied pour trouver les endroits où elle ne risquait pas de provoquer de son trop important. L'autre meuble de la pièce était un espèce de buffet, plus probablement quelques planches de récupération montées ensemble, avec un certain savoir-faire à la rigueur. Divers papier semblaient reposer dessus et cela étaient trop rares pour ne pas attirer l'attention.
Elle s'approcha et jeta un œil aux papiers. La plupart portait l'écriture mécanique des missives de l'usine, informant des prochaines plages horaires et des travaux à faire. Elle ne s'était pas trompé, il s'agissait d'un maître d’œuvre, et qui plus est relativement important au vu de ce qu'elle tenait entre ses mains. Il devait avoir nombre d'esclaves sous ses ordres, peut-être un meneur d'hommes ? Elle avait entendus parler de grèves à répétition dernièrement, mais n'y avait accordé beaucoup d'attention. Elle continua à fouiller, puis tomba sur une lettre, manuscrite elle. L'écriture était plutôt grossière, bien que la langue soit correcte. Il s'agissait probablement de sa cible, ou d'un esclave tout aussi lettré.
La lettre semblait s'adresser à sa conjointe. Elle l'a lue et appris que Konrad s'était absenté pour la nuit, non pas pour travailler mais pour se rendre au... cratère ? Elle ne connaissait aucun cratère dans cette ville, et pourtant la plupart des cartes n'avait pas de secrets pour elle. Et qu'est-ce qu'il allait faire dans un tel endroit en plein nuit, plutôt que de dormir pour récupérer pour son service de jour. Elle glissa le papier dans sa poche. Elle continua de fouiller et trouva une lettre de l'usine, mais qui était plus intéressante. Il s'agissait d'un rappel à l'ordre. On l'accusait d'agitation sociale et de manquement au travail. Il semblait presque l'avoir caché. Elle comprenait désormais ce qu'avait fait cet homme pour attirer l'attention, mais ne savait toujours pas ce qu'elle venait faire là-dedans.

-Tu es qui ?

Instinctivement Viconia rangea la lettre dans sa poche et porta une main à la dague sur sa cuisse en pivotant. Elle aperçue une petite fille, qui l'observait depuis l'embrasure de la porte. Elle avait de longs cheveux noirs qui lui couvrait la moitié du visage et ne laissait voir qu'un œil gris, mais elle savait de quelle couleur était l'autre. Elle ne devait pas avoir une dizaine d'année, et était vêtue d'une longue robe qui apparaissait grise dans le peu de clarté. Elle était là, immobile. Viconia éloigna lentement sa main de sa dague et prit une posture plus naturelle.

-Je t'ai jamais vus, pourquoi tu es venus ?
-Konrad, c'est ton papa ?
-Oui, pourquoi, qu'est-ce que tu veux ?

La main gauche se Viconia se rapprochait doucement de son dos, de ses couteaux de lancer. Elle ne savait pas quoi faire, et de grosses gouttes de sueur roulait dans son cou. Elle ne voulait pas la tuer, n'avait qu'une envie, s'était de partir. Mais elle devait retraverser la rue et elle n'en aurait pas le temps si la petite appelait quelqu'un. Elle devait essayer de la calmer.

-Je travaille avec ton papa, il m'a demandé de venir chercher quelque chose.
-Alors pourquoi tu es entré par la fenêtre ?

Elle se mordit la lèvre. Ses doigts vinrent caresser le manche du couteau, par réflexe. Elle repoussa l'idée, elle ne le voulait pas. Elle restait là, immobile, ne sachant trop comment agir. La petite fille l'observait. Elle n'avait pas l'air effrayée, elle n'avait pas l'âge de comprendre sans doute. Finalement elle commença à se détourner.

-Je vais demander à maman.

Elle haussa un peu la voix, Viconia se tendit.

-Ma...

Elle ne finit jamais sa phrase. Un mouvement, un sifflement, un coup sec puis le bruit du petit corps qui s'écrasait au sol comme une poupée de chiffon, mort avant même de s'en rendre compte. L'assassine se plaqua une main sur la bouche pour ne pas hurler, se mordit une lèvre jusqu'au sang. Elle sentit ses jambes flageoler et s'appuya sur le meuble.
Elle n'avait pas le temps, elle n'avait plus aucun temps. En deux pas elle fut à côté du cadavre et en extrait le couteau de lancer. Puis elle fit demi-tour, prit appui sur le bord de la fenêtre et prit une impulsion dans un demi-tour. Elle agrippa le mur et l'escalada en quelques mouvements, atteignit le toit. Son bras gauche tremblait, sans qu'elle ne puisse l'en empêcher. Elle s'étouffait à moitié. Elle essaya de se hisser sur sa corde mais un vertige la fit glisser après quelques pas. Elle aurait été projeter dans le vide si un réflexe ne l'avait pas fait se suspendre par les jambes la tête en bas. Réussissant à attrape la corde de ses mains, elle préféra avancer ainsi plutôt que de tenter de se relever de nouveau. Elle parvint finalement au toit d'en face et s'y hissa.
Le plus mécaniquement possible, comme absente, toujours saisie de violents tremblements, elle défit la corde et le grappin d'un geste sec puis ramena le tout à elle, avant de l'enrouler rapidement. De nouveau prête, elle s'élança dans la nuit, aussi rapidement qu'il le lui était possible.

Elle ne s'arrêta que bien plus loin, essoufflée. Sa poitrine était en feu et chaque respiration lui était difficile. Elle avait déjà couvert une grande distance aussi s'adossa-t-elle à une cheminée pour s'y laisser glisser. Elle ôta ses lunettes d'une main, et finalement les sanglots qui menaçaient d'éclater depuis tout à l'heure se déversèrent. Seule, dans l'ombre, agitée de soubresauts tandis qu'épaisses larmes salées venaient lui brûler les joues, elle ne se contint plus. Elle repensa à son visage, enfantin, au petit corps brisé, au bruit de succion lorsqu'elle en retira le couteau, à la flaque sang qui se déversait sur le sol et au regard d'incompréhension qu'elle put apercevoir, lorsqu'un courant d'air souleva ses cheveux, révélant un œil doré qui la fixait.
Elle fut soudainement prise d'un haut-le-cœur et se laissa tomber à genoux pour vomir. Elle n'avait rien mangé depuis plusieurs heures et n'éjecta qu'une bile noirâtre, amer. Elle reprit son souffle, laissa la douleur de sa poitrine se soulager d'elle même. Un nouveau haut-le-cœur et un jet de bile. Elle en avait mal au ventre, le goût amer que cela laissait dans sa bouche lui donnait envie de recracher encore davantage mais elle se contint, essayant de se remettra à genou pour inspirer l'air de la nuit. Son bras était encore parcourus de tremblements nerveux et ses tempes recommençaient à lui faire mal.
Elle se releva, doucement. Ses jambes étaient fragiles sous elle, débarrassée de l'adrénaline de la fuite, libérée de la menace, elle se laissait aller à la faiblesse. Elle inspira à fond, puis laissa tout doucement l'air s'échapper de ses poumons, entre ses lèvres à peine entrouvertes. Puis elle se remit en route, lentement, un pas après l'autre. Elle manqua trébucher à plusieurs reprise et parvint tout juste à sauter la petite ruelle qui la séparait de la maison d'en face. Mais elle n'était plus très loin, elle pourrait y arriver.

Elle se glissa dans la pièce, regagnant l'ombre bienvenue de la chambre. Elle était encore toute tremblante. Elle laissa tomber ses armes au sol, se défit péniblement de sa combinaison et s'allongea sur le lit. Son odeur épouvantable en était presque réconfortante, luttant contre le goût de la bile. Elle ferma les yeux mais tout ce qu'elle vit, c'est le petit visage poupin. Elle se redressa brusquement, avant d'en voir plus. Elle se leva et quitta sa chambre. Elle déambula dans les couloirs, à moitié avachis contre l'un des murs, jusqu'à croiser l'une des esclaves. Se fut plutôt celle-ci qui l'aperçut et s'approcha.

-Une pipe d'opium. Vite. La plus forte possible. Et grosse.

L'esclave laissa un regard dériver sur l'oreille droite de Viconia mais dans un sursaut de colère celle-ci la saisit à la gorge et la projeta dans le couloir. Du moins elle aurait dus, mais son équilibre précaire fit que l'esclave recula à peine tandis qu'elle-même tournait sur un pied avant de réussir à reprendre appui sur un meuble. Mais la servante comprit le message et s'éloigna. Viconia décida de l'attendre ici et s'assit contre le mur. La tête commençaient à lui tourner, et les vapeurs qui rôdaient dans le couloir, en provenance des étages inférieurs, n'arrangeaient rien.
Après un temps indéterminé, la jeune femme revint, une pipe en main qu'elle lui tendit. Viconia la saisit et essaya de se relever. Voyant qu'elle chancelait, l'esclave l'aida. Se faisant elle vint se coller à elle et Viconia put sentir l'odeur de ses cheveux, mélanges de graisse parfumée, de cendres et d'une pointe de sexe. Elle se releva et s'en retourna vers sa chambre, accompagné par l'esclave qui surveillait à ce que rien n'arrive à une cliente. Elle avait déjà pus assister à ce qui arrivait lorsqu'une esclave faillait à son devoir.

Finalement Viconia pénétra de nouveau dans la pièce et alla s'écraser sur son matelas. Allongée sur le dos, elle contemplait le plafond et toute ses imperfections, se laissant doucement transporté par les volutes de fumées qu'elles aspirait à intervalles réguliers. Petit à petit ses tremblements cessèrent, ses paupières se fermèrent et ses tempes lui faisaient moins mal. Finalement, elle sombra sans s'en rendre compte dans un demi-sommeil, une transe méditative de droguée qu'elle affectionnait plus que tout. Là ne vinrent la tourmenter nul visage, nul corps poupin, et elle put finalement trouver le sommeil alors même que les premières lueurs de l'aube se dessinaient dans la voûte céleste, derrière les épais rideaux de tissu.


Dernière édition par Jarlaxle le Jeu 13 Déc 2012 - 21:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeJeu 13 Déc 2012 - 21:33

Très sympa à lire, je m'attache bien à notre petite assassine/esclave/voleuse/droguée et je ne sais trop quoi de plus :o))
Petite remarque:
Citation :
Elle se releva et s'en retourna vers sa jambe,
ça m'a beaucoup fait rire :noel:
Sweet! :)
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeJeu 13 Déc 2012 - 21:59

Merci.

Je vais essayer d'écrire mais dans les prochains jours il faudrait que je bosse mes maths, à voir donc quand ça arrivera :/
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeLun 4 Fév 2013 - 21:46

Ahah ! Je l'ai posté, enfin ! :fou:


Chapitre V :

Dan venait de surveiller la bonne livraison d'un chargement d'alcool. Les quinze tonneaux avaient été descendus à la cave comme convenus, et il avait personnellement vérifié le contenu de ceux-ci, ainsi que la présence du double-fond dans lequel était camouflé la drogue qu'il vendait dans la fumerie. Il avait encore dus payer cher pour que l'agent des douanes qui avaient surveillé son colis ferme les yeux, mais cela lui rapporterait encore plus gros à la vente. Une fois le tout convenablement rangé, il remonta à son bureau. La taverne était encore vide, pour ainsi dire, et il pouvait se permettre de laisser la direction à ses employés. Il entra dans la petite pièce, et aperçut aussitôt Vic qui l'attendait, debout devant l'unique fenêtre. Il ferma la porte et s'approcha d'elle, restant à quelques pas.

-Un problème ?
-Non.

Il nota la légère hésitation dans le ton de sa voix. Cela ne lui ressemblait pas. Elle se tourna vers lui et il put noter ses pupilles dilatés et ses poils qui se hérissaient sur la peau nue de ses bras, malgré les rayons ardents du soleil de l'automne. Elle était encore drogué.

-Je me demandais si tu connaissais un cratère ? Quelque part en ville.
-Je pense que ça se saurait s'il y avait un cratère quelque part, non ?
-Visiblement, il y en a un, j'ai trouvé ça chez ma cible.

Elle lui tendit un papier, plié et froissé. Il s'efforça d'en déchiffrer l'écriture et haussa un sourcil.

-Non, ça ne me dit rien. Ça pourrait être le nom de n'importe quel bar minable des taudis, remarque.
-Je ne vais pas m'amuser à fouiller tout le quartier !

Dan haussa les épaules, l'air de dire que ce n'était pas son problème de toute façon. Ce qui était vrai, Vic était seule sur ce coup là, en dehors de l'héberger si elle le lui demandait, Dan n'avait aucune obligation de l'aider. Enfin, il en avait une autre en réalité.

-T'as toujours l'outil de Hock ?
-Comment ? … Oh, oui, évidemment. L'anneau de fer aussi.
-Bien.

Les anneaux, qui marquaient les Natifs comme du bétail, étaient sans conteste de petites merveilles de techniques. Des dizaines de ressorts et de mécanisme miniature rendait chacun impossible à ouvrir sans l'outil adéquat, lequel ressemblait en fait à une grosse agrafeuse, et sans charcuter l'oreille de l'esclave au passage. Viconia vint s'asseoir sur un fauteuil tandis que Dan sortait d'un tiroir un anneau de fer et l'outil en question. On ne marquait pas seulement l'appartenance des Natifs, mais également leur rang. Le fer était pour les ouvriers, le cuivre pour les messagers et les artisans, l'argent pour les domestiques et l'or pour les esclaves les plus ''proches''. Les bons traitements et la valeur de l'esclave augmentaient bien évidemment avec le matériau, ce qui donnait lieu à une rivalité féroce entre les différentes classes de Natifs. Un argenté, comme on les appelait, qui se promenait dans les taudis ouvrier n'allait rien récolter d'autre que des coups.
Aussi certains esclaves un peu spéciaux étaient amenés à régulièrement permuter leur anneaux. C'était notamment le cas de Viconia, qui possédait un anneau de chaque catégorie jusqu'à l'argent, qu'elle portait le plus souvent. Mais là elle allait avoir besoin de passer inaperçue. Le transfert se passa sans problème notable, et l'outil ainsi que l'anneau d'argent furent rangés de nouveau sous clé.

-Je doit m'attendre à te voir revenir régulièrement ?
-Sais pas, dis à ton esclave de pas fermer la fenêtre de ma chambre, j'aurais pas besoin de plus de toute façon. T'as vraiment aucune piste à me proposer ?
-Non, mais tu peux toujours voir auprès de mes serveurs, je pense pas qu'ils connaissent mais ils doivent avoir quelques adresses. A toi de voir.

Elle hocha la tête et quitta le bureau. Elle était étonné que Dan n'en sache pas plus, mais il ne quittait guère le port après tout. Et les Natifs n'y venaient pas en dehors des heures de travail. Elle descendit au sous-sol, où se reposaient les esclaves de l'établissement en attendant l'arrivée des clients. Ils étaient en train de jouer leurs corvées au poker. Contrairement à dans tous les autres établissements de la galaxie, la plonge était ce qui était le plus recherché, car loin des clients. Ils se turent un instant en la voyant descendre, puis reprirent leur jeu. Ils la connaissaient, elle passait là tout le temps. La familiarité qu'elle avait avec le patron les mettait mal à l'aise, mais à côté de cela, c'était une native aussi.
Elle vint s'installer à côté d'eux, et les observa jouer pendant un moment. Finalement elle vint s'asseoir à leur table. Ils arrêtèrent leur partie pour la regarder.

-Qu'est-ce que tu joues ? Lança l'un d'eux, avec un regard méfiant.

Elle posa le papier au centre de la table.

-Si je gagne, vous me dites ce que vous savez du cratère.

Aucun regard ne cilla, ils ne réagirent pas le moins du monde.

-Et si tu perds ?
-Le gagnant aura le droit de me rejoindre dans ma chambre après son service. Je m'occuperai de votre patron.

Ils échangèrent un regard, puis celui qui tenait les cartes distribua, rajoutant Viconia au passage. Elle récupéra les cinq cartes de sa main. Elle n'avait qu'une paire, de huit, et un as. Le reste était trop insignifiant pour attirer l'attention. La manche se joua, elle échangea le reste de ses cartes, récupéra un Impérial. Elle grogna, les jeux de cartes avaient quelques spécificités sur la planète. Ils abattirent leurs cartes. Sans surprise elle ne gagna pas la manche et celui qui récupérait la mise, face à elle, lui adressa un sourire pervers.

-Une autre partie ?
-Qu'est-ce que tu crois ?

Il redistribuèrent les cartes, tous lui adressaient de petits sourires en coin, puis jouèrent la manche. Vint le tour d'abattre les cartes. Le précédent gagnant n'avait rien, tandis que son voisin de gauche possédait une paire insignifiante. Viconia vit la commissure des lèvres du troisième se redresser tandis qu'il abattait son jeu. Paire d'Impériales et de neuf. Elle sentit leur regard fixer sur elle, puis laissa tomber ses cartes. Full des huit par les as. Ils l'observèrent dans un instant de silence, avant qu'elle ne réclame son dus d'une voix claire et tranchante.

-Alors ?

Ils s'entre-regardèrent. Sans doute estimaient-ils leur possibilité de refus. Mais il courrait des rumeurs sur son compte parmi les esclaves de la maisons, un peu trop pour les ignorer. Ils durent en venir à la conclusion que la contrarier était trop dangereux, puisque l'un d'eux se décida finalement à parler.

-C'est une espèce de réunion. Entre ouvriers.
-Ils causent. On sait pas vraiment d'quoi, tout ce qu'on a c'est des rumeurs.
-Paraît que le type qui organise ça est... je sais pas trop quoi. Il parle bien, quoi.
-Ils changent souvent d'endroits, mais ça commence à être connus.
-Facile de trouver quelqu'un qui sait où ça s'passe.

Elle acquiesça distraitement et se releva. Elle allait quitter la pièce lorsque l'un d'eux l'interpella.

-Vous devriez faire gaffe, ils sont méfiants, même s'ils ont l'air d'inviter tout le monde. Serait dommage de vous retrouver au fond du canal, non ?

Elle allait rétorquer que c'était plutôt elle qui y mettait les autres, mais ce contenta de le remercier d'un hochement de tête et de quitter l'auberge, prenant aussitôt la direction des taudis ouvriers. Il n'était pas encore l'heure du changement d'équipe, heure probable à laquelle se lançait une nouvelle réunion. Mais elle trouverait peut-être quelqu'un à même de lui dire où se trouverait le Cratère ce soir.



La pièce était déserte, sale et humide. C'est deux derniers points avaient valeur de constante dans les taudis. Viconia essayait vainement de boire ce qu'on lui avait vendus pour une bière, et de ne pas trop ressortir du décor. Elle comptait trois autres personnes avec elle, plus le patron. Aucun ne parlait, se contentant de fixer le fond de son verre ou la porte, suivant les occupations. Elle n'avait pas pensé qu'il puisse être aussi dur de trouver un informateur, elle avait traversé la moitié du quartier sans ne jamais rencontrer passant et lorsqu'enfin elle apercevait un bar, ses occupants étaient aussi muets que des tombes.
Et elle avait eu la désagréable sensation de se faire épier en permanence depuis son arrivée, même s'il ne s'agissait selon toute vraisemblance que d'une bande de gamins des rues qu'elle n'avait pas remarqués, les esclaves orphelins étaient connus pour leur discrétion. C'était même pour ça que Hock l'avait ''élevé''. Décidé à bouger, elle se leva de sa place et quitta le bar, non sans abattre un crédit devant le patron au passage. Elle reprit son chemin le long des canaux boueux, frappant du pied un caillou imaginaire dans une vaine tentative de se soulager.

Comment pouvait-elle trouver une réunion d'ouvrier si les taudis ressemblait à un mausolée ? Quelque chose clochait, elle ne se souvenait pas de ça. Pour le peu qu'il lui restait, cela avait été des lieux bien plus animés, les esclaves qui n'étaient pas de service passant la plupart de leur temps ensemble, à partager leur misère. Elle avait l'impression d'être dans une tombe. Un vrombissement attira son attention et elle se retourna.
Un engin antigravifique vira soudainement à un angle, les pulsations de son moteur dessinant des rides à la surface de l'eau. Il était vaguement sphérique, d'une couleur noir peu engageante et le bourdonnement de son moteur était reconnaissable entre tous. Il valait aux forces de l'ordre qui l'utilisaient l'amical surnom de ''cafard''. Habituellement il ne servait qu'à la surveillance et il était rare d'en voir dans les taudis. Mais lorsqu'en sus il était équipé de deux fusils lasers, il était temps d'arrêter de se poser des questions.

Viconia s'élança brusquement le long du ponton. Elle entendit un bref rappel à l'ordre hurlé au mégaphone mais le claquement des lasers avaient commencé avant même qu'il ne se finisse. Ils trouèrent et calcinèrent le bois à moitié pourris quelques mètres derrière l'esclave, qui vira soudainement à gauche, juste à temps pour éviter de se faire réduire en miette. L'aéronef cessa le feu et accéléra soudainement, ne prenant guère plus d'une seconde pour courir les quelques dizaines de mètres qui le séparait de la fuyarde. Ils voltèrent dans la rue mais ne virent rien. L'un des deux pilotes fit quelques signes à l'autre et l'appareil s'éleva de plusieurs mètres,surplombant bientôt les toits. Mais là non plus, aucune trace. Haussant les épaules, ils continuèrent leur patrouille, plus méfiants qu'auparavant.
Juste sous l'endroit où ils s'étaient tenus auparavant, une tâche rousse apparus à la surface de l'eau boueuse du canal, s'élevant pour révéler deux yeux , l'un vert et l'autre or. De longs cheveux roux se dessinaient parmi la masse informe, tandis que les pupilles scrutatrices allaient en tout sens. Finalement, elle se glissa jusqu'au bord et attrapa une poutre de bois pour se hisser de nouveau sur le ponton. Viconia prit quelques minutes pour tenter d'essorer ses cheveux, ils la gênaient plus que tout dans cet état. Puis elle sortir d'une poche le pochon de graine, vérifiant l'étanchéité. Il était intact. Désormais trempée, puante, misérable, elle sortit une graine et la pressa entre ses dents. Le frisson fut plus violent qu'à l'accoutumé, et pour un peu son équilibre précaire manqua la replonger dans le canal.

Mais elle parvint à reprendre sa route, son esprit embrumé et désormais erratique s'interrogeant sur la raison de cette patrouille. Qu'avait-il encore bien pus se passer pour justifier un tel déploiement de force ? Et, plus important, cela pouvait-il avoir un quelconque rapport avec sa propre situation ? Les agents auraient-ils entendus parler du Cratère ? Et dans ce cas, le cherchaient-ils ou l'avaient-ils déjà trouver ? Désireuse de trouver réponse à ses questions, elle se rendit vers l'endroit où celles-ci se trouvaient probablement : les manufactorum et les complexes industriels.

Elle y parvint après une bonne heure de marche. Par habitude, elle s'était dirigé vers le complexe Hock, l'un des plus grands qui plus est. Il commençait par une grande place, décoré au sol d'un aigle impérial, où se réunissaient les files d'ouvriers toutes les douze heures. Bien qu'à ce moment là, c'était plus les cadavres qui couvraient le sol. Il y en avait plusieurs dizaines, peut-être même centaine. L'explication fut soudainement clair : les grèves qui se succédaient avaient finalement dégénérées. Les manifestants avaient dus aller juste trop loin, et les agents de sécurité avaient ouvert le feu. C'était plus rare qu'on ne le pensait, puisque cela autorisait de facto les forces de l'ordre officiel à mettre leur nez dans les affaires du propriétaire. Et pour y jouer un certain rôle, Viconia savait que Hock aimait ses secrets aussi secrets que possible.

-Vous y étiez ?

Elle se retourna, pour voir un homme, d'à peu près la trentaine, à la peau relativement pâle par rapport à ses confrères mais indéniablement natif à ses yeux vairons, or et gris. Il avait des cheveux noirs, coupés court, et son visage ressemblait bien trop à celui qui parsemait ses récents cauchemars. Une suée la prit, mais elle dissimula sa gêne au mieux. Elle vérifia mentalement la présence de ses quelques armes sur elle. Une dague dans une botte, une autre dans son dos, deux couteaux de lancer sanglés à ses cuisses, et un stylet sur son bras droit.

-Non, j'ai juste vus les cafards.
-Putain de salauds, ça été un carnage.
-Qu'est-ce qui s'est passé ?
-Je sais pas, tout était comme d'habitude, une grève comme il y en avait déjà eu plein, les gardes restaient tranquille, quelques cafards surveillaient de loin.

Pourquoi étaient-ils déjà là eux ? Nota Viconia.

-On s'attendait bien à voir disparaître un ou deux meneurs dans les prochains jours, mais à part ça rien. Et soudain une bande d'abrutis se sont mis à jeter des pierres et à tirer avec de vieilles pétoires sur les gardes. L'un d'eux à même balancé une bombe artisanale qui a bien amoché le mur -il désigna du doigt la marque su souffle-. Et puis ça été l'enfer, le cafards sont brusquement descendus et ont ouvert le feu, les gardes aussi. On a voulus fuir mais avec la panique...

Il écarta les bras pour englober le désastre. Viconia remarqua seulement maintenant que certains cadavres ne portaient d'autres blessures que des ecchymoses et des traces de coups. Assurément pas ce que pouvaient faire des fusils lasers. Mais bien plus une foule vous marchant dessus.

-Vous connaissiez quelqu'un ?
-J'y avais des amis oui, mentit-elle sans plus y réfléchir. Je ne les vois pas, vous savez où je pourrais les retrouver ? Un endroit où tous ces gens se rencontrent.

Lui tournant le dos pour contempler le carnage et plus facilement mentir, elle ne vit pas le bref rictus qui accrocha la figure de son interlocuteur. Konrad, comme elle le présumait, répondit toutefois sur un ton assez détaché pour paraître naturel.

-Peut-être, vous savez tenir un secret ?

Lui faisant de nouveau face, elle acquiesça silencieusement.

-Alors suivez-moi.


Ils arrivèrent rapidement devant un bâtiment délabré, semblable à tous ceux qui composaient les alentours. Éviter les patrouilles avait été facile, bien qu'ils durent de nouveau s'abriter dans l'eau boueuse des canaux et qu'ils n'avaient donc pus encore sécher lorsqu'ils pénétrèrent l'endroit. Il s'agissait d'un vestibule tout à fait classique, dont les murs comme le reste du bâtiment étaient fait de briques et de torchis que venaient ça et là renforcer quelques poutres de bois ou pièce de métal récupéré dans les déchets des usine.

Konrad lui fit signe de la suivre, et elle le fit après un léger instant d'hésitation qui se dissipa bien vite. L'endroit n'avait rien de menaçant après tout, il s'agissait sans doute d'un autre de ces repaires de bandes. Si là était le Cratère, il semblait bien déserté à cette heure. Ils croisèrent une ou deux personnes qui saluèrent Konrad et ignorèrent Viconia qui le leur rendit. Finalement le contremaître amena l'assassine devant une porte, et lui fit signe d'entrer.
Elle s'arrêta et le jaugea. Il ne semblait pas hostile mais qui pouvait dire ce qui se trouvait derrière cette porte. Et s'il s'agissait d'un traquenard ? Et bien elle s'en échapperait, lui susurra une petite voix orgueilleuse, après tout n'était-elle pas la plus douée des montes-en-l'air de cette cité ? Qu'est-ce qu'un petit contremaître pouvait opposer comme problèmes ? Elle fronça un instant les sourcils, elle pensait vraiment cela ? Mais elle s'était déjà laissé franchir la porte pour pénétrer un petit appartement miteux au mobilier en ruine qu'occupaient deux hommes. Deux hommes qui lui furent soudainement familier.

-Tiens tiens, mais c'est le petit jouet ? On n'arrête les balades nocturnes ? L'homme avait une voix légèrement sifflante, sans doute depuis qu'elle lui avait cassé quelques dents.

Elle voulut reculer et porter une main au bas de son dos lorsqu'un coup sec la cueillit à l'arrière du crâne et l'envoya au sol, complètement sonnée. Elle voulut essayer de se relever mais un coup de pied dans l'estomac la fit se retourner et cracher un filet de bile, avant qu'un dernier coup à la tempe ne l'envoie rejoindre ses mondes intérieurs peuplés de cauchemars et ne redécore son visage d'un filet de sang.
L'un des deux hommes, celui qui était resté silencieux se leva doucement et s'approcha du contremaître qui tenait à la main un épais morceau de bois à moitié pourris.

-Hé, t'es sur les nerfs mon Konrad ?
-La ferme ! Ligotez-la et couvrez-lui la tête, si elle se réveille assommez-la, vous l'emmènerez avec vous ce soir !
-Comme tu veux. C'est le guide qui la veux ?
-Ouais. Mais je sais pas pourquoi.

Le siffleur haussa les épaules avant d'aller chercher une corde et un sac, tandis que Konrad quittait la demeure, les épaules tremblantes et la démarche un peu chaloupée, essayant de contenir les larmes qui lui montaient aux yeux.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 5 Fév 2013 - 18:23

Citation :
Il valait aux forces de l'ordre qui l'utilisaient l'amical surnom de ''cafard''. Habituellement il ne servait qu'à la surveillance et il était rare d'en voir dans les taudis. Mais lorsqu'en sus il était équipé de deux fusils lasers, il était temps d'arrêter de se poser des questions.
Des fusils lasers installés sur un aéronef ? Je te conseil de remplacer par le multi-laser, une arme lourde parfaite pour les véhicules de police de répression si typique de l'Imperium. Si je me souviens bien, son profil ressemble un peu à un bolter lourd du pauvre, mais avec quatre tirs... ou quelque chose comme ça. Je n'ai pas mon codex CDD sous la main, alors je ne suis pas certain.


Citation :
Juste sous l'endroit où ils s'étaient tenus auparavant, une tâche rousse apparus à la surface de l'eau boueuse du canal, s'élevant pour révéler deux yeux , l'un vert et l'autre or. De longs cheveux roux se dessinaient parmi la masse informe, tandis que les pupilles scrutatrices allaient en tout sens. Finalement, elle se glissa jusqu'au bord et attrapa une poutre de bois pour se hisser de nouveau sur le ponton.
Une esclave droguée, sicaire genre cultes de parque (lames par souplesse et rapidité)... Je crois que c'est la rousseur qui a produit le déclic, grâce à Arax et son immitation de Slaanesh, l'autre fois... x)


Citation :
-Comme tu veux. C'est le guide qui la veux ?
-Ouais. Mais je sais pas pourquoi.

Le siffleur haussa les épaules avant d'aller chercher une corde et un sac, tandis que Konrad quittait la demeure, les épaules tremblantes et la démarche un peu chaloupée, essayant de contenir les larmes qui lui montaient aux yeux.
Bingo ! La drogue c'est parfait pour contrôler les gens dans une organisation. Ce "Guide" n'a plus qu'à devenir son principal fournisseur, et il a une tueuse à gages / cambrioleuse pour pas cher.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 5 Fév 2013 - 21:24

En fait j'ai préféré mettre des fusils laser pour le côté "bon marché" et parce que j'imagine l'aéronef comme vraiment très léger. Ca se voit pas forcément mais la technologie est très light sur ce monde, y a pas d'épée énergétique ou de bolter, majoritairement des armes à munitions solides comme celles de notre époque. Même les simples lasers sont relativement rares.

Citation :
Je crois que c'est la rousseur qui a produit le déclic, grâce à Arax et son immitation de Slaanesh
De quel déclic et de quelle imitation tu parles au juste ? :noel:
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMer 6 Fév 2013 - 23:19

Tu sais,on pourrait dire pareil de n'importe quel pays en voie de développement. Mais quand ils achètent des armes, ils prennent de grosses commandes néanmoins. Le Japon, pendant Edo Bakumatsu & début de l'ère Meiji, ils ont achetés des bateaux, des armes, des uniformes, des instructeurs... Mais les premières commandes c'étaient des navires de guerre.
Bien sur, ton explication est logique. Mais je trouve assez difficile à imaginer un véhicule genre jeep anti-grav (et donc volant) ou speeder, avec deux armes légères au lieu d'une arme lourde en tourelle. C'est juste difficile à visualiser d'après la description. ;)

(ps : après vérification, le multi-laser est une arme assez dangereuse... Portée 36ps, Force 6, PA6, Type arme lourde. Assez pratique pour tuer du Tyty)


Quant au déclic... Eh bien c'est très Tenkaranpien, mais je vais essayer de m'expliquer.
"C'est un Inquisiteur, il suspecte tout le monde." - Gabriel Angelos à propos de l'Inquisiteur Toth
Tu vois : je suis un joueur Inquisition. Et ton fluff là, il sent la conspiration. What a Face

Le déclic fût produit par le souvenir d'un post où Arax imite Slaanesh, envoyant un pli à l'une de ses Succubus lincianne (Lyndis ou Sélène il me semble...), il y fait un clin d'oeil à South Park (le gag des roux sans âmes) et le résultat est très proche de la description que le dex Démons V5 donne de Slaanesh : "Séduisant et désarmant d'innocence comme seul un dieu peut l'être." qqchose dans ce style.
Et là, ton perso avec son style de combat Slaaneshien, sa rousseur, les allusions appâts à mineur (sexe, drogue, alcool, propos anarchistes... la total quoi) et le reste, ça fait un déclic dans ma tête d'Inquisiteur.

Moralité : J'ai tellement hâte de connaître la suite que je vais même relire la fic depuis le début, et je le referais encore une fois quand tu auras posté la suite. Par ce que tu vas l'à poster, spa' ?

Bientôt, spa' ? :SM1:
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeDim 10 Fév 2013 - 20:09

Toujours aussi sympa bien que j'ai toujours quelques difficultés à voir qui est qui, ou quoi ^^
Ton niveau d'écriture est en constante progression, c'est très agréable à suivre et ça change plaisamment de ce à quoi on est habitué dans cet univers!

Keep on like this! :ok:
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 12 Fév 2013 - 17:39

Merci ça fait plaisir ^^

Une partie de la suite est déjà rédigé, mais là j'ai des priorités autres.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeLun 18 Fév 2013 - 22:48

Bon, c'est à peine digne d'être un chapitre, mais j'avais envie de le poster maintenant.


Chapitre VI :

Le commissaire Ferginson lampa une nouvelle fois son verre de cognac, en étalant d'une main les rapports qu'on lui avait fait. Ses aéronefs étaient entrés en action comme prévus et plusieurs de ses équipes harcelaient les manufactorum pour y entrer et mener à bien leur enquête suite aux incidents. Plusieurs requêtes et rapports de désobéissance avaient déjà été déposés devant de plus hautes instances mais les avocats de Hock ne se laissaient pas facilement impressionner et un certain nombre avait déjà été rejetées.

-Magistrat corrompu, grogna le commissaire.

On toqua à la porte de son bureau et il aboya l'autorisation d'entrer. Deux hommes firent leur apparition dans l'encadrement des battants de chêne, vêtus comme des ouvriers, paraissant en total décalage dans ces lieux, certes pas de luxe, mais de goût. Néanmoins en les voyant entrer le visage de Ferginson s'éclaira d'un sourire et il s'approcha pour leur serrer la main.

-Formidable travail les gars, j'ai les rapports sous le nez, on ne pouvait espérer mieux.
-Merci patron, mais c'était facile.
-Et risqué. Pas de casses ?
-Damès est à l'hôpital, s'est pris une balle dans le bras. Mais il s'en tirera sans séquelle.
-Bien, je ne pense pas avoir d'autre boulot avant une ou deux semaines, laissons un peu décanter la situation dans les bas-fonds, entre l'incident d'aujourd'hui et l'ultimatum, Hock devrait bien avoir assez à faire. Repos.

Les deux hommes hochèrent la tête et ressortirent du bureau, refermant la porte derrière eux, pour ne laisser plus que le commissaire se découper dans les dernières lumières que prodiguait un soleil déclinant. Le reste de la pièce était plongé dans la pénombre, où l'on ne distinguait plus que les quelques meubles en bois bruts qui la décoraient. Il s'approcha de la baie vitrée, et contempla un instant les toits environnants, puis les hauteurs sur lesquels les plus nobles avaient leur place.

-Ils ne sont pas fiables.

La voix qui venait de parler était féminine, douce, cristalline et raffinée jusque dans ses intonations. L'on se plaisait tout de suite à imaginer quelque tentante femme, quelques succube en l'entendant se répercuter dans la pièce. Et bien que Ferginson sache que tout cela et même plus l'attendait derrière, aucun sourire n'éclaira son visage lorsqu'il se retourna pour faire face à la délicate silhouette qui occupait l'un des fauteuils.
Elle était simple, dans sa longue robe blanche, ses hanche voluptueuse et sa poitrine arrogante dessinant un contour des plus appréciable sous le tissu. Elle avait un visage doux, presque poupin, qui ne manquait pas toutefois d'offrir une certaine dureté lorsque la situation s'y prêtait, comme en l'état. Et ses deux yeux marrons, étonnamment quelconque, restait braqué sur le commissaire, tandis que de longs cheveux noirs bouclés descendaient sur ses épaules.

-Pourquoi ?
-Si ils parlent...
-Ils ne parleront pas ! Il voulut mettre fin à cette discussion et détourna le regard.
-S'ils parlent... -il revint malgré lui à elle- ils mettront en danger tout notre plan. Si un quelconque magistrat vient à penser que nous sommes responsables de l'incident, alors non seulement nous ne pourrons accéder au manufactorum mais nous pourrions également perdre la menace que tu as lancée à Hock.
-Je croyais que je n'aurais de toute façons pas du la lancer.
-En effet, mais c'est maintenant chose faite et il n'est pas question de se rétracter. Voilà pourquoi nous devons nous assurer d'un total et imperméable secret.
-Ces types savent tenir leur langue.
-Même face aux propres hommes de mains de Hock ? Jusqu'où iront-ils avant de craquer, selon toi ?

Ferginson fronça les sourcils. Après tout personne ne pouvait vraiment résister à un bourreau déterminé, en tout cas aucun des gars que l'on pouvait trouver pour ce genre de boulot. Et Hock était réputé pour ses hommes de mains, bien qu'ils semblaient patiner depuis le début des grèves. Le commissaire savait donc que personne ne pouvait convenir, et commençait doucement à deviner où voulait en venir son interlocutrice. Il demanda quand même.

-Qu'est-ce que tu proposes ?
-Qu'on les tue.
-Ils ont de la valeur.
-Pas plus que n'importe quel autre petite frappe qui fera leur boulot tout aussi efficacement.
-Ils m'ont servis plusieurs fois, ils me connaissent et comprennent où je veux en venir quand je donne les ordres.
-Ils ne sont pas payés pour comprendre mais exécuter, moins ils en savent mieux c'est.

Ferginson soupira, elle avait toujours raison, force était de le reconnaître. Il abandonna le débat d'un geste de la main et se servit un nouveau verre. En réponse la femme adressa un petit signe de tête derrière elle et aussitôt un soldat surgit de l'ombre. Il était grand et portait une armure noire, semblable par l'aspect à celles de ce monde mais que l'on sentait clairement supérieure à simplement la voir. Un casque intégral recouvrait son visage, mais sa démarche trahissait son zèle. Il quitta aussitôt la pièce, passant à côté de Ferginson comme sans le voir, puis l'on put entendre ses pas secs s'éloigner dans le couloir. Le commissaire se tourna vers la femme.

-Depuis combien de temps est-il là ?
-A peu près autant que moi, sa présence t'aurait-elle gêné ?

Il eut une grimace de mépris face à la raillerie à peine dissimulée. Il ne l'avait pas remarqué à un seul instant.

-Qu'est-ce qui me dit que je peux lui faire confiance, à lui, au juste ?
-Rien, mais il faut tenir compte d'un facteur.
-Lequel ?
-C'est que, mon cher, tu n'as pas vraiment le choix.


La ruelle était sombre, les hauts immeubles délabrés qui la bordaient masquaient depuis longtemps le soleil. Il s'agissait d'un de ces quartiers où résidait la classe moyenne de la cité, au-dessus des Natifs mais pas assez riches pour en posséder. L'ensemble était assez quelconque, des immeubles correct vêtus sur un sol bien dur, là où les marécages avaient été le mieux asséchés. L'on ne pouvait pas y bâtir des caves et les fondations s'enfonçaient plus loin que n'aurait pus le dire aucun architecte, mais c'était du solide ouvrage qui tiendrait encore des années. L'on y croisait pas grand chose, qu'il s'agisse de piéton ou de véhicule, ici l'on ne faisait toujours que passer. Seule une voiture était stationnée au pied d'un immeuble, son occupant avachis sur le volant, une cigarette vissée au coin des lèvres, jetant régulièrement des regards énervés à la porte devant laquelle il attendait. Lorsqu'enfin celle-ci s'ouvrit pour laisser sortir un homme, vêtus d'une tenue qui avait put être chic à une époque. Il prit une seconde pour contempler l'air furieux de son collègue avant de monter à bord du véhicule.

-Tu fais chier, la prochaine fois que t'es aussi long, tu feras le chemin à pied. Tu peux pas la sauter en vitesse ta grognasse ?
-Voyons, une femme comme cela ça se travaille en douceur, pas dans la précipitation. C'est une fleur délicate qu'il faut cueillir avec la rosée.
-Garde tes boniments pour les gamins et ta donzelle, je te connais trop pour ça.

Il allait mettre le contact lorsqu'une autre voiture vint s'arrêter à son côté. Elle avait des vitres teintés, du genre qui fleurait la récupération. Celle du passager s'abaissa, attirant le regard des deux hommes de main. Ils eurent le temps de distinguer les trois gueules de canon, qui tournèrent un instant dans un cri strident avant de cracher la mort. Les balles traversèrent sans difficulté verre, métal et chairs, laissant des traînées de chairs et d'humeur dans leur sillage. Le carnage se poursuivit quelque secondes, dans un vacarme qui résonnait tout le long de la rue, avant que les canons ne s'arrêtent, que la vitre ne remonte et que le véhicule ne redémarre lentement.
Évidemment personne n'avait vus qui était l'agresseur, chacun ayant préféré rester calfeutré chez lui lorsque les balles plurent. Mais de l'avis de tous, il n'y avait là rien d'étonnant. Les forces de l'ordre qui s'y intéressèrent ne retrouvèrent jamais la voiture et le tout fut classé sans suite.


Glenn était fatigué. Depuis qu'ils étaient revenus des taudis, il était resté avec Damès à l'hôpital de leur quartier et n'avait que peu dormis. Entre les pleurs des nouveau nés de l'étage du dessus et le va-et-vient permanent des infirmières, il n'arrivait pas à reposer son esprit. Il en était donc à son énième récaf de la journée. Il passa de nouveau la chambre de Damès, portant le liquide amer à ses lèvres avant de s'adresser à son amis.

-Alors, qu'est-ce qu'a dit l'infirmière de tout à l'heure ?

Il n'y eut pas de réponse. Glenn observa un peu plus Damès, qui ne bougeait pas. Il s'approcha, le hélant encore, avant de ramener son visage vers lui. Il avait les yeux révulsés, la mâchoire molle et la peau qui se refroidissait déjà. Glenn voulut reculer et appeler à l'aide mais soudainement il eut la gorge nouée. Une micro-second il pensa que c'était l'émotion, avant qu'il ne sente distinctement le filin s'enfoncer dans sa peau, faisant perler de légères gouttes de sang. Soudainement paniqué il porta les mains à son cou, essayant vainement de faire lâcher prise à son agresseur, qui maintenait une prise solide, ses coudes fermement appuyé contre le dos de Glenn. Celui-ci, en se débattant, aperçut l’adversaire un fraction de seconde dans un miroir. Juste une grande armure noire. Après encore quelques minutes de luttes stériles, abrégées par les essais désespérer de l'homme de main pour échapper à son sort, le corps devint soudain flasque.
Serrant encore un peu par précaution, l'assassin déposa ensuite doucement sa victime au sol, retira le filin qui vint se replier dans son gantelet. Il éteignit la lumière de la pièce et referma la porte à clé avant de s'approcher de l'unique fenêtre. Il l'ouvrit et se laissa tomber dans la rue, se réceptionnant avec souplesse plusieurs mètres plus bas. Il n'eut pas à attendre longtemps qu'une voiture antigrav venait s'arrêter juste devant lui. La porte coulissa et il s'installa sur le siège passager juste avant que le véhicule ne redémarre pour aller se perdre dans la circulation des quartiers de soirée, regagnant les quartiers chics.

-C'est chiant.

C'était le conducteur, un homme d'âge mûr, à la mâchoire carré et aux cheveux noirs grisonnants qui venait de parler.

-Explique.
-Ben, c'est chiant quoi. Ça va faire plusieurs mois qu'on est là et tout ce qu'on a fait c'est occasionnellement espionner un peu ou liquider un ou deux fouilles-merde. Il me faut un peu d'action moi, c'est pas bon de s'encroûter comme ça. Je demande pas grand chose, une ou deux courses un peu dangereuse de temps en temps... Mais non, cette ville est tellement petite qu'il y a même pas besoin de ça.
-Tu t'ennuies parce qu'on ne fait rien ou parce que notre nouvelle acolyte a été laissée en arrière pour cette mission ?

Le conducteur eut un grognement, et se tut quelque instant avant de reprendre, un air un peu narquois sur le visage.

-C'est facile pour toi, elle est toujours là, elle. Ceci dit tu te la mets quand même sur l'oreille tous les soirs...
-Là, tu deviens chiant.

Le ton était sec, tranchant. L'homme eut la présence d'esprit de se taire, il savait quand provoquer son compagnon et quand il valait mieux pour lui fermer sa grande gueule.

-Mais si ça peut te rassurer, on risque rapidement d'avoir beaucoup plus à faire...

Il ne répondit rien, sachant qu'il n'obtiendrait aucune information avant qu'elle n'ai décidé de lui en donner. Il se contenta donc de sourire et d'accélérer un peu.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeMar 26 Fév 2013 - 8:14

Citation :
Il ne répondit rien, sachant qu'il n'obtiendrait aucune information avant qu'elle n'ai décidé de lui en donner. Il se contenta donc de sourire et d'accélérer un peu.

Cela résume assez bien, je suis toujours aussi perdu, peut être devrais-je tout relire depuis le début pour la peine ><
Toujours plaisant mais toujours aussi peu éclairant :p
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeDim 3 Mar 2013 - 21:50

Moi qui craignais que tu n'en devines trop avec ce passage, me voilà rassurée :o))
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeJeu 14 Mar 2013 - 19:35

Chapitre VII :

Viconia avait le goût de la crasse et de l'urine dans la bouche lorsqu'elle revint à elle. Elle ouvrit brusquement les yeux, pour se retrouver face à ce qui était un mur de torchis consolidés de planches de bois pourris. Elle baignait dans quelques centimètres d'eau boueuse, sale. Elle avait les pieds et poings liés, et éprouva rapidement les nœuds en tirant dessus. Ils ne firent que se resserrer davantage. Elle se retourna sur le dos pour essayer d'observer toute la pièce.
C'était un sous-sol, auparavant un étage quelconque depuis enfoncé dans le marais. L'on s'était contenté de mal combler les fenêtres. La pièce était vide, à l'exception d'une vague paillasse d'où émanait l'odeur de pisse et de chair, juste à côté d'elle. Elle avait dus en sortir dans son inconscience. A moins que ses ravisseurs ne se soient même pas donnés la peine de la poser dessus. Elle repense à ce qui s'était passé juste avant. Comment avait-elle pus être aussi stupide ?!

Mais l'heure n'était pas à l'apitoiement. La seule issue de l'endroit était une porte en bois sur le mur opposé, mais elle devait d'abord se libérer. Et elle n'avait rien à sa disposition pour le faire. Un craquement, typique de ces vieux plancher pourris, venant de derrière la porte attira toute son attention. La porte s'ouvrit sur l'un des types qui l'avait capturé. Le siffleur.


-Oh, le petit jouet s'est réveillé ? J'espère que tu apprécie le confort, un anneau d'argent comme toi doit connaître mieux d'habitude.

Plutôt bien pire, se fit-elle la réflexion, sans la prononcer. Elle dardait sur lui un regard mauvais, acéré comme ses dagues dont la présence lui manquait grandement. L'autre se contenta de glousser, toujours avec ce petit sifflement qui le caractérisait.

-Comment tu vas t'échapper cette fois ? Tu vas disparaître dans l'ombre ? Ou tu vas creuser la terre à coup de dent peut-être ?

Sur ces paroles il éclata d'un rire gras tandis que la prisonnière ne desserrait pas les mâchoires.

-Mais avant que t'en ai la moindre occasion, je vais te rendre la monnaie de ta pièce. Oh non, t'inquiètes pas pour tes dents, c'est tout autre chose qui m'intéresse...

Il vint saisir l'un des seins de sa main calleuse, Le peu d'étoffe qu'elle portait ne diminua en rien le dégoût, et elle essaya vainement de se soustraire. Il l'attrapa d'une main par le cou et la souleva pour la jeter sur la paillasse, à moitié suffocante. Elle éructa lorsqu'elle le sentit lui attraper les hanches pour la mettre à genoux. Devinant ce qui allait suivre elle voulut se redresser vivement mais un poing vint chatouiller ses côtes flottantes, et il lui écrasa le visage contre le matelas de paille, la maintenant ainsi d'un pied appuyé contre sa tête, à moitié étouffée par la souillure.
Elle l'entendit se défaire de son pantalon, puis le sentit quasiment arracher ses vêtements à elle. La pénétration fut brutale, comme une brûlure de l'intérieur. Elle aurait crié de douleur si elle avait pus émettre un son. L'homme s'agitait en elle, poussant des cris de bêtes en rut, s'acharnant dans ses entrailles. Les mouvements s'accéléraient, semblant plus douloureux et profonds à chaque coup. Elle en saignait. Finalement ce fut comme une lave bouillante qui lui déchirait le bas-ventre lorsque l'homme se lâcha en elle, avant de se retirer et de se rhabiller. Il referma son pantalon et la contempla en instant, tétanisée qu'elle était comme morte si ce n'était les palpitations qui agitaient encore son sexe.

-Je vais prévenir le guide de ton réveil, ne bouge pas surtout ! Et il quitta la pièce en rigolant grassement de sa propre blague.

Viconia resta sans bouger plusieurs minutes, l'un de ses yeux parcourant la pièce, la pupille dilatée mais ce n'était pas l'effet de la drogue. Soudain, elle accrocha un reflet dans la fange. Ceci suffit à réveiller son esprit. Passant outre la douleur, elle rampa au sol, ses mains liées dans le dos n'aidant en rien. Par reptations pitoyables, elle réussit à approcher de ce qu'elle avait vus. C'était bien un ce qu'elle espérait, un tesson de verre, d'assez belle taille. L'une de ses arrêtes semblait assez tranchante.
Elle allait essayer de se retourner lorsqu'elle entendit le craquement qui indiquait le retour de son tortionnaire. Il ne lui restait pas assez de temps pour se délier. Plus d'issue.

Le siffleur écarta la porte d'un revers de bras. Son regard alla sur la paillasse, vide, puis sur la prisonnière à quelques pas de celle-ci. Esquissant un sourire mauvais, il s'approcha d'elle et lui décocha un coup de pied dans le ventre, qui la plia en deux. Elle n'ouvrit même pas la bouche pour crier. Il se pencha et la saisit de nouveau au coup, amenant son visage à quelques centimètres du sien, assez pour que Viconia sente l'haleine fortement alcoolisé de l'homme.
Il remarqua les coupures et les bleus qui lui décoraient la face, la plupart laissé par sa chaussure lors du viol précédent.

-Et ben, t'es pas joli à voir. Mais comme t'es une bonne chienne, tu vas avoir droit à une deuxième tournée.

Il la traîna jusqu'à la paillasse et l'y coucha brutalement sur le dos, sans qu'elle ne décolle les lèvres. Il sortit l'une des dague de la prisonnière, qu'il avait gardé à la ceinture, et vit passer une étincelle dans le regard qu'elle lui renvoya. Il prit pour de la peur ce qui n'était que de la convoitise. Saisissant ses jambes, il coupa les liens qui les retenait. Elle essaya d'en profiter pour lui envoyer un coup de pied dans la mâchoire, mais il bloqua facilement ses jambes sous son propre poids avant de ranger la dague.
Il lui écarta les cuisses et se glissa entre. Il défit de nouveau on pantalon, qu'elle pouvait voir déjà déformé, puis lui arracha ce qui recouvrait encore son entrejambe. L'agression se fit moins violente que la première fois, sans doute parce que tout l'esprit de Viconia était concentré sur les occasions qu'ils lui offrait. Lui ne pensait déjà plus qu'à son plaisir et s'allongeait sur elle pour plus de confort. Il reniflait l'odeur de ses cheveux, qui puaient plus qu'un rat mort, mais ne s'en souciait guère.

Viconia saisit l'occasion, ses jambes libérés s'enserrant autour du bassin de l'homme qui redoubla inconsciemment son rythme, haletant toujours plus fort. Le siffleur sentit le froid, puis le déchirement soudain tandis qu'un flot de sang s'échappait de sa carotide arrachée, d'autant plus puissant que son cœur battait à tout rompre sous l'excitation. Il se redressa soudain en beuglant mais Viconia resta accroché et se contracta pour revenir se coller à lui. Elle vint coller ses lèvres contre les siennes et sa langue entre ses dents, puis serra autant que possible. Le siffleur était rendus muet, ses cris désarticulés étouffés par la sangsues qui s'accrochait à ses lèvres, et essayait en vain de se dégager de l'étreinte, de plus en plus affaiblis par la perte de sang.
Il parvint finalement à repousser Viconia, non sans que celle-ci n'arrache un morceau conséquent de sa langue. Il essaya de pousser un cri qui se transforma en gargouillis à cause du sang et des lambeaux de chair qui lui envahissaient la bouche, puis voulut se relever mais fit deux pas avant de s'effondrer, ses derniers efforts ayant achevé de le vider de son sang, lequel se répandait dans l'eau au sol.

La cave resta un instant totalement figée. Viconia récupérait, allongée au sol, le morceau de langue toujours coincé entre les dents. Finalement elle tourna la tête et laissa mollement retomber la chair flasque. Elle pouvait voir le morceau de verre, recouvert d'humeur vermillon, qu'elle avait expulsé de sa bouche juste après avoir déchiré la gorge de son tortionnaire.
Lorsqu'elle fut de nouveau capable de bouger, elle se traîna au sol, jusqu'au cadavre poisseux du siffleur. Se collant à lui, elle palpa de ses mains, à l'aveugle, à la recherche de son arme. Lorsqu'elle la trouva elle la retira de la ceinture puis, après quelques mouvements qui ne manquèrent pas de lui entailler les avants-bras, réussit à couper les liens qui retenaient ses poignets.

Désormais libre de ses entraves, elle se remit péniblement debout. Elle n'était pas indemne de tout cela. Ses poignets et chevilles la faisaient encore souffrir, son visage était sans cesse douloureux, son bas-ventre la brûlait encore et elle sentait du sang séché à l'arrière de son crâne. Qui plus est, elle était couverte de sang et d'autres humeurs, ne portait plus que des lambeaux de vêtements et se trouvait toujours dans un bâtiment parfaitement inconnus, qui plus est en sous-sol. Et vu qu'on l'avait envoyé chercher, il ne faudrait pas encore très longtemps pour que l'on s'inquiète de ne pas avoir remonter le siffleur.
Mais au moins elle avait une arme.
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MessageSujet: Re: De Noir et de Rouge   De Noir et de Rouge Icon_minitimeVen 15 Mar 2013 - 21:45

Beaucoup d'efforts dans ce texte pour rendre le texte violent et gore... non, sale, c'est plsu exact. N'étant pas spécialement fan de viols, je ne peux pas dire que la lecture était agréable, mais j'ai apprécier l'envol vers la liberté qui y est abordé. Ca fait un peu penser aux scènes d'hôpital dans Kill Bill mais en moins réussi, moins esthétique. Ca ne fait pas d'écho, mais peut être est-ce du au fait que c'était diamétralement opposé de mon humeur actuelle, symbolisée par cet avatar d'une jeune femme belle et classe. Fin'bon, en même temps Tarantino est un pro, difficile à comparer avec le travail d'un amateur.


Citation :
Viconia avait le goût de la crasse et de l'urine dans la bouche lorsqu'elle revint à elle.
Agression des sens tous les matins, la Vicky... ça lui change pas beaucoup en fait. :sarcastic:
(je crois que si elle prennait forme dans notre réalité, elle en profiterait pour buter son auteur :-p )


Citation :
La cave resta un instant totalement figée.
Tu n'as rien à changer, mais j'avoue avoir lut "le cave" au début. Je me suis dis que c'était un peu bizarre de le désigner ainsi, puisque tu utilisais "le siffleur" depuis le début, alors j'ai relus et je m'en suis aperçu. C'est sans doute à cause du contexte (et au fait que le siffleur en soit un, de "cave"). :rire2:


Citation :
Qui plus est, elle était couverte de sang et d'autres humeurs
Ah oui... larmes, sang, sueur, sperme, salive, urine, probablement de la bile et de la morve aussi. La totale. Quoique... ça m'étonnerait qu'elle ait mouiller.
Je vois pas des masses d'actrices qui serait prête à tourner dans une scène comme ça... pas sans la bière.
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